La Presse Pontissalienne 231 - Janvier 2019

le Dossier

La Presse Pontissalienne n°231 - Janvier 2019

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Qu’il soit public ou privé, en ville ou à la campagne, aucun établissement scolaire collège ou lycée n’est épargné par ce mal pernicieux vieux comme le monde et qui trouve un nouveau levier de propagation à travers les réseaux sociaux. L’occasion de revenir sur le dispositif de prévention mis en place à Pontarlier par le biais de l’observatoire de la sécurité dont plus personne aujourd’hui ne conteste l’intérêt. Si la meilleure façon de lutter contre le harcèlement, c’est d’en parler, le plus sûr moyen d’en limiter l’impact, c’est de le faire rapidement et le mieux possible grâce à la mobilisation collective. le Haut-Doubs contre-attaque Harcèlement :

Harcelé, harceleur et témoin l Prévention Théâtre-forum Depuis plusieurs années, les élèves en classe de 5 ème participent au spectacle “Bonnet Man” qui présente tous les rouages du mécanisme de harcèlement. Débat.

L e pauvre Simon qui doit se protéger les oreilles avec un bonnet devient peu à peu la tête deTurc de Fred qui le traite de “Bonnet man” et n’en finit pas de l’em- bêter à l’arrêt de bus, au C.D.I. ou à la sortie des cours devant

Julie qui assiste sans réagir à cette lente descente aux enfers d’un Simon qui finira par explo- ser. Très vite, le public est cap- tif. “Juste en les observant, on arrive presque à discerner les victimes ou les harceleurs poten- tiels” , explique l’un des trois réfé-

rents scolaires du Groupe de Soutien de Proximité du com- missariat de Pontarlier, toujours présents lors de ces séances.Tout comme les représentants du ser- vice de prévention spécialisée et de Rés’Ado qui viennent se présenter, se faire connaître. À la fin du spectacle, Karine Grosjean de la compagnie des Chimères anime le débat, pro- posant aux enfants de venir prendre la place d’un des trois comédiens au moment oppor- tun. Le spectacle reprend. “Stop” , annonce l’animatrice quand une élève manifeste son envie de venir prendre la place de Julie qu’elle estime trop timorée et ne se gêne pas alors de signaler à Fred son comportement inap- proprié. “Au début de la scène, on n’est pas encore dans le har- cèlement car c’est la première fois que Fred embête Simon” , glisse Karine Grosjean en met- tant le doigt sur le caractère répétitif du harcèlement. Détail anodinmais primordial dans un exercice pédagogique où tout a été réfléchi et pesé pour que les élèves se posent les bonnes ques- tions.

Après le spectacle, Karine Grosjean de la Compagnie des Chimères anime le débat avec les collégiens. L’objectif du théâtre forum est de trouver une solution pour mettre un terme à cette situation de harcèlement en milieu scolaire.

l Nombre de harcèlements dans l’académie de Besançon : 118 (en 2015-2016) et 160 (en 2016-2017). 133 signalements annuels (en 2017-2018) à l’école, en collège et lycée, tous types de harcè- lement confondus (physique, moral, verbal, cyber). l Le harcèlement touche environ un enfant sur dix en primai- re et au collèg e et peut aller du vol de goûter, ou des moqueries aux insultes, brimades ou menaces jusqu’aux coups, au racket ou aux violences sexuelles. l Ce phénomène de harcèlement entre élèves s’amplifie , en se poursuivant en dehors des établissements scolaires, avec l’utilisa- tion permanente des nouvelles technologies de communication. l Le cyber-harcèlement peut prendre la forme d’insultes et de moqueries, mais aussi de propagation de rumeurs, de publication de photos ou de vidéos de la victime en mauvaise posture, de pira- tage de comptes et d’usurpation d’identité… l En France, 40 % des élèves disent avoir été victimes d’une agression ou méchanceté en ligne . l Ces violences ont des conséquences graves en termes de santé mentale des enfants (perte de confiance, troubles psycholo- giques, dépression voire suicide) et de décrochage scolaire.

Deuxième stop. C’est Leila qui prend alors la place de Simon la victime. Pas question de se laisser intimider par Fred, la jeune actrice sans le savoir met le doigt sur un sentiment incon- tournable dans toute situation de harcèlement : la peur. “Simon est timide et il a peur de Fred. Il faut donc trouver le moyen de dépasser cette peur. Comment ? Peut-on l’aider ?” suggère Kari- ne Grosjean en montrant qu’il est difficile pour une victime de s’en sortir seule. Le troisième lycéen endosse lui aussi le rôle de la victime en tenant tête physiquement au harceleur. On n’est pas loin de la bagarre. “Stop, annonce le policier du Groupe de Soutien

de Proximité. Il y a de la vio- lence, c’est puni par la loi. A-t- on le droit en France de se faire justice soi-même ? On n’est pas dans le cas de la légitime défen- se. La violence entraîne la vio- lence, c’est l’escalade.” Message compris. Sans aucune gêne, les collégiens se prennent au jeu. Ils sont par- fois deux sur scène toujours face au harceleur. Une stratégie de défense collective se développe. “Achète-toi une vie” , lance Nolan à l’attention du méchant Fred qui se met petit à petit tout le monde à dos.À se demander qui devient la victime. Pour autant, il continue à embêter le pauvre Simon allant même jusqu’à fai- re un selfie. “Stop ! , poursuit de

nouveau le policier pour évoquer la question du droit à l’image. On a tout à fait le droit de prendre des photos mais pas le droit de diffuser des images sans l’accord des personnes.” Peu à peu, les solutions se font jour. Le policier décidément très actif revient sur la notion de balance. “Quand on dénonce des faits injustes, on est une balan- ce ? Une poucave comme on dit aujourd’hui ? Non bien au contraire, c’est un devoir de citoyen de dire les choses” , explique l’agent de la paix en mettant le doigt sur le rôle des témoins toujours présents dans les situations de harcèlement en milieu scolaire. n F.C.

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