La Presse Pontissalienne 197 - Mars 2016

LE PORTRAIT

43 La Presse Pontissalienne n° 197 - Mars 2016

CINÉMA

Son épouse

Annette raconte Blier La dame vit dans l’appartement de la rue Montrieux où elle séjournait périodiquement avec son acteur de mari Bernard Blier. Installée dans son canapé rouge, elle se confie avec simplicité sur sa vie aux côtés d’un comédien, monstre sacré du cinéma français.

A nnette Blier n’a pas fait de son appartement de la rue Montrieux à Pontar- lier un sanctuaire à la mémoire de sonmari, Ber- nard Blier. Il n’y a pas de photos de lui sur les murs, pas plus que de souvenirs de tournages exposés en vitrine. Seul son César d’hon- neur trône sur un guéridon dans le séjour. L’acteur, affaibli par la maladie, l’a reçu le 4 mars 1989, quelques jours avant sa mort, des mains de Michel Serrault. La dis- tinction est venue couronner les cinquante ans de carrière d’un homme aux 186 films, entré depuis dans la légende du cinéma fran- çais. “Je ne suis pas très photos. J’ai tout mis dans des cartons. Je vis le moment présent et pas avec le passé” assume Madame Blier, enfoncée dans son canapé rouge, en s’allu- mant une cigarette. Elle s’autorise parfois à regarder des films de son mari, mais pas n’importe lesquels. “Il s’agit uni- quement de ceux qu’il a tournés avant notre rencontre. Les autres, qui sont venus après, sont trop char- gés en émotions pour moi” confie

Girardot, Mireille Darc, Jean Car- met, Henri Verneuil, Jean Gabin ou LinoVentura. JeanAnouilh était là aussi. Il proposa d’ailleurs un rôle dans une de ses pièces de théâ- tre à la jeune femme qui déclina l’invitation. Michel Audiard faisait lui aussi partie de la bande. Il pui- sait dans la gouaille de Blier, une façon de parler et des expressions dont certaines figurent parmi les répliques cultes de ses films comme “Le cave se rebiffe”. Des dialogues immortels qui traversent le temps et se transmettent aux nouvelles générations de cinéphiles. Bref, tous ces “copains” s’attablaient parfois chez les Blier à l’heure du repas dans leur appartement à Paris. “La Caillette” - ainsi la sur- nommait affectueusement Gabin - se mettait en cuisine avec plaisir pour les accueillir. Beaucoup de ces personnalités ont disparu aujourd’hui. “Je faisais partie de la grande famille. Je les voyais comme des amis et pas comme les stars de cinéma qu’ils étaient. La vie est étonnante. Dans mon cas, elle fut exceptionnelle.” Elle sait que rien de cela ne serait arrivé si elle n’avait pas croisé un jour la route de Bernard Blier à Pontarlier. C’était en 1961. L’ac- teur débarque alors dans la capi- tale duHaut-Doubs avec une équipe de tournage emmenée par le réa- lisateur Georges Lautner. Ils vien- nent tourner ici “Le 7 ème Juré”. “Mes parents étaient commerçants à Pontarlier. Moi, je tenais l’hôtel La Terrasse rue Montrieux. Ils avaient réservé les 32 chambres pour les besoins du film. Il m’arri- vait le soir de m’asseoir à côté d’eux au bar. On jouait au gin-rami. Les choses se sont faites naturellement entre Bernard et moi” raconte avec simplicité Annette qui portait alors le nom de Martin. La jeune femme avait un peu plus de vingt ans lorsque l’acteur l’a

Bio express Naissance à Pontarlier (elle ne dit pas son âge) 1958, ouverture de l’hôtel La Terrasse à Pontarlier qu’elle gère 1960 rencontre avec Bernard Blier à Pontarlier sur le tournage du 7 ème Juré 1963, elle s’installe à Paris 1965, elle épouse Bernard Blier 1989, Bernard Blier reçoit le César d’honneur et s’éteint quelques jours plus tard Début des années quatre-vingt-dix, Annette Blier revient à Pontarlier

Annette et Bernard Blier ont vécu ensemble pendant plus de vingt ans.

