La Presse Pontissalienne 212 - Juin 2017

21 La Presse Pontissalienne n° 212 - Juin 2017

l Annie Genevard

V ème circonscription du Doubs

“Je ne suis pas macron-compatible” Elle qui était pressentie pour être ministre veut rebondir après la défaite de François Fillon et défend sans états d’âme le programme revisité de la droite et du centre. Si elle est réélue députée, loi sur le non-cumul oblige, elle se résoudra à quitter la mairie de Morteau.

coup plus affligée car on était vrai- ment armés d’une volonté et désireux de redonner à la France de la fierté, de la grandeur, de la réussite. Mais on n’a pas le droit de chouiner et de se lamenter sur son sort. Je suis une battante et je suis repartie au combat pour défendre nos idées. L.P.P. : Du coup, une fois François Fillon oublié, Les Républicains ont sérieusement édulcoré le programme. Vous vous y retrouvez enco- re ? A.G. : Le programme de François Fillon n’avait semble-t-il pas séduit certaines catégories comme les classes popu- laires, les jeunes ou la ruralité. Le pro- gramme a été certes infléchi sur cer- tains points mais en aucun cas dénaturé. On a infléchi sur le nombre d’emplois publics supprimés, on a pris l’engagement de baisser de 10 % la fis- calité, d’augmenter les petites pen- sions, de défiscaliser les heures sup- plémentaires, tout en gardant la priorité de baisser la dépense publique, d’aug- menter les forces de police et de gen- darmerie, de baisser la majorité péna- le à 16 ans, de diviser par deux le nombre de nouveaux immigrés, etc. L’A.D.N. du programme est respecté et le programme revisité permet de considérer ceux qui ne le trouvaient pas complètement satisfaisant. L.P.P. : Dans les réformes, prévoyez-vous de détricoter ce qui a été fait en matière de redé- coupage territorial avec la loi N.O.T.R.E. ? A.G. : Je pense que nos territoires sont épuisés par les réformes successives. Il faut rester sur le principe du libre consentement et ne toucher à l’orga- nisation territoriale qu’avec d’infinies précautions après le traumatisme que les élus locaux ont vécu. Je pense qu’il nous faut désormais une période de stabilisation. L.P.P. : Évoquons un sujet plus “Haut-Doubs” avec l’éternel dossier de la R.N. 57. Vous n’avez pas plus réussi que vos prédécesseurs à fai- re avancer les choses ? A.G. : Des crédits d’études ont été déblo- qués, je m’étais engagée à réactiver ce dossier, ce qui a été fait. Il y a trente ans, il y avait les moyens, aucune contrainte, mais il manquait le por- tage politique. Aujourd’hui, il y a le portage politique mais il n’y a plus les moyens et trop de contraintes régle- mentaires. Il faut avoir en tête qu’un contournement de Pontarlier, c’est un demi-milliard d’euros ! Il n’en est plus question. L’option retenue est d’amé- liorer le franchissement de Pontarlier et de fluidifier la circulation. La repri- se de ce dossier n’est pas terminée. L.P.P. : Que plaidez-vous pour faire entendre la voix du Haut-Doubs au national ? A.G. : Pour la route, le ferroviaire, le haut débit, il faut nous faire entendre et pour cela, nous plaidons avec notre programme pour la création d’une agence nationale de la ruralité, à l’ima- ge de ce qu’a été l’A.N.R.U. (agence nationale pour le renouvellement urbain) qui a permis d’investir énor- mément dans la réhabilitation des quartiers. Si cette agence voit le jour, j’entends bien que le Haut-Doubs ait sa part. L.P.P. : Si vous êtes réélue, vous serez confron- tée à la question du non-cumul des mandats avec une loi qui entre en vigueur cet autom- ne. Que choisirez-vous entre votre mandat de députée et la mairie de Morteau ? A.G. : Après mûre réflexion, je me suis préparée à l’hypothèse, si je suis réélue, de devoir passer le flambeau à Mor- teau. Et si je devais le faire, je veille- rai à ce que les choses soient bien faites. n Propos recueillis par J.-F.H.

