La Presse Pontissalienne 184 - Février 2015

DOSSIER 20

La Presse Pontissalienne n° 184 - Février 2015

Finances De 6 à 12 mois Les banques assaillies par les frontaliers Depuis le déplafonnement du franc suisse, les travailleurs frontaliers se

bloquer le taux de chan- ge puisque le système leur permet. Les banques qui ont pignon sur rue ont été assaillies de demandes au guichet et de coup de fil de frontaliers qui ne voulaient pas pas- ser à côté de cette oppor- tunité. “On se serait cru aux soldes dans un grand magasin” sourit un conseiller dans une banque de Pontarlier. “À l’entrée de notre agen- ce des Hôpitaux-Neufs,

bon leur semble, pour une durée de six mois ou un an, lorsqu’ils jugent que celui-ci leur est profitable. C’est le cas en ce moment. La situation est similaire à celle de 2011, lorsque le franc suisse a atteint la parité avec l’euro (1 franc suisse = 1 euro). Déjà à l’époque on avait assisté à ce même phénomène d’empressement des fron- taliers de bloquer le taux de change avant que la B.N.S. décide officielle- ment de le maintenir à 1,20. “La garantie de change ne s’applique pas sur l’intégralité du salaire, mais sur une partie seulement” précise Éric Daclin. Cette règle à laquelle s’astreignent les banques en géné- ral est une sécurité pour un client qui devra continuer à alimenter son compte en francs suisses à hauteur du montant et de la durée prévus dans le contrat et ce, même s’il perd son emploi. C’est d’ailleurs en raison de l’instabilité de leur poste que les intérimaires frontaliers ne peuvent pas demander à bénéficier d’une garantie de change. Si la situation est envieuse d’un point de vue financier pour les frontaliers, elle n’en reste pas moins inquiétan- te pour les banquiers de la place qui n’ont pas accueilli comme une bon- ne nouvelle la décision de la B.N.S. d’abandonner le taux de change plan- cher. “Cela n’est pas bon pour les entreprises suisses qui exportent et qui voient leurs prix majorés de 20 %. Le contexte va les obliger à s’adapter, soit en se séparant d’une partie de leur personnel, soit en abaissant les salaires, soit encore en demandant aux collecteurs d’effectuer des heures supplémentaires sans les rémuné- rer pour cela estime Éric Daclin. Ce n’est pas bon non plus pour le Haut- Doubs, car tout ce qui déstabilise les frontaliers déstabilise les mar- chés locaux. Ces périodes d’instabilité ont plutôt tendance à geler les inves- tissements plutôt qu’à les encoura- ger.” Si le nombre de frontaliers était en croissance ces dernières années, il y a fort à parier qu’en l’état, le taux de change freinera l’emploi, pire le fera reculer. T.C.

L’ annonce inattendue de la Banque Nationale Suisse (B.N.S.) d’abandonner la parité plancher de 1,20 s’est traduite par une appréciation immé- diate du franc suisse par rapport à l’euro. Le 15 janvier, le taux change a chuté de 1,20 à 0,86 temporaire- ment avant de se stabiliser autour d’1,04. Une aubaine pour les tra- vailleurs frontaliers qui ont vu leur pouvoir d’achat faire un bond de 20 %! À la suite de cet événement, la majo- rité des frontaliers qui ont eu le nez creux se sont précipités dans leur agence bancaire pour demander à sont rués dans les agences bancaires de la place pour bloquer le change à un taux très avantageux.

“Les gens faisaient la queue sur le trottoir.”

les gens faisaient la queue sur le trot- toir. Les clients venaient pour mettre en place une garantie de change” rap- porte Éric Daclin, directeur du Cré- dit Mutuel de Pontarlier. Les frontaliers ont cette possibilité de bloquer le taux de change comme

