La Presse Pontissalienne 212 - Juin 2017

FRASNE-LEVIER

La Presse Pontissalienne n° 212 - Juin 2017

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ENVIRONNEMENT Un non-sens écologique Halte aux coupes à blanc en forêt Ce traitement brutal tend à s’amplifier

Zoom Droit de préférence des propriétaires forestiers voisins E n cas de vente d'une propriété classée au cadastre en nature de bois et d’une superficie totale infé- rieure à 4 hectares, les propriétaires d’une parcelle boisée contiguë béné- ficient d’un droit de préférence. La pro- priété visée doit s’entendre de l’en- semble des parcelles vendues, qu’elles forment un bloc d’un seul tenant ou qu’elles soient disjointes. Sous peine de voir la vente annulée, le vendeur est tenu de leur notifier le prix et les conditions de la cession projetée, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, ou par remise contre récépissé. Si le nombre de notifications est égal ou supérieur à 10, le vendeur a la possibilité de s’exonérer de ces notifications individuelles pour procé- der par voie d’affichage en mairie durant un mois et de publication d’un avis dans un journal d’annonces légales. Lorsque plusieurs propriétaires de parcelles contiguës exercent leur droit de préfé- rence, le vendeur choisit librement celui auquel il souhaite céder son bien. n

sur le Haut-Doubs. Un phénomène qui inquiète les défenseurs d’une sylviculture plus harmonieuse et tout aussi rentable dans le temps.

I l suffit de sillonner les routes du Haut-Doubs pour constater la mul- tiplication de ces coupes rases qui non seulement défigurent souvent le cadre paysager mais témoignent aus- si d’une certaine forme d’égoïsme moti-

vée par l’appât du gain immédiat plu- tôt que d’aller dans le sens de l’intérêt général. C’est du moins le sentiment des partisans de la forêt jardinée où l’on privilégie la diversité des essences et la régénération naturelle. “On consta- te que ces coupes rases concernent de plus en plus souvent des jeunes peu- plements. C’est un non-sens économique, environnemental et surtout une perte pour la collectivité” , explique ce fores- tier qui connaît son affaire. S’il com- prend qu’un propriétaire puisse avoir besoin d’argent rapidement, il l’encou- rage volontiers à vendre sa parcelle avec le bois sur pied, sachant qu’il en tirera sensiblement le même profit. Pour lutter contre lemorcellement fores- tier, la législation a défini un droit de préférence aux propriétaires forestiers voisins. Cela concerne des propriétés classées au cadastre en nature de bois et d’une superficie totale inférieure à 4 hectares. “Cette procédure de mise en vente est assez complexe. Trop parfois aux yeux de certains propriétaires qui trouvent plus facile de faire une coupe rase pour aboutir finalement au même profit en s’affranchissant des compli- cations administratives” , explique Michaël Gouttefarde, conseiller foncier forestier à la S.A.F.E.R. Bourgogne-

Très décriée mais toujours d’actualité, la coupe rase est considérée par ses détracteurs comme une aberration écologique, sylvicole et économique.

Franche-Comté. Tous les vendeurs ne sont pas prêts à céder leurs biens à leurs voisins. “Ils ne sont pas les seuls responsables car on peut aussi mettre en cause l’honnê- teté de certains acheteurs qui pressent le propriétaire de vendre sa parcelle car elle risque de faire l’objet d’une attaque de scolytes qui pourrait forte- ment en déprécier sa valeur.” Les uns et les autres oublient alors vite que la forêt, c’est l’école de la patience et qu’on peut tout à fait concilier production et environnement. “En optant pour une coupe brutale, on dit parfois qu’il cou- pe son blé en herbe. Il va aussi se mettre dans des frais de reboisement qu’il aurait pu éviter avec une approche plus sage.” Ce forestier adepte d’un traitement sylvicole plus qualitatif avec éclaircies régulières, conservation des plus belles tiges, régénération naturelle, ne voit

aucun intérêt de couper des résineux faisant moins de 25 cm de diamètre. “À ce stade-là, il sera vendu comme bois de trituration à environ 20 euros par m 3 alors qu’un arbre plus imposant et de bonne conformité peut se vendre deux à trois fois plus cher en bois d’œuvre.” Le danger d’une coupe à blanc réside également dans les conséquences infli- gées aux parcelles voisines qui se retrou- vent d’un seul coup exposées aux coups de vent. Le traitement jardiné n’est pas sans contrainte. Plus de vigilan- ce, des sacrifices, le souci de valoriser le minoritaire. “La rentabilité s’inscrit plus durablement dans le temps. Elle n’est pas que financière mais écolo- gique. Les coupes à blancs se justifient parfois dans des conditions très par- ticulières notamment lors d’attaque de bostryches importantes et avérées où il n’y a plus grand-chose à espérer.” n

Les parcelles voisines subissent les conséquences de la coupe à blanc avec des tiges plus sensibles aux coups de vent.

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