La Presse Pontissalienne 203 - Septembre 2016

VALDAHON - VERCEL 34

La Presse Pontissalienne n° 203 - Septembre 2016

De La Villedieu, il reste une partie de l’église et le cimetière, à l’abandon.

Au temps de La Villedieu, le sacrifice d’un village VERCEL Histoire Village rayé de la carte pour permettre au camp militaire du Valdahon de s’agrandir, La Villedieu fut en 1926 le premier cas d’expropriation de cette envergure en France. Une “spoliation” qui fit grand bruit. Un pèlerinage se déroule en septembre.

Un des premiers pèlerinages par les anciens.

I ls sont - encore - une poignée d’anciens de “La Villedieu” mais surtout des descendants à venir se recueillir chaque premier dimanche de septembre devant l’église en ruine et sur les tombes de leurs ancêtres abandonnées. Voilà tout ce qu’il reste de La Villedieu, village paisible du plateau situé entre Valdahon et Vercel.Aujourd’hui enfermé dans le camp militai- re du Valdahon, il comptait en 1926 jusqu’à 126 habitants, une école, une mairie, une froma- gerie, des abreuvoirs, des terres fertiles. Bref, un hameau presque comme les autres. Les descen- dants ne veulent pas oublier : “On va fêter ce triste anniver- saire des 90 ans de l’expropria- tion entière du village par l’État.

ment concernés. Trois fermes sont expropriées mais la Pre- mière guerre mondiale stoppe le dessein de l’État. Répit de courte durée pour “lesVilledieu” sommés de quitter leurs terres, leurs biens, leurs racines, le 1 er juin 1926 moyennant une compensation financière très maigre. “Les familles ont dû se disperser un peu partout dans le secteur du plateau ou plus bas dans le département pour retrou- ver des terres. Certaines n’ont reçu l’argent que 36 ans plus tard ! Les sommes étaient très modiques.C’était ni plus ni moins qu’une spoliation de l’État” rela- te André Badot, historien local qui a consacré un ouvrage dont les fonds récoltés sont reversés à l’association.

C’est un devoir de mémoire qui nous tient à cœur car ici repo- sent nos ancêtres” évoque Sébas- tien Sancey-Richard, président des “Amis de La Villedieu” et arrière-petit-fils du dernier mai- re. Ici, jusqu’au 1er juin 1926, la vie était celle d’un bourg “normal”

Même si quelques habitants ont tenté de résister comme le curé de l’époque Louis Huot-Mar- chand, beaucoup se sont rési- gnés comme le rappelle Daniel Barbier, petit-fils du derniermai- re de La Villedieu : “Ils quittè- rent les lieux sans manifestation ni révolte. Le sentiment patrio- tique de l’époque fit écrire à Émi- le Barbier (le grand-père) sur le registre des délibérations muni- cipales ceci :“Une certaine concep- tion de la défense nationale, la préparation militaire, exige que nous quittions nos foyers, nom- breux sont ceux qui viennent de mourir pour une grande cause, d’autres doivent se préparer à se sacrifier à leur tour, notre patrio- tisme, notre civisme, nous impo- se de délaisser nos biens.” Seul un journal national, “L’Impar- tial”, prend alors fait et cause pour les habitants. Les députés et conseillers généraux restent muets face à ce triste sort. Le village est dépecé. Certaines pierres tombales sont utilisées par les militaires pour confec- tionner des abris. La petite cloche de l’église rejoint Valdahon, la grosseVercel. Les habitants des alentours viennent se servir, repartent avec du mobilier. La mort administrative de la com- mune et le partage des biens communaux ne sont signés qu’en 1962 après décision du Conseil d’État ! “Depuis cette date, nous avons récupéré les archives, l’état civil et un bois de 33 hectares” expliqueAlbert Grosperrin,mai-

composé de 126 habitants pour 33 maisons… jusqu’à cette décision de l’État d’expulser tous ses habitants. La raison : l’État dès 1905 décide d’agrandir son camp militaire. Problème : les ter- rains et les mai- sons sont directe-

Indemnisés 36 ans plus tard.

