La Presse Pontissalienne 209 - Mars 2017

L’INTERVIEW DU MOIS

La Presse Pontissalienne n° 209 - Mars 2017

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JOUGNE

Michel Morel sort de sa réserve

“On devrait fusionner à l’échelle du Pays du Haut-Doubs” Même s’il n’est plus sur le devant de la scène politique locale, l’ancien maire de Jougne encore élu dans sa commune et délégué communautaire s’intéresse toujours autant au développement du Haut-Doubs en prônant une solidarité territoriale encore plus large pour peser davantage et se faire entendre.

L a Presse Pontissalienne : Que pensez- vous de la fusion entre les commu- nautés de communes Mont d’Or-Deux Lacs et les Haut du Doubs ? Michel Morel : Elle n’est ni bonne, ni mau- vaise sauf qu’elle n’a pas été prise dans le bon sens. L.P.P. : Qu’entendez-vous par bon sens ? M.M. : En impliquant et en écoutant davantage les élus de base. Il faut avoir des projets en commun, créer le besoin. Je suis totalement d’accord avec Gérard Dèque quand il parle de déni de démo- cratie. La quasi-majorité des élus concer- nés se sont prononcés contre, la com- mission départementale de coopération intercommunale a également rejeté le projet mais la loi laisse la possibilité au préfet de “passer outre” ces déci- sions, ce qui me rappelle une certaine époque russe ou cubaine. Je soutiens aussi les communes deMétabief, Laber- gement-Sainte-Marie et Les Fourgs

Doubs rejoindre des intercommunali- tés dans le département du Jura si elles estiment que c’est leur place.Tout comme je pense qu’il faudrait sans dou- te fonctionner collectivement sur un territoire beaucoup plus large. L.P.P. : Vous sous-entendez de fusionner avec d’autres intercommunalités ? M.M. : Il y a quelques années, le projet de rapprochement entre Mont d’Or- Deux Lacs et Pontarlier avait été évo- qué sans aboutir. Aujourd’hui, je pen- se qu’il faudrait aller encore plus loin et fusionner carrément à l’échelle du Pays du Haut-Doubs. Cela permettrait d’avoir plus de moyens pour dévelop- per des projets touristiques et cultu- rels structurants. C’est la même cho- se en termes d’équipements, de services, de maisons de santé. Quand on parle développement du Haut-Doubs, on rai- sonne souvent tourisme mais on doit aussi penser à la qualité de vie de la population résidente. Les anciens élus avaient déjà cet esprit fédérateur alors qu’aujourd’hui certains élus auraient plutôt tendance à avancer dans le recu- lement comme on disait avant. Il y a une quinzaine d’années, j’avais même proposé de faire un office de tourisme de pôle situé sur l’axe de la R.N. 57 pour valoriser tout le potentiel duHaut- Doubs. Le projet impliquait aussi de recruter des professionnels pour aller vendre un peu partout la destination Haut-Doubs. L.P.P. : Puisqu’on parle tourisme, votre point de vue sur l’intérêt de poursuivre la restruc- turation de la station de Métabief notamment avec l’enneigement artificiel du secteur Pique- miette ? M.M. : Je ne dis pas qu’il ne faut pas investir. Dommage qu’on n’ait pas réagi de cette manière 20 ans plus tôt. Je

suis favorable pour assurer le mini- mum vital mais pas de là à vouloir enneiger tout le domaine alpin de la station. Ce serait trop risqué de tout mettre dans la neige. Aujourd’hui, on doit penser à développer des alterna- tives comme une patinoire et profiter davantage de tous les sites touris- tiques : Conifer, château de Joux, lacs, randonnée, Suisse… Pour l’enneige- ment à Piquemiette, je ne suis pas contre mais restons prudents et ne mettons pas la charrue avant les bœufs. Quand il était aux commandes du Département du Doubs, Georges Gruillot soutenait le projet de dévia- tion aux Tavins car il voulait agran- dir le parking au pied des pistes. À quoi bon attirer des skieurs s’ils ne peuvent pas stationner ? Le problème du parking est crucial sur Piquemiet- te. L.P.P. : Et la déviation des Tavins, est-elle encore faisable selon vous ? M.M. : Pour moi, c’est juste une ques- tion de volonté. Au milieu des années quatre-vingt, il passait 150 camions par jour au poste de douane. Aujour- d’hui, on est plus proche de 1 200 camions par jour. Le trafic continue à s’amplifier. Ce projet de déviation avait même été provisionné à hauteur de 35 millions de francs. On aurait pu fai- re mieux pour moins cher. Résultat, rien n’a abouti et l’argent est parti aux Mercureaux. L.P.P. : Vous sentez-vous bourguignon-franc- comtois ? M.M. : Cette grande région, c’est n’im- porte quoi. On n’a pas mesuré toutes les conséquences, notamment sur le plan associatif. À titre personnel et non pas en tant que représentant de Jougne, je suis vice-président d’hon- neur des petites Cités de caractère. Comme on a fusionné avec nos voisins, j’ai été amené à visiter une quaran- taine de communes classées en Bour- gogne. Très instructif d’un point de vue humain mais c’est beaucoup trop grand au niveau des déplacements. Un bénévole du Haut-Doubs réfléchira à deux fois avant de se rendre à une réunion sur Dijon. Il n’y a plus de notion de proximité. Il y aura des soucis à se faire pour atteindre le quorum dans certaines assemblées générales. L.P.P. : Suite à votre défaite aux élections municipales de Jougne, quelle position tenez- vous au sein du conseil où vous faites partie de l’opposition avec deux autres élus de votre liste ? M.M. : Aujourd’hui, je suis redevenu un élu de base. Pour l’anecdote, si j’arri- ve au bout du mandat, j’aurai 43 ans d’ancienneté à Jougne. Je ne suis pas là pour faire de l’opposition systéma-

