La Presse Pontissalienne 232 - Février 2019

La Presse Pontissalienne n°232 - Février 2019

7

l Enquête Deux mois pour trouver des remèdes “Il n’y a pas eu de problèmes médicaux à Pontarlier”

Un cabinet extérieur a investi le service pour

U ne étude organisationnelle - payée par l’Agence régionale de santé (A.R.S.) - a débuté lundi 28 janvier dans le service des urgences de Pontarlier.Commandée par la direction à un cabinet extérieur, elle doit dégager des pistes d’amélioration dans la prise en charge des patients, le recrutement de personnels, la question des heures supplémentaires, des arrêts- maladie trop nombreux,des formations, des locaux devenus exigus. Elle durera deuxmois.Paradoxalement,les syndicats assurent que les conclusions ne seront rendues qu’en fin d’année ! Desmesures transitoires ont été prises avec l’arrivée d’un infirmier de nuit. déterminer les mesures à prendre. Si la situation est tendue, l’A.R.S. rassure quant aux soins prodigués aux patients.

L’entrée du service rappelle la pétition mise en ligne. Elle a récolté 2 500 signatures.

Membre de la direction des soins à l’A.R.S., Damien Patriat rappelle qu’il “n’y a pas eu de problèmes médicaux ni de dysfonctionnements aux urgences de Pontarlier” à l’inverse des cas mortels révélés par la presse à l’hôpital Lariboi- sière à Paris ou celui de Lons-le-Saunier. Le centre hospitalier de laHaute-Comté n’est toutefois pas à l’abri. La direction a pris des mesures transi- toires avant la fin de cette étude avec “des recrutements qui ont permis de ren- dre des heures supplémentaires à des

agents. Attention, nous ne sommes pas en train de dire que nous créons des postes : il faudra attendre le résultat de l’étude.Cette dernière permettra aux pro- fessionnels du service des urgences et du S.M.U.R.de faire part de leurs conditions de travail et d’exprimer leurs avis sur l’organisation actuelle du service.” Sur lemanque demoyens humains, “le service des urgences a connu une activité sur l’année 2018 assez stable au regard des années antérieures, poursuit l’établisse- ment. S’agissant des sorties S.M.U.R. nous rencontrons une baisse de moitié des transferts “d’hôpital à hôpital” qui s’effectuent désormais par unnouvel héli- coptère supplémentaire sur notre région.” En contrepartie, l’hôpital a subi une diminution de sa dotation de 400 000 euros sur la ligne budgétaire du S.M.U.R., non compensée par les recettes d’activités du service des urgences. Avec la concurrence de la Suisse, la direction devra trouver les bons remèdes pour dénicher denouveaux agents… et surtout les fidéliser. n E.Ch.

non remplacés” explique l’intersyndicale. Ces mesures doivent arriver vite. La création d’un poste de brancardier de nuit, de 20 h 30 à 6 h 30, est lui aussi réclamé ainsi que le renforcement des formations certifiées pour les nouveaux arrivants. Concernant le matériel, le per- sonnel soignant dit avoir besoin d’ordi- nateurs et d’une centrale de scope (sur- veillance des patients) ainsi qu’une optimisation des locaux “qui ne sont plus adaptés au vu de l’affluence.” Une pétition pour soutenir le mouvement avait récolté début février plus de 2 500 signatures. n

Revendications Ce qu’ils réclament M ercredi 30 janvier, le personnel soi- gnant des urgences a reconduit une grève après l’action du 17 janvier. Personnels médicaux et non médicaux ont suivi le mouvement. Les revendi- cations restent les mêmes : la création d’un poste d’infirmière d’accueil et d’orien- tation de nuit dédiée aux urgences, et d’un poste d’infirmier “au vu du nombre d’heures supplémentaires, d’arrêts- maladie, congés maladie et disponibilités

Les patients ne peuvent pas ignorer le malaise des agents. Certains comprennent, d’autres non.

l Témoignage Les infirmières en première ligne “Des personnes de 90 ans attendent 12 heures sur un brancard”

La Presse Pontissalienne : Comprenez-vous la grève des agents ? Patrick Genre : Je la comprends et je partage les préoccupations des personnels. Nous sommes au bout du bout. Il est demandé aux agents des fonctions toujours plus lourdes mais je comprends aussi la difficulté de la direction à qui il est demandé de faire des écono- mies. L.P.P. : L’audit sera-t-il un remède ? P.G. : Il n’y a pas une seule réponse à un problème. Il y aura bien quelques évolutions structurelles grâce à cet audit mais je ne crois pas que ce soit suffisant. L’A.R.S. a demandé à l’hôpital de faire 3 millions d’euros d’économies. J’ai interpellé le directeur de l’A.R.S. que j’ai rencontré le 30 janvier. Certes le problème est national mais il l’est encore plus en zone frontière avec le manque de personnel. L.P.P. : Pour l’Agence régionale de santé, l’hôpital de Pontarlier est “efficient.” Est-ce une façon implicite de dire qu’il n’y aura pas de recrutements massifs ? P.G. : Je trouve cette réaction inadmissible. Je sais le personnel consciencieux mais faut-il attendre qu’il y ait un mort pour réagir ? n Recueilli par E.Ch. Patrick Genre “Faut-il attendre un décès ?” Président du Conseil de surveillance de l’hôpital, le maire de Pontarlier interpelle l’A.R.S.

Après 13 ans aux urgences, cette infirmière a choisi d’intégrer un nouveau service de l’hôpital.

D epuis le 25 janvier, les rires et la bonne humeur communica- tive de Laure ne résonnent plus dans le couloir des urgences. La jeune femme a rejoint un autre service de l’hôpital. “Je pars parce que j’aime beaucoup mon travail et les gens. J’ai une grande conscience professionnelle et si je reste aux urgences, j’aurais peur de devenir aigrie et usée ! Après 13 ans d’urgences, j’ai également besoin de connaître d’autres services” dit la profes- sionnelle qui témoigne. Son constat est sans appel : “Le nombre de passages aux urgences a augmenté. C’est en

partie lié à la fermeture des urgences de Champagnole. Les médecins traitants sont débor- dés. L’hiver, avec le ski, nous avons environ 20 personnes de plus par jour et les locaux, trop petits, ne sont pas adaptés à cette augmentation de passages. Bien souvent, nous n’avons pas le temps d’aller voir les per- sonnes régulièrement. Des per- sonnes de 90 ans attendent par- fois 12 heures sur un brancard et la nuit, l’infirmière est seule pour 20 patients : c’est très dif- ficile.” Les patients, eux, ne sont pas tendres : “Ils ne supportent plus d’attendre, ils sont agressifs.” Une réalité qui se traduit par

Son dernier jour aux urgences.

La conscience professionnelle des agents tient à bout de bras l'hôpital public. Jusqu’à quand ? n E.Ch.

le départ de 14 “anciennes infir- mières, ce qui fragilise l’équipe” conclut Laure qui communique désormais à d’autres collègues et patients sa bonne humeur.

Made with FlippingBook - professional solution for displaying marketing and sales documents online