La Presse Pontissalienne 212 - Juin 2017

LES COMPTES DE L’HÔPITAL NE SONT PAS BONS La Presse Pontissalienne n° 212 - Juin 2017 L’ÉVÉNEMENT

Patient à la santé précaire, le Centre hospitalier intercommunal de Haute Comté (C.H.I.H.C.) traverse à nouveau une passe difficile marquée par des difficultés financières qui ne lui sont guère imputables mais sont la conséquence d’une politique nationale de dotation moins favorable aux petits établissements comme celui de Pontarlier. Une fragilité amplifiée aussi par la gestion beaucoup plus comptable de la santé où il faut soigner vite sans se soucier des conséquences sur l’activité des services, la qualité de soins et les conditions de travail. Diagnostic. Un trou de 5 millions d’euros en 2017 L’hôpital intercommunal saigné à blanc l Budget

Échaudé par la pression financière imposée par les autorités de tutelle, le conseil de surveillance du Centre hospitalier intercommunal de Haute-Comté (C.H.I.H.C.) monte au créneau pour dénoncer les nouvelles règles de dotation en vigueur depuis 2015 et qui fragilisent les établissements comme celui de Pontarlier pourtant en progression d’activité.

A lors qu’on arrive au bout de la restructuration immo- bilière et technique de l’hô- pital de Pontarlier, alors que la fusion et la mutua- lisation ont permis de remettre à neuf les établissements satellites de Levier, Mouthe et Nozeroy, rien ne laisse espé- rer un avenir radieux au C.H.I.H.C. “Jusqu’à présent, on a pu garder des sites opérationnels sur le Haut-Doubs. Il y a eu de gros efforts financiers. Aujourd’hui, ce qui ne va plus, c’est le mode de calcul qui remet en question l’équation économique des hôpitaux”, explique Patrick Genre en précisant qu’il s’exprime en tant que représen- tant du conseil de surveillance du C.H.I.H.C., dans le cadre d’une démarche collective qui vise à inter- peller les autorités de tutelle. Le président du C.H.I.H.C. pointe du doigt la fameuse tarification à l’acte ou T2A. Mise en place en 2015 dans le cadre de la loi “Hôpital Santé Patients et Territoires”, cette tarification pri- vilégie de manière mécanique les gros établissements et dégrade l’économie des autres. “Certains actes techniques sont mieux valorisés. La gériatrie est très mal dotée en T2A alors qu’elle implique une prise en charge lourde et complexe.Autre exemple pour une appen- dicite, l’établissement touchera lamême dotation que le patient reste hospita- lisé 2 ou 10 jours. Tout est fait pour limiter le temps passé à l’hôpital. La T2A partait d’une logique économique

intéressante mais on a l’impression que la machine s’emballe”, décrypte le docteur Jean-Michel Guyon, l’un des trois représentants de la Commission Médicale d’Établissement au sein du conseil de surveillance. Travailler plus pour gagner moins… En 2016, le C.H.I.H.C. a augmenté son activité de 2,43 %. La plupart des ser- vices sont en progression, notamment l’unité de jour : + 22,08 %, la médeci- ne : + 3,12 %, la chimiothérapie : + 3,96 %, la chirurgie : + 0,88 %. Cer- tains sont en baisse comme la psy- chiatrie en net recul de 11 % qui s’ex- plique surtout par la difficulté à trouver des praticiens dans cette spécialité. “Beaucoup de secteurs progressent mais, au final, les recettes sont en baisse de 500 000 euros. Chercher l’erreur…” souligne Patrick Genre. Autre sujet de discorde qui vient alour-

qui soit pérennisée. C’est loin d’être le cas puisque l’an dernier, on a touché seulement 1 million d’euros.” Le C.H.I.H.C. qui était presque par- venu à sortir la tête de l’eau sur le plan du fonctionnement est finalement contraint de présenter un budget pré- visionnel en déficit de 5 millions d’eu- ros en 2017. De quoi justifier de la part de l’A.R.S. un nouveau Plan de Retour à l’Équilibre Financier. “Où va-t-on trouver une telle somme ? Je ne sou- haite pas que le C.H.I.H.C. se retrou- ve dans la situation des établissements du sud Jura avec plusieurs millions de déficit sur le dos.” Syndicats, repré- sentants du corps médical, tous sont unanimes pour dénoncer la situation et tirer la sonnette d’alarme. D’autant plus que l’A.R.S. a diminué de 400 000 euros sa contribution au finan- cement du S.M.U.R. de Pontarlier. Jusqu’à présent, l’hôpital compense pour maintenir l’intégralité des deux lignes S.M.U.R. Jusqu’à quand ? “Ce n’est pas au directeur de prendre cet- te décision de fermer une des deux lignes. Il faut que l’A.R.S. assume.” Même topo pour la permanence de soins en établissement de santé qui fait aussi l’objet d’une réduction de dotations. Dans ces circonstances, le bien-fondé du Groupement Hospita- lier de Territoire (G.H.T.) est remis en cause. “Cela peut être la plus belle des opportunités ou le début de la fin. Aujourd’hui, on a tendance à vouloir donner au G.H.T. des pouvoirs alors

“On ne veut absolument pas une dégradation de soins sur le territoire de santé”, indique Marie-Céline Barnoux, pharmacienne à l’hôpital et présidente de la commission médicale d’établisse- ment.

dir la facture : les pertes de recettes liées à la fin du droit d’option des tra- vailleurs frontaliers. Pour le C.H.I.H.C., cela repré- sente aujourd’hui 3 mil- lions d’euros par an.Tous les établissements situés dans des régions fronta- lières sont touchés : Besançon perd par exemple 5 à 6 millions d’euros. “Comme on subit une décision externe, on avait demandé une com- pensation équivalente et

pessimiste. “On peut se demander quel serait l’impact d’une diminution de l’enveloppe budgétaire sur la qualité de soins. On ne veut absolument pas une dégradation des soins sur le ter- ritoire de santé. On a beau être très volontaire, à un moment donné, il n’y aura plus de solution. Que va-t-il se passer ?” Si la commission n’est pas entendue et que tout reste en l’état, Patrick Gen- re n’exclut pas l’éventualité de réagir plus vivement à la rentrée. Sauvons l’hôpital. n F.C.

qu’on n’a rien statué. Il faut qu’on sache où l’on va” , estime Patrick Genre qui craint déjà que les dés soient jetés avant toute concertation. Jean-Marie Saillard le président des Hauts du Doubs qui fait aussi partie du conseil de surveillance du C.H.I.H.C. s’inquiète : “On risque de perdre une offre de soins de proximité. Imaginez les habitants de Chapelle-des-Bois, Les Fourgs contraints d’aller jusqu’à Besan- çon pour se faire soigner.” Marie-Céli- ne Barnoux, pharmacienne à l’hôpital et présidente de la Commission Médi- cale d’Établissement se montre assez

“Où va-t-on trouver une telle somme ?”

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