La Presse Pontissalienne 214 - Août 2017

PONTARLIER

La Presse Pontissalienne n° 214 - Août 2017

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EXPOSITION

Jusqu’au 5 novembre

“Hep garçon, une Pernod Fils !” Le musée de Pontarlier présente, documents à l’appui, l’histoire de la première distillerie pontissalienne, celle de l’entreprise Pernod Fils qui contribua largement au rayonnement de l’absinthe dans le monde entier. Retour en images sur une vraie saga industrielle.

P lus d’un siècle après l’incendie de 1901 qui fut à l’origine de la plus sulfureuse et involontaire coloration hydrologique de l’his- toire, mettant en évidence, faut-il enco- re le rappeler, les circulations entre le Doubs et la source de la Loue, le sujet alimente toujours les conversations.À croire qu’on ne se lasse pas d’évoquer encore et encore ce qui fut sans doute, bien avant l’affaire Léonarda, le plus célèbre fait divers du XX ème siècle à Pontarlier. “Cela fait longtemps qu’il n’y a pas eu de grosse exposition autour de l’absinthe. Cette année, avec la fête de l’absinthe en juillet et les Absin- thiades en octobre, on a jugé opportun de préparer cette exposition d’autant plus que l’on aborde rarement l’histoi- re industrielle de Pontarlier” , justifie LaurèneMansuy, la directrice dumusée de Pontarlier. Évoquer la maison Pernod Fils, c’est relater une aventure industrielle qui s’étale de l’arrivée d’Henri-Louis Per- nod en 1805 jusqu’à l’interdiction de l’absinthe en 1915. “Cela représente un an et demi de préparation. On a très peu d’objets et beaucoup de documents écrits” , poursuit Marie Galvez, char- gée des collections au musée qui a par-

ticipé activement à l’exposition Pernod Fils. Si Pontarlier fut la capitale mondiale de l’absinthe, elle le doit surtout à sa proximité avec la Suisse. Originaire de Couvet, Henri-Louis Pernod fut le pre- mier à franchir la frontière pour évi- ter les droits de douane élevés que le fisc de Napoléon I er prélève sur les alcools importés. De cette époque, il ne reste pratiquement rien. Installée dans la Grande rue, la première distillerie produit 16 litres d’absinthe par jour. Pas encore la prospérité qui sera impul- sée par ses petits-fils Louis Alfred et Fritz Pernod qui reprendront la dis- tillerie familiale en 1855.Après quelques années de production dans l’ancien cou-

“Cette exposition représente 18 mois de préparation”, souligne Marie Galvez, chargée de collections du musée, qui pose devant la maquette de l’usine Pernod Fils de 1896.

EN BREF

vent desAugustins, ils finis- sent par racheter en 1876 un terrain au bord duDoubs pour y construire une usi- ne à la pointe de la tech- nologie. Le site marque le début de la production industrielle de l’absinthe. Desserte fer- roviaire dans toute l’usine, souci d’automatisation des tâches, force motrice du Doubs complétée par des

Croix Rouge Le 5 juillet, les facteurs de Pontarlier ont remis un chèque au profit de la Croix Rouge suite à la vente des timbres Croix Rouge sortis cette année. Depuis le 9 mai dernier, les 70 facteurs du secteur de Pontarlier s’étaient mobilisés aux côtés de La Croix Rouge en proposant à la vente des carnets de timbres Croix Rouge dont 2 euros par carnet sont reversés à l’organisme. Ils ont vendu 528 carnets sur le secteur de Pontarlier. Grâce à la générosité des habitants de Pontarlier, ce sont 1 056 repas ou 3 168 couvertures de survie ou l’équivalent de 528 journées de nourriture pour bébé qui pourront être proposés aux plus démunis par la Croix Rouge. Travaux Travaux de renouvellement du réseau d’eau potable (rues Jeanne d’Arc, du Canal et impasse Bourgon) à Pontarlier dans le cadre du programme d’amélioration du réseau de distribution d’eau potable. Ces interventions consistent à renouveler la conduite principale, ainsi que les branchements en plomb qui subsistent. Ces travaux devraient durer jusqu’à mi- août. Pour toute question magazine Esprit Comtois est en kiosque. Dans les pages de ce nouveau numéro, un portfolio sur ces petits coins de paradis qui font rêver, avec des clichés comtois évoquant tout sauf la Franche-Comté. Également un dossier qui répertorie des routes emblématiques : route du Comté, route du Vin, route de l’Absinthe… Disponible dans les kiosques francs- comtois, le numéro 9 (été 2017) au prix de 7 euros. sur ces travaux : 06 72 45 56 95. Esprit Comtois Le numéro d’été du