arraché à sa vie pontissalienne. “J’ai tout laissé tomber pour par- tir avec lui à Paris. J’ai abandonné l’hôtel.” Elle fera ses valises mal- gré la désapprobation de ses proches, qui voyaient d’un mau- vais œil qu’elle s’entiche d’un artiste de vingt ans son aîné, marié de sur- croît. “Nous étions si bien ensem- ble. Il était tellement drôle, telle- ment cultivé” se souvient-elle. En prenant sa main, elle a franchi la porte d’un monde qui lui était étranger avant cela. “Mais j’ai vécu cela très normalement. J’y suis allée décomplexée. Il savait me mettre en confiance. J’ai quitté Pontarlier pour me retrouver au Maroc aux côtés d’Henri Verneuil, de Belmondo et de Lino Ventura sur le tournage du film“Cent mille dollars au soleil.” Bernard m’emmenait sur tous ses tournages, à l’exception de ceux qui avaient lieu à Paris. Nous étions presque toujours ensemble” raconte Annette Blier. L’acteur a enchaîné les films avec une forme de boulimie, en s’impo- sant une rigueur quotidienne dans le travail. “Il se levait très tôt pour apprendre son rôle. Il savait toutes ses répliques par cœur pour le cinéma. Lorsqu’il jouait au théâtre il connaissait toute la pièce. Je le faisais répéter. Il avait une exigence,

dérouter les curieux, il était hos- pitalisé sous le nom de “Libre”, l’anagramme de Blier.” L’homme de cinéma s’éteindra le 29 mars 1989 dans une clinique de la région parisienne à l’âge de 73 ans. Il fera don de son corps à la science. Après la mort de l’acteur, Annette Blier restera un temps à Paris, entourée de ses amis comme Pierre Richard et Mireille Darc. Elle tra- vaillait dans les relations publiques. “Je suis allée à Cannes, par exem- ple, à ce titre-là.” La veuve écrira un livre intitulé “Bernard Blier” avec Claude Dufresne. Au début des années quatre-vingt- dix, Annette va quitter Paris, pour revenir définitivement à Pontar- lier, rue Montrieux, au chevet de sa mère. Elle ne retournera pas à la capitale, menant désormais une vie de femme discrète dans sa ville natale où elle a ses attaches. Elle a laissé à Paris ses souvenirs et conservé des amitiés. C’est elle qui a invité Mireille Darc à participer à l’hommage qui est rendu ce mois- ci à Bernard Blier à Pontarlier. “Ce sera superbe. C’est Claude Bertin- Denis qui a eu cette initiative. Je l’en remercie” reconnaît Annette. Une occasion de plus pour elle de se remémorer ses années Blier. T.C.

un souci du détail extraordinaire. On s’engueulait parfois parce que ça n’allait pas. Les gens s’imagi- nent que pour être acteur, il suffit de mettre un costume. Mais c’est beaucoup plus que cela.” Le comédien travaillait à Paris, mais aussi dans l’appartement de la rue Montrieux à Pontarlier, le même qu’aujourd’hui, où le couple venait séjourner parfois. Blier aimait les parents d’Annette avec lesquels la brouille des premiers temps née de la rencontre des deux amants avait fini par se dissiper. “Au quotidien, il était quelqu’un de prévenant, de bonne humeur, de très respectueux.Mais il était d’un abord assez froid avec les gens qu’il ne connaissait pas. Ce n’était pas le genre de type à qui on tapait sur l’épaule à la première seconde.” Ber- nard Blier avait ses habitudes à Pontarlier. Il passait également du temps au golf de la Chevillotte près de Besançon où il avait fini par se faire des copains. Le bonheur, pour le meilleur et pour le pire aussi. En 1985, les médecins diagnosti- quent un cancer à Bernard Blier. “Il m’avait dit, si un jour j’ai une vacherie, je ne veux pas le savoir. Mais je veux me battre jusqu’au bout” raconte sa femme avec émo- tion. L’acteur se fera soigner. Pour

la deuxième épouse de l’acteur dont elle a partagé la vie pen- dant plus de vingt ans. Ce sont autant d’années de souvenirs qu’elle porte en elle. Par pudeur, Annette Blier les partage rare- ment. Mais lorsqu’elle accepte d’ouvrir sa mémoire, on décou- vre à travers elle, sous l’angle de l'anecdote, les coulisses du cinéma où se croisent des célébrités qu’elle a côtoyées comme Jean-Paul Belmondo, Pierre Richard,Annie

“J’y suis allée décom- plexée.”

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