La Presse Pontissalienne 227 - Septembre 2018

La Presse Pontissalienne n° 227 - Septembre 2018 7

Zoom “Rien n’est irréversible”

L.P.P. : Dans quel but ? J.-N.R. : Il s’agit de travaux ponctuels et réversibles sur lesquels on peut tout à fait revenir et absolument pas de bouchage de failles. Ces inter- ventions évitent que l’intégralité du débit à l’étiage parte dans ces failles. L.P.P. : Quels aménagements pourraient être réalisés ? J.-N.R. : C’est l’objet même de l’étude qui nous dira ce qu’il faut faire. Il s’agira sans doute d’intervenir sur lamorphologie du lit qui semble beau- coup trop large en période d’étiage. L.P.P. : Les travaux sur le Drugeon ont por- té leurs fruits ? J.-N.R. : Oui, la situation s’est beau- coup améliorée. Ce n’est pas parfait bien sûr mais cela montre aussi que rien n’est irréversible. n Propos recueillis par F.C.

L a Presse Pontissalienne : Comment expli- quer ces pertes ? Jean-Noël Resch : Ce phénomène n’est pas nouveau. Les dernières crues ont modifié les mouvements hydrolo- giques de la rivière et aujourd’hui l’impact est très fort avec de grosses mortalités piscicoles. On ne connaît pas encore avec précision l’origine de ces pertes : certaines sont natu- relles mais il peut aussi y avoir des causes anthropiques liées à l’urba- nisation, à la rectification des cours. Ce sera l’une des objectifs de l’étu- Cinq questions à Jean-Noël Resch, hydrogéologue au S.M.M.A.H.D.

de de discerner la part naturelle et humaine. L.P.P. : Cette étude qui arrive à point nom- mé ! J.-N.R. : Effectivement. Il faut savoir que le S.M.M.A.H.D. travaille depuis 18 mois sur cette étude hydromor- phologique qui prendra forcément en compte ce phénomène. Elle se concentre de la confluence du Dru- geon vers Arçon à la sortie du défi- lé d’Entreroches. Le bureau d’études n’a pas encore été retenu. On sait que les résultats ne seront pas connus avant deux ans. C’est pourquoi le S.M.M.A.H.D. a proposé ces inter- ventions d’urgence.

l Travaux Le problème des pertes “Une solution d’attente qui ne règle rien !” Pour le collectif S.O.S. Loue et rivières comtoises, il faut connaître le devenir des eaux perdues avant de travailler dans le lit de la rivière. L’effet pourrait même être contre-productif.

Plus une goutte d’eau à Entreroches.

À l’inverse de l’eau, beaucoup d’encre a coulé sur l’assèche- ment du Doubs entre Arçon et le défilé d’Entreroches, soit près de 15 km. Les pertes se situent à Maisons-du-Bois, juste en amont du barrage à l’entrée du village. On est plus de 5 kilomètres en aval des pertes d’Arçon qui alimentent pour partie les sources de la Loue. Le collectif S.O.S. Loue et rivières comtoises apporte son analyse. Il a mobilisé un géologue et un spéléologue qui ont déjà parcouru une infime partie du réseau souterrain au niveau du défilé d’Entreroches pour tenter d’identifier les raisons du pro- blème. Premier point : “Les pertes à l’origine de la disparition du Doubs ne sont pas les mêmes que celles anciennes et bien connues qui alimentent pour une petite partie la source de la Loue. Les pertes actuelles de Maisons-du-Bois ne sont que la partie émergée de l’iceberg : tout le linéaire du Doubs de Pontarlier aux Brenets est concerné par des pertes significatives” indiqueYannHenry, pour l’association. Pour l’association, il est important de savoir où se dirige cette

eau sans quoi les travaux entrepris ne serviront à rien. “Ils pourraient même avoir l’effet inverse : c’est-à-dire que l’on conduise l’eau dans des fonds perdus” indique l’association qui rappelle qu’un spéléologue professionnel a pu des- cendre jusqu’à 80mètres de profondeur au niveau d’Entreroches. Quant au pro- jet de création d’un canal pour un coût estimé à 20 millions d’euros dans l’an- cien lit du Doubs (des études vont avoir lieu), “il faut s’assurer de son efficaci- té et ne pas être confronté à d’autres pertes à proximité car toute la zone depuis Pontarlier est poreuse” poursuit le collectif. Ces pertes ne doivent pas faire oublier l’état catastrophique du Doubs à cet endroit puisque la rivière était orphe- line de truites en raison d’une eau trop chaude. Un inventaire piscicole mené par la fédération de pêche du Doubs en octobre 2015 avait conduit à compta- biliser une seule truite sur 170 mètres de linéaire ! Faudra-t-il s’habituer à l’avenir que le Doubs disparaisse à cer- tains pour réapparaître plus loin com- me c’est le cas de l’Ain ? n

Le Doubs s’est transformé le mois dernier en nouveau sentier de randonnée.

Renseignements : www.soslrc.com

la rivière et la zone de perte. “Le mon- tant des travaux s’élève à 6 348 euros T.T.C. Il s’agit d’équipements réversibles qui peuvent être retirés à tout moment.” Habituellement, les pertes étaient com- pensées par l’augmentation du débit de la rivière provoqué en ouvrant les vannes du barrage du lac Saint-Point. L’essai s’est vite avéré infructueux. Les vannes ont été refermées pour préserver le niveau du lac et par là même le captage d’eau de Chaon qui permet d’alimenter les vil- lages environnants et une partie de Pon- tarlier en période d’étiage. Or, ce barra- ge est en très mauvais état. L’occasion

d’en remettre une couche pour Philippe Alpy qui appelle l’État propriétaire de l’ouvrage à entreprendre les travaux nécessaires à sa réfection. “On doit d’abord agir au niveau du lac qui constitue une réserve d’eau essentielle et vitale pour l’alimentation en eau potable, la biodi- versité et à un degré moindre les activi- tés nautiques. On a besoin d’avoir un barrage dynamique.” Et Gérard Rognon d’ajouter : “La ressource en eau n’est pas seulement la préoccupation des pêcheurs ou des défenseurs de la biodiversité, c’est l’affaire de tous. Elle implique une approche globale” note l’élu encore indi-

gné des comportements de certains habi- tants qui gaspillent de l’eau en période de restriction. Important aussi, le lancement en sep- tembre d’une étude hydromorphologique sur la rivière. “Au vu des résultats, on sera peut-être amené à travailler sur le lit du Doubs qui semble trop large par endroits, ce qui augmente les risques de pertes” , souligne Philippe Alpy. Parallè- lement à cette étude, des études de colo- ration sur les pertes pour essayer de mieux comprendre les circulations d’eaux souterraines. n F.C.

Assec d’un canyon au niveau de Remonot (photo F. Feret).

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