La Presse Pontissalienne 186 - Avril 2015

A g e n d a

La Presse Pontissalienne n° 186 - Avril 2015

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“La science et la sagesse sont les deux choses qui manquent le plus aux décideurs” Compagnon d’aventure du commandant Cousteau, philosophe, biologiste, Yves Paccalet reste à 70 ans un actif défenseur des causes environnementales. Il clôturera la journée grand public organisée autour des zones humides le mercredi 15 avril à la Maison de la Réserve de Labergement-Sainte-Marie. Rencontre. ENVIRONNEMENT - INQUIET DU RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE

L a Presse Pontissalienne : La gestion des zones humides constitue-t-elle un enjeu planétaire ? Yves Paccalet : C’est l’un des grands enjeux. L’avenir des zones humides représen- te un problème transversal qui soulè- ve de nombreuses questions : gestion de l’eau, de l’agriculture, de la biodi- versité…En même temps, c’est un lieu de combat entre différents acteurs humains qui veulent les utiliser à des fins contradictoires…Lacs, deltas, gla- ciers, tourbières, tout le monde se bat pour s’approprier ces zones humides à son profit. L.P.P. : Quel est votre point de vue sur le bar- rage de Sivens ? Y.P. : Que ce soit un barrage ou l’aménagement d’un parc d’attraction, les gens ont l’impression qu’on peut tout faire avec les zones humides, que cela ne changera rien. C’est totalement

l’eau maîtrisée. L’eau n’existe qu’en un seul exemplaire. C’est impossible d’en bénéficier deux fois. L.P.P. :Vous pointez du doigt les lacunes scien- tifiques des aménageurs ? Y.P. : La science et la sagesse sont à mon avis les deux choses qui manquent le plus aux décideurs. L.P.P. : Vous êtes aussi très inquiet face au réchauffement climatique ! Y.P. : Effectivement. c’est un problème majeur. Je participerai à la prochaine conférence sur le climat qui aura lieu en décembre prochain à Paris. J’espère que de vraies mesures seront prises. Il ne faudrait pas que le réchauffement moyen de la terre augmente de plus de 2 °C d’ici 2050. Cela sous-entend des engagements forts des pays non pas à partir de 2030 mais datés de 2015. Aujourd’hui, on est sur une très mau- vaise pente. Pour tenir ce cap de 2 °C en 2050, on devrait réduire de moitié les émissions de gaz à effet de serre sauf qu’on va quatre fois plus vite. Résul- tat, si l’on continue ainsi, on sera à + 8 °C en 2100 ! L.P.P. : Pourquoi tant d’attentisme ? Y.P. : Nous, les écolos, on tire la sonnet- te d’alarme depuis des années. La pri- se de conscience a eu lieumais le contex- te reste inchangé et on continue à s’inscrire dans une bagarre d’intérêts multiples. Les décisions qu’il faudrait prendre provoquent des réactions de refus et finalement les gouvernements ne bougent pas. Dans mon ouvrage “La Terre et la Vie” écrit il y a 25 ans, je soulignais qu’il n’y avait pas de temps à perdre. On en est toujours au même point.

faux car ces zones humides sont ali- mentées par la pluie. L’eau qu’elles absorbent est ensuite restituée dans les vallées par le biais des nappes phréa- tiques. On l’utilise notamment pour ali- menter les populations. Si on dérègle ces réservoirs naturels, on dérègle tout

le cycle de l’eau qui est vital. L’artificialisation des zones humides s’observe à tous les niveaux et les consé- quences sont souvent irré- versibles L.P.P. : Un ouvrage comme celui de Sivens même réduit en taille n’apporterait rien de bon donc ? Y.P. : Ce serait totalement faux de croire que l’eau de pluie s’additionne à l’eau du barrage. C’est pure illu- sion. Il n’y a pas d’un côté l’eau sauvage et de l’autre

“Si l’on continue ainsi, on sera à + 8 °C en 2100 !”

gents prétendent qu’ils ont d’autres priorités. Qu’en pensez-vous ? Y.P. : Ils ont fait valoir en 2009 à la confé- rence de Copenhague que les donneurs de leçons que nous sommes avaient déjà tout massacré, ce qui n’est pas inexact. Sauf qu’ils s’aperçoivent aussi qu’ils sont les premières victimes du systè- me avec les sécheresses à répétition ou les soucis respiratoires liés à la pollu- tion dans les grandes métropoles. C’est la même chose dans les pays pauvres. Il y a une nécessité de solidarité mon- diale mais les riches sont-ils prêts à partager ? L.P.P. : De quoi allez vous parler lors de votre conférence du 15 avril à la maison de la réser- ve à Labergement-Sainte-Marie ? Y.P. : Je vais m’appuyer sur l’un de mes ouvrages “L’humanité disparaîtra, bon débarras !” qui a fait l’objet d’une réédi- tion remise au goût du jour. J’aborde les thématiques dont nous venons de parler. On peut ajouter l’évolution des zones protégées, l’avenir du loup, du lynx et d’autres espèces emblématiques, y compris l’homme. C’est un livre d’humour noir, d’écologie argumentée, le tout traité dans une approche très philosophique.

L.P.P. : Comment le montagnard que vous êtes a pu se retrouver embarqué sur la Calypso ? Y.P. : Fils de paysan, j’ai grandi dans les Alpes où je vis toujours dans un hameau perché à 1 300 m d’altitude. Après des études de philosophie et de biologie, j’ai rencontré le commandant Cousteau. Comme j’avais envie de décou- vrir le vaste monde, je l’ai suivi et je suis devenu son écrivain pendant une vingtaine d’années.Après cette tranche

Journée grand public gratuite est organisée le mercredi 15 avril à Laberge- ment-Sainte-Marie Ateliers grand public : Découverte des petites bêtes pour les nuls ! Histoire de pollens “Sauvons la truite”, jeu de plateau au fil de la rivière Coloriages pour les plus petits Sorties : à 14 h et 16 h : Découverte de la faune des zones humides (visite guidée) 14 h 30 : Visite sur le terrain de la Réserve Naturelle Nationale du lac de Remoray 17 heures : Présentation du Pôle relais tourbières Projection du film “The Moor” de Jan Haft ayant pour thème les tourbières (film ayant reçu le Grand Prix au festival de Ménigoute 2013) 20 h 30 : Complexe socio-culturel des Vallières, rue du Lac : conférence dʼYves Paccalet, philosophe, écrivain et naturaliste : “Lʼhumanité disparaîtra, bon débarras !” Renseignements au 03 81 69 35 99

d’aventure, j’ai continué à écrire notamment pour le magazine Terre Sau- vage. Je m’occupais de la rubrique Sentiers sau- vage, ce qui m’a permis de crapahuter dans la plupart des massifs fran- çais. L.P.P. :Vous connaissez donc bien le Jura ? Y.P. : Oui, je l’ai parcou- ru et décrit du grand Crêt d’Eau auMont d’Or en passant par le Saut du Doubs. C’est une région absolument subli- me où j’ai pu suivre les

“L’homme détruit beaucoup.”

L.P.P. : Face au réchauffement, les pays émer-

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