La Presse Pontissalienne 214 - Août 2017

DOSSIER LE DOSSIER

La Presse Pontissalienne n° 214 - Août 2017

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Deux pêcheurs professionnels tendent les filets l Lac de Joux Féra, perches, brochets, au filet Perché à 1 004 mètres d’altitude, le lac de Joux en Suisse voisine abrite encore deux pêcheurs professionnels. Rencontre avec l’un d’eux qui capture corégones, perches et brochets, livrés ensuite aux restaurants du secteur.

C ematin-là, sur la rive gauche du lac de Joux, les premiers rayons du soleil dévoilent les contours des berges et des sapins. L’eau est calme. Sur cette mer d’huile, une belle jour- née d’été s’annonce même si l’air, à 5 heures du matin, dépasse à peine les 7 °C pour une eau à 22 °C en surface, 4 °C en dessous de 10 mètres de pro- fondeur. “Une journée comme celle-là compense les semaines dans le froid et la bise” lance amuséYves Meylan, pan- talon ciré jaune et bottes de marin. Cet habitant du Sentier est pêcheur professionnel. Tous les jours de l’an- née (même quand le lac est gelé), il remonte ses filets ou ses nasses pour capturer féras, perches et brochets. Il a embrassé cette profession au début des années 2000, un peu par hasard après qu’un “vieux” pêcheur profes- sionnel du lac l’ait incité à reprendre l’activité. Yves - alias Ria - s’est formé

durant trois mois. Sur le lac de Joux (9,5 km 2 ) situé à 14 km de Mouthe et autant de Vallor- be, ils sont deux à vivre de cette acti- vité réglementée par le canton via une concession de pêche. Le poisson prisé, c’est bien évidemment le corégone appe- lé ici “féra”mais surtout la perche pour ses filets vendus 60 francs suisses du kg, 33 francs suisses pour le corégone. “On n’oublie pas le brochet que prépa-

Yves Meylan, pêcheur profes- sionnel sur le lac de Joux, de retour de pêche.

re très bien notre chef. Il le rôtit au four en l’accompa- gnant d’une sauce citronnée” commen- te la serveuse de l’hôtel-restaurant Le Bellevue, au Rocheray, dont la terrasse donne sur l’étendue l’eau. L’établissement s’est spécialisé dans la

Une journée “correcte”

à défaut d’être exceptionnelle.

Les filets sont remontés. Ici, une perche capturée.

préparation de poissons frais comme de nombreux autres. Le lac de Joux ne produit pas assez : une partie des filets de perche sont importés puisque “6 mil- lions de kg de filets de perche sont consommés chaque année en Suisse. Et nous, pêcheurs professionnels suisses, nous en fournissons seulement 10 %. Il faut forcément en chercher ailleurs” témoigne Yves Meylan qui est à la tâche depuis 4 heures du matin pour fournir les établissements… Dans sa barque propulsée par un moteur de 30 C.V., le professionnel nous conduit au milieu du lac. Pre- mière mission : remonter les filets posés la veille. Placés entre 11 et 14 mètres de profondeur, ils ramèneront environ 10 kg de féra. Une pêche correcte, sans être miraculeuse. “On retrouve des pois- sons après des années difficiles. Il y a eu une chute de population de féras mais ils se sont bien reproduits” com- mente-t-il. À l’image du lac de Saint- Point, le lac de Joux a des problèmes d’oxygénation dans ses couches pro- fondes (en dessous de 20 mètres). Pro- lifère également le “sang des Bour- guignons”, une algue rouge qui a bien failli étouffer le lac. La faute selon cer- tains à un débit de la rivière qui tra- verse le lac bien trop faible. Joux est dépendant du lac des Rousses, qui selon les Suisses, ne redonne pas assez de débit. À 6 heures du matin, une fois les coré- gones préparés dans sa cabane de pêche, Yves remonte à bord de son embarca- tion pour cette fois sortir de l’eau les perches qui se sont prises dans les mailles du filet. Quelques bancs se sont pris au piège. “On sélectionne : les plus petits passent entre les mailles pour se reproduire” témoigne le spécialiste. Dans 8 mètres de profondeur, une nas- se a capturé deux brochets. Bref, une journée “correcte” à défaut d’être excep-

Les nasses sont utilisées pour capturer les brochets.

Les goélands se pressent pour récupérer

tionnelle. La cohabitation avec les autres pêcheurs est “bonne” bien qu’il entre directement en concurrence avec eux. De retour sur son ponton, le disciple de Saint-Pierre a encore 3 heures de travail entre le démêlage des lignes, la préparation des poissons, la livrai- son. Un travail authentique, dans les règles de l’art, fait par un passionné. Une tâche scrutée de près par le fils d’Yves, en vacances ce jour-là, venu lui prêter main-forte. Le lac de Joux est une histoire de famil- le. Un endroit également romantique avec ses quais situés au village du Pont. Un petit air de Croisette. n E.Ch.

les petits poissons.

Il faut ensuite démêler.

Lac de Joux, après Vallorbe, direction “vallée de Joux” en Suisse, à 45 minutes de Pontarlier

Dans la cabane de pêche, les filets de corégone vont être levés.

Des filets de féra.

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