La Presse Pontissalienne 203 - Septembre 2016

LE DOSSIER

La Presse Pontissalienne n° 203 - Septembre 2016

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LE FRANC SUISSE SAUVE L’ÉCONOMIE DU HAUT-DOUBS

Les derniers chiffres de l’économie suisse

font état d’un alentissement,

notamment dans le secteur de l’horlo- gerie. L’organisation d’une conférence- débat sur “dix ans de coopération statistique transfrontalière” le 7 septembre à Pontarlier est l’occasion de revenir

sur l’évolution des chiffres de l’économie frontalière. Un

phénomène s’est renforcé : le franc suisse fort dope l’économie de ce côté-ci de la frontière…

Et si le Haut-Doubs tirait profit de la situation ? l Crise horlogère Peut-être une opportunité L’horlogerie suisse rencontre des difficultés dont les conséquences peuvent déstabiliser le Haut-Doubs. Néanmoins, dans un contexte instable, la C.C.I. du Doubs estime que c’est le moment pour notre territoire de saisir l’opportunité du franc fort pour développer des secteurs comme le tourisme.

Au début de l’été,

la C.C.I. a présenté à Morteau les résultats de son étude “10 ans d’économie frontalière, observer pour agir.”

L a chambre de commer- ce et de l’industrie du Doubs (C.C.I.) a mis en place en 2007 un dispo- sitif de suivi des effets suisses (D.S.E.S.). Ce service analyse en temps réel la situation du Haut- Doubs frontalier. Les données ainsi collectées permettent d’éva- luer les conséquences à court et moyen terme sur l’économie loca- le, des changements écono- miques, politiques et juridiques en Suisse voisine. En juin, sur la base des obser- vations fournies par le D.S.E.S., la C.C.I. du Doubs a rendu une étude dont le contenu montre l’évolution de l’économie fron- talière sur les dix années (voir illustrations). Par extrapolation, elle a défini différents scénarios qui anticipent l’impact sur notre territoire des variations pos- sibles de la conjoncture suisse. Premier constat : alors que l’hor- logerie qui emploie un fronta- lier sur deux a connu une crois- sance forte jusqu’en 2014, ses rouages se grippent plus sérieu- sement qu’au moment de la cri- se de 2008-2009. En deux ans, le volume des exportations a reculé de 21,7 % !

Une tendance inquiétante qui met en évidence la fragilité du Haut-Doubs dont la santé dépend en grande partie de l’état de l’in- dustrie horlogère. “On observe que le mécanisme asiatique qui tire la croissance de l’horlogerie depuis la dernière crise est rom- pu. Ce marché montre ses pre- miers signes de faiblesse. Les Chinois achètent moins et ils sont plus exigeants. 2016 n’est pas une bonne année. Reste à savoir jusqu’à quand cela va durer” remarque la chambre de com- merce et de l’industrie duDoubs. Selon la Fédération Patronale Horlogère, la valeur des expor- tations vers Hong-Kong s’éle- vait à 375 millions de francs suisses en 2014. Elle est de 175 millions en 2016 ! Le mar- ché américain est lui aussi en recul. Seule l’Europe se main- tient. Selon la C.C.I., d’autres ques- tions émergent dans ce contex- te qui oblige l’horlogerie à se remettre en cause. “Il y a eu beau- coup d’investissements dans l’ou- til de production ces dernières années. Cet outil est toujours là mais il produit trop !” Il serait en surcapacité de 40 % ! Parmi

les autres facteurs qui pèsent sur ce secteur d’activité, “il y a l’arrivée de la montre connectée, une technologie à laquelle les industriels prêtent peu attention pour l’instant. Ajoutons à cela que le port d’une montre n’est pas dans les habitudes des nou- velles générations. Néanmoins, il faut rester confiant. À l’évi- dence, l’horlogerie est à la fin d’un cycle. Mais elle est en capa- cité de rebondir. Elle l’a déjà prouvé” poursuit la C.C.I. Au pire, une défaillance notoire de ce secteur aura des conséquences

que de s’adapter à une situation dont il nemaîtrise pas les tenants et les aboutissants. Néanmoins, la chambre de commerce veut tempérer les effets d’une crise horlogère sur notre territoire en s’appuyant sur des éléments objectifs. Tout d’abord si l’horlogerie tous- se, tous les secteurs de l’écono- mie suisse ne connaissent pas les mêmes difficultés que ce fleu- ron industriel cantonné princi- palement aux Montagnes Neu- châteloises. D’ailleurs, le département de l’économie de la Confédération relève dans sa dernière enquête de conjonctu- re que “l’économie suisse amain- tenant réussi, dans une certai- ne mesure, à surmonter les effets inhibiteurs du franc fort et qu’il est désormais possible d’envisa- ger les perspectives de croissan- ce avec une relative confiance.” Ce service précise encore que “le chômage devrait continuer d’aug- menter légèrement au cours des

taliers. Ce n’est pas tout. “Il faut être pro-actif dans cette situa- tion. À cause du franc fort, la clientèle suisse a encore plus inté- rêt à venir consommer en Fran- ce. Les commerces de la bande frontalière peuvent aller cher- cher plus encore ce potentiel de clients. Les Suisses peuvent com- penser la retenue des consom- mateurs frontaliers qui ont ten- dance à être plus prudents dans leurs achats, conséquence d’un contexte qui les inquiète.” Ce franc fort qui est dévasta- teur pour les commerces helvé- tiques, est une aubaine pour le Haut-Doubs. L’appréciation de la monnaie suisse par rapport à l’euro serait même, selon la C.C.I., une opportunité pour développer d’autres secteurs qui ont été négligés jusqu’à présent tels que le tourisme. Le poten- tiel de cette économie reste à exploiter sur la bande fronta- lière. n T.C.

mois à venir, tandis qu’une repri- se conjoncturelle, l’an prochain, devrait gagner peu à peu le mar- ché du travail. Le groupe d’ex- perts s’attend à un taux de chô- mage annuel moyen de 3,6 % en 2016 et, pour 2017, à son léger recul sur une valeur de 3,5 % en moyenne annuelle.” Bref, la Suisse flirte encore avec le plein-emploi.Un résultat inat- tendu car on pouvait s’attendre à un déraillement de son éco- nomie tournée vers l’exporta- tion, conséquence justement de son franc fort. L’économie hel- vétique a une capacité de rési- lience que la France n’a pas. Elle repose “sur la souplesse et notre marché de l’emploi et sur notre capacité à innover” résumeMat- thieuAubert, de la chambre neu- châteloise de commerce et de l’industrie. Selon la C.C.I., le Haut-Doubs tire profit de ce contexte moné- taire qui, pour commencer, valo- rise la rémunération des fron-

sociales sur notre territoi- re, consécutives à des vagues de licenciements dans les usines de l’autre côté de la frontière. Elle aura éga- lement des effets sur les marchés spéci- fiques tels que celui de l’im- mobilier. Le Haut-Doubs n’a donc pas d’autre choix

“La clientèle suisse a encore plus intérêt à venir consommer.”

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