L a Presse Pontissalienne : Vous auriez pu craindre une candidature En Marche qui menace votre réélection. Est-ce le cas ? Annie Genevard : Je prends ce qui vient, comme je l’ai fait il y a cinq ans, en allant à la rencontre des habitants, avec mes convictions et sans m’occu- per de qui sont mes concurrents. J’avais soutenu Sylvie Le Hir à l’occasion des élections départementales. Elle m’a fait part plus récemment de ses états d’âme vis-à-vis de François Fillon. Je pense que c’est quelqu’un qui se cherche politiquement. L.P.P. : Ne craignez-vous pas d’être victime du “dégagisme” ambiant ? A.G. : Je ne me suis pas posé cette ques- tion. Tout le monde me concède que j’ai beaucoup travaillé depuis cinq ans sur cette circonscription et je crois à cette légitimité du travail et de l’en- gagement. Et sur le plan local, je pen- se que l’équation personnelle joue beau- coup. À mon sens, il y aura sans doute une dynamique Macron mais pas au point d’appliquer le pourcentageMacron national au niveau de ces législatives. L.P.P. : La réussite d’Emmanuel Macron et le bouleversement du paysage politique qu’il a provoqué vous interpellent-ils ? A.G. : On a assisté à une élection aty- pique à tous points de vue, fruit de cir- constances particulières. D’abord le contexte politico-judiciaire et la pous- sée du Front National au second tour. La philosophie d’Emmanuel Macron de dire que les partis sont morts ain- si que le clivage gauche-droite a ses limites. Je sens bien aussi que les par- tis sont dans l’œil du cyclone mais je crois que les courants de pensée de la droite et de la gauche demeureront. Il est d’ailleurs dangereux de vouloir les effacer car c’est la structure même de notre démocratie depuis toujours. Si un jour les gens venaient à s’écarter d’un parti qui serait devenu unique, ils se tourneront vers les extrêmes.

patible” ? A.G. : Non, car j’appartiens à une famil- le politique à laquelle je suis fidèle. Et je crois que les programmes ne sont pas équivalents. Sur la politique éco- nomique et la réforme du travail, il y a des similitudes, mais pas sur le res- te : la politique fiscale, les questions régaliennes, la culture… L.P.P. : Seriez-vous prête à soutenir des pro- positions de loi de la future majorité Macron ? A.G. : Il faut d’abord aller jusqu’aux législatives sans confusion. Ceux d’entre nous qui acceptent de rejoindre M. Macron créent cette confusion. Ensui- te, j’estime que dans l’intérêt de la France, il faut accepter en effet de tra- vailler avec lui. Pour les législatives, nous disons aux Français : “Ne mettez pas tous vos œufs dans le même panier, équilibrez votre choix.” Et le moment venu, on verra comment on peut tra- vailler ensemble. Si nous ne sommes pas majoritaires, il faut voir comment nos idées peuvent être prises en comp- te. Doit-on rentrer dans une logique de cohabitation ou de coalition ? Ce sont les législatives qui vont le déter- miner. Pour l’instant, nous avons envie de faire valoir notre projet pour la France. L.P.P. : Votre candidat François Fillon a été battu au premier tour et avec cette défaite s’est envolé votre espoir de devenir ministre. Avez-vous fait le deuil de cet- te désillusion ?

La députée sortante défend son bilan l Activité

À l’occasion de sa déclara- tion de candidature le 8 avril dernier,Annie Gene- vard n’a pas manqué de s’appuyer sur le bilan de son pre- mier mandat à l’Assemblée. Certes depuis avril, beaucoup d’eau aura coulé sous les ponts : exit François Fillon, explosion de la droite, mais toujours pour elle la volonté de par- ticiper à “une majorité solide de la droite et du centre capable d’ins- taurer une franche alternance” dit- elle. Pas de rapprochement avec En Marche à l’horizon… Côté bilan, la députée sortante affir- me avoir “beaucoup travaillé en cir- conscription” où elle a participé à “plus de 560 événements” (comices, inaugurations, manifestations…) “ou lors d’entretiens individuels à

ma permanence. J’ai pu contribuer à dénouer des situations qui parais- saient inextricables à ceux qui m’ont sollicitée” affirme-t-elle dans sa déclaration de candidature. Au crédit de ses actions, on peut également citer les dossiers qu’el- le a défendus comme les aides euro- péennes au bénéfice des G.A.E.C., la situation des écoles de montagne, la reconnaissance de l’I.G.P.Absinthe de Pontarlier ou encore la Loi Mon- tagne. Au chapitre des dossiers qui ont, sinon piétiné, mis plus de temps à avancer, on peut penser au chan- tier de la R.N. 57 et des bouchons des frontaliers, à la couverture du territoire en très haut débit ou enco- re à la couverture en téléphonie mobile. n

“Il est dangereux de vouloir effacer les courants de pensée.”

A.G. : Honnêtement, je ne nourris pas plus de regrets que cela.Ma plus grande déception a été de voir que notre candi- dat ne s’est pas qualifié pour le second tour. Je sais que si François Fillon était passé, le fait que je devienne ministre était envisageable, mais je n’en éprouve aujour- d’hui ni amertume ni tristesse. La défaite au premier tour m’a beau-

Annie Genevard a compté : elle a assisté à 560 manifestations différentes sur le territoire de sa circonscrip- tion.

L.P.P. : Vous n’êtes donc pas “macron-com-

Zoom Son activité parlementaire en chiffres

Annie Genevard : “Dans l’intérêt de la France, il faudra accepter de travailler avec Emmanuel Macron.”

l 1 377 interventions longues dans l’hémicycle l 356 interventions longues en commission l 6 048 amendements cosignés l 380 propositions de loi cosignées l 198 questions écrites l 26 questions orales au gouvernement l 3 rapports d’information, 1 mission parlementaire l Annie Genevard a été classée 35 ème députée la plus influente de l’Assemblée nationale

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