La Presse Pontissalienne 298 - Novembre 2024

Le portrait 39

La Presse Pontissalienne n°298 - Novembre 2024

BANNANS

Elle a choisi l’art pour se reconstruire

Myriam Decreuse, entrée en renaissance après le décès de son fils Cette maman de quatre enfants, directrice de crèche, sportive, a eu le malheur de perdre il y a trois ans son fils Quentin victime d’un cancer du rein. Il avait 13 ans. Ne voulant surtout pas se résigner au rôle de la maman qui a perdu son fils tant aimé, elle s’est investie à corps perdu dans la peinture et la poésie. Un chemin de vie entre art et spiritualité.

S on absence semble encore palpable dans la jolie ferme de village restaurée où vit la famille Decreuse. “Chaque membre de la famille se reconstruit à son rythme. Il s’agit maintenant de retrouver un équilibre familial sans lui. Savoir comment cicatriser” , explique Myriam Decreuse qui a choisi de s’ouvrir à la vie après la perte de son enfant. Quentin était le troisième enfant de cette fratrie de quatre frères et sœurs. Il est tombé malade à l’âge de 4 ans. “On lui a décou vert un cancer du rein.” Com mence alors une existence entre rémissions et rechutes, entre domicile et séjours au service hématologie-oncologie pédia trique du C.H.U. Minjoz. “On a eu la chance d’avoir nos familles à proximité et un entourage très aidant surtout sur le plan logis tique” , se souvient la maman de Quentin. Avec son époux, elle ne compte plus les voyages et les nuits pas sées au chevet de son fils. “On essayait de faire une semaine complète ou alors on alternait.” Entre deux séjours à l’hôpital, Quentin vivait un semblant de vie normale. Scolarité partagée entre l’école et à domicile. “Il adorait le foot et il allait parfois s’entraîner au C.A.P. à Pontar lier. Ses moyens d’évasion,

L’exposition “Renaître” L’association Jalmalv organise une exposition les 16 et 17 novembre à l’annexe des Annonciades où seront présentés les dessins et poèmes extraits du livre “Renaître” de Myriam Decreuse. Le livre sera disponible à la vente et les bénéfices seront reversés au service Hématologie oncologie pédiatrique de l’hôpital Minjoz de Besançon pour améliorer le bien-être des enfants hospitalisés gravement malades. n

Après la disparition de son fils Quentin, Myriam Decreuse a décidé d’exprimer en peinture et en poésie ce qu’elle ressentait au plus profond d’elle-même.

reste tabou. Au fil des toiles, des poèmes, Myriam Decreuse raconte sa renaissance et n’hésite pas à la partager. “Je suis contente de ce que je deviens même si, bien sûr, je souffre. On a envie d’être une source d’inspiration pour les gens qui sont aussi en galère.” Elle avait accepté l’an dernier de participer à une exposition à Morteau organisée par l’asso ciation Jalmalv sur le thème du deuil. “J’ai présenté des textes et des tableaux. À partir de là, on m’a encouragée à faire un livre témoignage.” Intitulé “Renaître”, l’ouvrage laisse à voir et à lire le travail de cette maman. “Tous les tableaux sont symboliques. Les poèmes se marient aux tableaux de façon évidente et naturelle.” C’est le livre d’une maman qui a perdu son fils, c’est le livre d’une maman qui aime sa famille, une maman de 43 ans qui travaille, qui fait du sport, une maman qui veut continuer à vivre. Tout simplement. n F.C.

incroyable. Sans lui, je ne me serais jamais intéressée à ces passions.” Elle se découvre aussi des envies de peindre, de mettre des mots. Sa manière à elle de dire ce qu’elle ressent au plus profond d’elle-même. “J’avais déjà une attirance pour ça et là, c’est comme si c’était devenu vital. Comme s’il fallait que j’ex prime quelque chose par l’écri ture et la peinture. Ce n’était pas seulement un déversoir mais une façon de préserver mon âme.” Et Myriam Decreuse de citer ce proverbe bulgare qui lui plaît tant : “Les vivants ferment les yeux des morts, les morts ouvrent les yeux des vivants.” C’est souvent dans les pires épreuves qu’on se découvre des ressources insoupçonnées. “L’art et la spiritualité m’ont permis de me révéler. J’avais aussi besoin d’aller toucher du sens. Je ne voulais pas devenir quelqu’un d’aigri. Malgré la pire des douleurs, je veux continuer à vibrer.” Pas facile dans nos sociétés d’accepter le deuil, d’en parler franchement, le sujet

c’étaient les jeux vidéo et voir ses deux sœurs et son frère. Avec lui, tous les projets étaient décou pés. À la maison, tout s’articulait autour de lui. Il nous a apporté beaucoup de joie. Il riait tout le temps, il rayonnait. Tout le monde était proche de lui.” Intuition, prémonition, Myriam Decreuse comprend assez vite que son fils ne s’en sortira pas. “Il fallait que je tienne debout.

Il était hors de question pour moi d’abandonner. C’est comme un bateau qu’on essaie de maintenir à flot avec des hauts et des bas, des tem pêtes et des périodes de calme.” Myriam puise son envie de résilience en déve loppant beaucoup de spiritualité à travers les livres, la méditation. “C’est un chemin plein de souffrance mais d’une richesse

Le livre d’une

maman qui veut continuer à vivre.

Une des toiles réalisées par Myriam Decreuse.

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