“Casser les idées reçues.”

Vue générale de l’usine en 1896 (éditeur Ledentu, collection particulière).

L’incendie de l’usine Pernod Fils à 3 heures le dimanche 11 août 1901 (collection musée de Pontarlier).

chaudières à vapeur, éclairage élec- trique : tout est conçu pour produire de la Fée verte en grande quantité. Les locaux sont aussi équipés de sonneries électriques et de tubes acoustiques et de sifflets. Ils permettent de trans- mettre les ordres rapidement d’un espa- ce à l’autre. En 1888 à la mort de Fritz Pernod, son frère vend l’entreprise aux banquiers Veil-Picard. La maison Pernod Fils rentre un peu plus dans l’histoire le dimanche 11 août 1901 quand la foudre s’abat sur l’usi- ne. “Le sinistre a duré plusieurs jours. On venait de très loin contempler le brasier” , indique Marie Galvez. 2 mil- lions de litres d’alcool partent en fumée et la Maison Pernod Fils déclare avoir perdu l’équivalent de 2 350 000 francs. Pour autant, la production ne fut jamais suspendue grâce à la solidarité des autres distillateurs. Après l’incendie, l’usine est refaite à neuf en se prémunissant au maximum contre le feu : élimination des maté- riaux combustibles, planchers, plafonds, piliers en béton armé, isolation des caves. La production reprend au cours de l’hiver 1902-1903. Souvent copiée, l’absinthe Pernod Fils se suffisait à elle-même et l’enseigne a concentré sa stratégie publicitaire sur la diffusion de la célèbre chromolithographie de Charles Maire.

L’exposition s’attarde sur la person- nalité d’Arthur Borel, figuremarquante de l’entreprise Pernod Fils qu’il diri- gea pendant 34 ans de 1876 à 1910. Un directeur particulièrement phi- lanthrope qui agissait pour le bien de ses ouvriers et de ses concitoyens. Exemple, à l’occasion de nouvel an 1914, il offre cinq francs à chaque ouvrier. Cette somme est complétée de 5 francs supplémentaires pour chaque enfant de la famille. Les femmes percevaient alors un salaire horaire de 20 centimes alors que les hommes touchaient 10 centimes de plus. Arthur Borel offrit aussi 25 000 francs à la Ville pour la construction des bains-douches. Des centaines de personnes assisteront à ses obsèques le 18 juin 1934. À la déclaration de guerre le 3 août 1904, lesVeil-Picard décident de mettre les locaux de Pernod Fils à disposition de l’hôpital. L’ambulance 107 est née. 132 lits sont installés dans les ateliers. Tout le personnel, soit 475 salariés, s’active à cette étrange et nécessaire mutation. Les premiers blessés de guer- re arrivent le 25 septembre. La loi du 16 mars 1915 marque l’arrêt définitif du fonctionnement de la distillerie Per- nod Fils. La marque ne disparaît pas pour autant et développe une gamme d’anisés Pernod. n F.C.

Après l’incendie, l’usine est reconstruite et la production reprend fin 1902. Vue sur un chantier d’embou- teillage (collection musée de Pontarlier).

L’absinthe Pernod fils s’exporte dans le monde entier comme en témoignent ces

caisses pour l’expédition (collection particulière).

Arthur Borel ici avec trois de ses enfants dirigea l’entreprise de 1876 à 1910.

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