qui s’opposent au princi- pe de réduire en cours de mandat le nombre d’élus communautaires si la fusion aboutissait. Jougne était également concer- née mais n’a pas donné suite sachant que l’élu qui allait faire les frais de cette réduction, c’était moi, ce qui arrangeait bien des choses pour cer- tains. Je regrette bien sûr que les élus du secteur de Mouthe soient mécon- tents. Ce n’est pas le moment de se diviser, au contraire, c’est important d’être solidaire. Je ne ver- rais pas non plus d’inco- hérences à laisser des communes des Hauts du

“Cette grande région, c’est n’importe- quoi.”

A 71 ans, Michel Morel suit toujours de très près l’évolution du Haut- Doubs pour lequel il prône l’union sacrée. “Pensez au poids politique que représenterait une communauté de communes à l’échelle du Pays du Haut-Doubs ?”

tique. J’essaie de m’impliquer dans les dossiers, j’observe, j’apporte mon expé- rience. L.P.P. : Idem à la com- munauté de com- munes ? M.M. : Je reconnais que je pourrais m’im- pliquer davantage dans l’intercommu- nalité. De ce que je vois, je crains le risque de voir cette structure se politi- ser.

à 16 ans mais mon épouse n’a pas vou- lu que je passe professionnel. Avec le recul, je pense qu’elle avait raison. Aujourd’hui, je suis le plus ancien arbitre de France avec plus de 2 000 combats amateurs et professionnels à mon actif. Je reste toujours vice-pré- sident du club de boxe de Pontarlier qui se porte bien. On a beaucoup de jeunes intéressés. Il y a eu de très beaux champions à Pontarlier. Le noble art, comme on disait, a toujours été un sport exigeant où, pour percer, il faut avoir faim. Ce n’est plus trop d’actua- lité dans notre société. L.P.P. : Vous continuez aussi à défendre les intérêts des travailleurs frontaliers ? M.M. : Oui bien sûr en m’impliquant à l’Amicale des frontaliers. On poursuit le combat judiciaire à Bruxelles en dénonçant la discrimination dont font l’objet les frontaliers au niveau de la Sécu. Leurs cotisations sont basées sur le revenu fiscal de référence et non pas sur les revenus salariaux comme c’est le cas de la majorité des salariés en France. Cette disposition a été mise en place sous prétexte que les fronta- liers sont soumis à un régime spécial. Avec la fin du droit d’option, on a été contraint de fermer une dizaine de bureaux au niveau de la mutuelle la Frontalière. n Propos recueillis par F.C.

“Mon épouse n’a pas voulu que je passe boxeur professionnel.”

L.P.P. : On entend beaucoup de critiques sur le réseau d’assainissement au lac. Les solu- tions mises en place sont-elles les bonnes ? M.M. : La collectivité a fait le choix d’in- vestir notamment dans les bassins de rétention au lieu d’imposer aux com- munes le soin d’obliger les particuliers à se mettre en séparatif. Ce qui est fait aujourd’hui, c’est une moitié de solu- tion. Par leur pouvoir de police, les maires ont la possibilité d’imposer aux habitants de se mettre aux normes. L.P.P. : La boxe reste toujours votre grande passion ? M.M. : Tout à fait. J’ai commencé la boxe

S’il ne se dit pas opposé à l’enneigement artificiel à Piquemiette, “ne mettons pas la charrue avant les bœufs” dit Michel Morel.

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