re de Vercel-Villedieu-le-Camp, terminologie rajoutée à Vercel depuis cette “affaire”. L’église tombe en ruine jusqu’à ce que l’association “Les amis de La Villedieu” se mobilise en 1994 avec l’appui des militaires pour refaire le clocher. “Le dôme de l’édifice a été déposé l’an der- nier car il devenait trop dange- reux. L’armée ne joue plus le jeu au niveau de l’entretien. Nous avons demandé une grue (le régi- ment est spécialisé dans le génie) mais cela n’a pas été possible. Nous avons donc déboursé 3 000 euros pour faire venir une grue et déposer le dôme. La pro- chaine étape : la démolition de la tour pour ne garder que le

porche” explique Sébastien San- cey-Richard. L’armée rend toujours possible la procession en ouvrant ses portes aux adhérents de l’asso- ciation en septembre. Voilà 26 ans que ça dure. Ce pèlerinage émouvant rappelle aux souve- nirs des familles Blanchard, Belon, Dodanne, Barbier, Guille- min, Viennet, Frachebois, Frion, Piton, Blondeau… la vie à La Villedieu…Seulement trois vil- lageois contemporains de l’ex- propriation restent en vie : Georges Rodot (102 ans), Mar- cel Marguet (100 ans) et Marie- Aline Blanchard (97 ans). n

E.Ch.

“La Villedieu, l’agonie d’un village franc-comtois du canton de Vercel (1905-1962)” par André Badot. Disponible en librairie ou chez l’auteur à Valdahon. Les bénéfices sont reversés à l’association “Les Amis de La Villedieu”

La famille Blanchard pose devant sa maison avant sa destruction.

ÉTALANS Nouvelles technologies Sylvain Grosdemouge à la tête d’une start-up très prometteuse L’entrepreneur installé à Étalans dirige la start-up bisontine Shine Research qui vient de participer à deux salons internationaux qui lui ouvrent de belles perspectives de développement.

Sylvain Grosdemou- ge (à droite) lors du salon Siggraph en Californie au début de l’été. Quinze autres entreprises françaises étaient présentes.

L a start-up bisontine Shi- ne Research a le souri- re. Elle vient de parti- ciper à deux salons internationaux, le Sig- graph en Californie dédié aux images numériques où elle a présenté une chaîne de pro- duction graphique 3D pour le développement d’applications, et le Gamescom à Cologne en Allemagne. le plus grand salon

du jeu vidéo européen. Lors de ces deux rendez-vous, son savoir-faire dans le déve- loppement d’applications et le développement de jeux vidéo a fait mouche auprès des pros- pects. “Nous avons eu pas mal de retours. Nous allons finir l’an- née avec beaucoup de projets. On commence à recevoir des com- mandes” s’enthousiasme Syl- vain Grosdemouge, un habitant

d’Étalans, qui a fondé Shine Research en 2012. Sa société indépendante a déjà produit une trentaine d’appli- cations mobiles qui lui ont per- mis de gagner sa crédibilité sur le marché. Désormais, elle peut s’engager sereinement dans une démarche commerciale plus acti- ve. Les commandes commen- cent à tomber et Sylvain Gros- demouge dimensionne son

équipe pour y faire face. “En sep- tembre dernier, j’étais seul. Aujourd’hui, nous sommes sept et nous serons neuf prochaine- ment. Nous avons passé un pre- mier palier qui a consisté à avoir nos premiers clients et à consti- tuer l’équipe” annonce-t-il. La start-up qui occupe des locaux dans l’hôtel d’entreprises àTémis s’apprête à déménager à École-

Valentin dans des bureaux plus spacieux. “On va passer de 48 à 190 m 2 . 2016 se termine bien et 2017 s’annonce bien. Je dirais que nous avons réussi notre décol- lage. À nous de continuer sur cette lancée.” Le savoir-faire de Shine Resear- ch suscite les convoitises. L’en- treprise locale a reçu des appels du pied de l’étranger pour s’ins-

taller, par exemple, au Canada. Malgré les sollicitations, Syl- vain Grosdemouge n’a pas l’in- tention de s’expatrier. “Ce n’est pas un handicap d’être à Besan- çon. Je dirais même que c’est plus facile d’être visible dans cette région où il y a peu d’ac- teurs dans notre secteur d’acti- vité. C’est aussi une fierté d’être là.” n

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