La Presse Pontissalienne 231 - Janvier 2019

DOSSIER

La Presse Pontissalienne n°231 - Janvier 2019

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l Pôle ressources jeunes

Des actions socio-éducatives

À l’écoute du harcèlement Le service de prévention spécialisé de l’A.D.D.S.E.A. intervient de façon transversale autour de la thématique du harcèlement en milieu scolaire. C’est un lieu d’écoute et d’accompagnement ouvert à tous les jeunes de 11 à 25 ans en proie à des difficultés.

C e service qui réunit deux éducatrices de rue, le Point Information Jeunesse (P.I.J.) et le Point d’Accueil et d’Ecoute Jeune (P.A.E.J.) fait partie du groupe ressources consti- tué pour monter des actions théma- tiques de prévention en lien avec les addictions, la violence, le harcèlement. “C’est même notre coeur de métier. L’action théâtre-forum avec le spec- tacle “Bonnet man” présenté aux élèves de 5ème a été mise en place par le P.I.J.”, explique Fanny Débois, infor- matrice jeunesse. Le service de prévention assiste d’ailleurs à toutes les représentations pour se faire connaître, identifier par les élèves. “On peut éventuellement intervenir au cours du spectacle ou revenir plus tard en établissement sco- laire pour échanger avec les collégiens” , complète Geoffrey Garnier éducateur au P.A.E.J. Ce dernier intervient aus- si au collège Grenier dans la forma- tion des délégués de classe. Il leur indique que faire en situation de har- cèlement, à qui en parler, le rôle des

témoins, les conséquences du harcè- lement… Au-delà de l’information ponctuelle, le service de prévention mène des actions éducatives qui viennent com- pléter le travail déjà engagé en pré- vention ou accompagnement des vic- times de harcèlement. “On n’est pas là pour prendre la place des autres mais pour leur apporter un soutien, une écoute quand elles en ont besoin. On intervient généralement à la deman-

jeunes de Pontarlier qui abrite le P.A.E.J. et le P.I.J. “Quels que soient leurs problèmes, ils sont sûrs de repar- tir avec un soutien, des contacts, des éléments de réponse. Le pôle ressources jeunes veille à leur offrir un accueil et un accompagnement personnalisé, ano- nyme et gratuit en leur proposant un panel d’outils et d’offres de services” , résume Fanny Débois. Règle de base : ici, tous les entretiens se font sur la base du volontariat. Le prévention spécialisée repose en effet sur le principe de la libre adhésion. “C’est le pré-requis pour pouvoir avan- cer. Le service intervient sur le terri- toire de la C.C.G.P. et auprès des jeunes scolarisés dans un établissement pon- tissalien”, observe Goeffrey Garnier. En poste depuis juillet dernier, il a eu à gérer deux situations de harcèle- ment. “On sait très bien que le harcè- lement peut se poursuivre sur des réseaux sociaux comme Snapchat où les adultes sont très peu présents, pour ne pas dire absents. Sur Pontarlier, une réflexion est aujourd’hui engagée pour faire de la présence sociale sur

de des collèges. En général, on rencontre l’enfant harcelé plu- sieurs fois pour l’orien- ter au besoin vers les structures susceptibles de l’aider à s’en sortir. On peut considérer le service de prévention comme un lieu alter- natif.” Les jeunes peuvent aussi faire eux-mêmes la démarche et se rendre place Zarautz au pôle ressources

Une cellule de promeneurs du Net.

Geoffrey Garnier du P.A.E.J. et Fanny Débois du P.I.J. interviennent aussi dans l’écoute et l’accompagnement de jeunes victimes de harcèlement.

tier, établissement scolaire. En quelque sorte des sentinelles de terrain à l’écou- te des jeunes pour créer des liens, être visibles et proposer au besoin un accom- pagnement socio-éducatif à ceux qui sont en marge, en décrochage scolai- re… n F.C.

Internet. Il s’agirait de mettre en pla- ce une cellule de promeneurs du Net. On étudie encore la faisabilité de ce projet porté par les C.A.F.” Les éducatrices de rue du service de prévention spécialisé sont présentes dans tous les lieux où l’on trouve des jeunes : aire de jeux, maison de quar-

l Lycée Xavier-Marmier

Une enquête annuelle

Le harcèlement, c’est l’affaire de tous Si le harcèlement est moins répandu au lycée, ceux qui en souffrent sont aussi plus discrets. Le phénomène est moins visible, d’où l’importance de miser sur la prévention, la confiance et l’accompagnement.

interroge les élèves sur le har- cèlement et plus généralement le processus de victimisation avec les violences verbales ou physiques. Au vu des résultats, le lycée pontissalien apparaît plutôt comme un lycée apaisé. Le taux de situations poten- tiellement à risques avoisine 5 %, soit environ 75 élèves qui se disent harcelés sur un effec- tif de 1 500. “Ces élèves expri- ment un ressenti négatif. Il s’agit parfois juste de chamailleries qui durent depuis quelques jours. On ne traite pas 75 cas de har- cèlement par an même si des lycéens se déclarent en situation difficile au sein du groupe. C’est important d’être précis dans le diagnostic car aux yeux de la loi, le harcèlement est considéré com- me un délit. Pour l’Éducation nationale, c’est aussi un fait gra- ve qui déclenche automatique- ment un traitement éducatif. La loi a renforcé notre obligation à agir” , poursuit le proviseur. Ces enquêtes sont riches d’en- seignement car elles permettent d’avoir un état des lieux assez précis et de détecter des classes à risques avec des leaders et des victimes potentielles. “On mène alors des actions de sensibilisa- tion sur la base de vidéos pour qu’ils prennent conscience du phénomène, de l’importance des adultes et du rôle qu’ils ont à tenir dans une situation de har- cèlement. Quand un élève est harcelé, toute la classe est au courant. Il faut donc mettre les témoins dans les meilleures dis- positions pour qu’ils viennent nous voir.”

Ces actions de sensibilisation sont menées par les C.P.E., les assistantes sociales, les infirmières sco- laires qui inter- viennent aussi avec les profes- seurs princi- paux. Antoine Neves préside la commission de suivi des éta- blissements sen- sibles qui se

ge se décline sous diverses formes : entretien coup de pou- ce entre l’élève et un adulte réfé- rent. “On voit la famille pour garantir la sécurité par rapport à l’enfant puis on met en place un suivi avec l’adulte référent. En situation de harcèlement, on voit l’auteur pour qu’il comprenne la gravité de ses actes. Ces entre- tiens se font aussi en présence de sa famille. Ce n’est pas tou- jours facile à accepter de la part des parents qui sont parfois dans le déni. On peut leur annoncer qu’il y aura une procédure dis- ciplinaire avec une sanction qui sera déterminée suivant la gra- vité des faits et le repentir ou non de l’auteur.” Il y a autant de filles que de gar- çons parmi les auteurs de har- cèlement. Le changement d’éta- blissement pour la victime comme pour l’auteur apparaît rarement comme la solution la plus appropriée car elle ne fait que transférer le problème pour l’un et l’autre. “On va plutôt aider les victimes à acquérir les méca- nismes de protection, de confian- ce en soi pour arrêter le proces- sus et le meilleur endroit pour appliquer, c’est là où le mal-être a été diagnostiqué. Les auteurs sont parfois changés de classe et sachant que généralement, ce sont eux les plus en danger. Les études prouvent qu’ils sont plus de risque de tomber dans la délin- quance, l’alcoolisme. On leur pro- pose aussi des entretiens coup de pouce, de l’accompagnement de manière bienveillante.” Ne pas traiter le mal par le mal. n F.C.

L e harcèlement affecte en priorité le collège où, selon les études nationales et interna- tionales, 10 % des élèves en seraient victimes.Tout l’enjeu étant de réduire ce taux en sachant que même dans les pays les plus en avance sur cet- te question, il est impossible de réduire le harcèlement à néant. “Au lycée, le taux est moins éle- vé, de l’ordre de 5%, car les élèves

sont plus mûrs. Inversement, les situations sont moins visibles” , confieAntoine Neves, proviseur au lycée Xavier-Marmier. À chaque rentrée au lycée Xavier- Marmier, des rencontres sont organisées avec toutes les classes pour les informer des règles de vie à respecter au quotidien dans l’établissement. “Sur le plan des attentes comportementales, on leur rappelle qu’on ne tolère aucu- ne interaction négative comme

le harcèlement. Tous les élèves sont avertis et surtout les vic- times. On sait que le harcèlement se nourrit du silence et que le meilleur moyen de l’enrayer, c’est d’en parler. C’est primordial de leur faire savoir que nous, les adultes sont là pour les écouter. Dans ces conditions, le proces- sus de libération de la parole s’enclenche.” Une enquête sur le climat scolaire est menée à la fin du premier trimestre. On

Autant de filles que de garçons.

réunit tous les 15 jours pour fai- re le point sur les situations sen- sibles et décider ensuite de la nécessité d’engager un proces- sus d’accompagnement. “On a aussi des élèves enmal-être chro- nique dont les causes n’ont aucun lien avec le lycée et qui sont sui- vi par Rés’ado.” Les lycéens d’aujourd’hui sont- ils plus exposés au harcèlement qu’avant ? Subissent-ils plus de pression scolaire et sociale ? Pas sûr, estime le proviseur. “Entre 16 et 18 ans, on est dans une tranche d’âge qui a toujours été sujette à l’anxiété. On s’interro- ge forcément sur son avenir. Je ne suis pas sûr que Parcours Sup amplifie l’angoisse. Bien au contraire ce dispositif, à mon sens, structure mieux les choix d’orientation. Je ne pense pas qu’il y ait plus de pression sco- laire aujourd’hui. Le stress est inhérent à toutes les générations de lycéens.” Quand une situation de mal- être est avérée, la prise en char-

Le proviseur du lycée Xavier-Marmier Antoine Neves (photo archive L.P.P.).

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