Prêts “toxiques” : la Ville de Pontarlier impactée Pontarlier possède quatre prêts en francs suisses pour un capital restant dû de 878000 euros. L’envolée du cours occasionne un surcoût d’environ 100000 euros, mais la mairie se veut rassurante. E n économie, les vérités des années 2000 ne sont plus celles de 2015. Comme environ 900 collectivités en France, Pon- gé dernièrement les services pour connaître le véritable impact: “Le refi- nancement par la Ville d’un de ces emprunts “toxiques” pour lequel il res- tait 1 600 000 euros en 2012 a coûté 1400000 euros d’indemnité de sortie! Ceci a nécessité de contracter un nou- vel emprunt qui pèse dans le stock de dettes probablement environ Finances Quel impact pour les collectivités ?

tarlier s’endette en souscrivant des emprunts dont les taux d’intérêt étaient libellés notamment en franc suisse, une monnaie alors jugée très stable par la communauté financière. “Ces taux variables étaient alors d’environ 1,5 % alors que les taux fixes proposés à l’époque étaient de 5,74 %” rapporte la commu- ne. Mais au cours de la décennie pas- sée, la monnaie suisse s’est fortement appréciée - même si le pays a tout fait pour contrer cette hausse. Du coup, ces emprunts sont rapidement devenus “toxiques” ou “sensibles”. Ils le sont davantage avec la flambée de la mon- naie helvète. Pour Pontarlier, la consé- quence (non définitive) de l’envolée du franc occasionne “un surcoût d’environ 100000 euros” précise la collectivité. Ce chiffre est à mettre au conditionnel car le taux est fixé par trimestre. À l’heure où nous bouclions ces lignes, le taux de ce trimestre n’était pas défini- tif. Au total, la Ville dispose de quatre emprunts indexés sur le cours du franc suisse pour 878 000 euros de capital restant dû. Cela représente 5 % de la dette totale de la collectivité dont le montant total est de 16millions d’euros. “Ces prêts ne mettent pas en péril la santé financière de la Ville mais il est important que Pontarlier ait une poli- tique d’emprunt où elle préconise les taux fixes” réclame depuis quelques mois le conseiller municipal Gérard Voinnet, membre de l’opposition. Il a alerté à plusieurs reprises la majorité à ce sujet, au moment du débat d’orientations budgétaires et interro-

Les frontaliers bloquent leur taux de change pour une partie de leur salaire. 2015-2016

270000 euros pour encore six ans, sans compter les intérêts (4,43 %) qui eux grèvent les charges financières inscrites à la section de fonctionnement” analy- se Gérard Voinnet. Pontarlier veut relativiser. “Aujour- d’hui, nous sommes perdants mais sur le long terme, nous sommes gagnants car on arrive à un taux 3,9 % (contre 5,2 % en moyenne). Nous avions même gagné de l’argent lorsque nous avions contracté des prêts en yen japonais” , rapporte la direction. Si la ville n’a pas racheté les quatre fameux prêts dits “structurés”, c’est en raison du coût de sortie trop élevé eu égard à la fin du prêt fixé à 2016, c’est- à-dire demain. Une chose est certaine: Pontarlier, comme les autres collecti- vités, réfléchira à deux fois avant de contracter ces prêts variables.Le contex- te est différent : les collectivités peu- vent désormais emprunter à des taux fixes défiant toute concurrence. Zoom LʼÉtat compte faire un geste envers les 900 collectivités locales ayant sous- crit des emprunts indexés sur la pari- té euro-franc suisse. La dotation du fonds dʼaide public-privé qui leur est dédiée devient insuffisante. Le gou- vernement devrait la réévaluer.

Hausse du chômage possible

Le taux de chômage devrait augmenter Le centre de recherches

D urant l’été 2011, on a assis- té à une parité presque par- faite entre le franc suisse et l’euro. Jamais cela ne s’était produit dans l’histoire de la monnaie helvétique. À l’époque, la Banque Nationale Suisse n’avait pas tardé à réagir en fixant un taux plan- cher de 1,20 afin d’éviter que ce franc fort ne pénalise l’économie suisse tournée principalement vers l’export. En janvier 2015, la B.N.S. a aban- donné le taux plancher du franc suis- conjoncturelles de Zurich redoute que franc suisse trop fort pénalise l’économie helvétique pour les deux prochaines années.

se par rapport à l’euro, ce qui a entraî- né une hausse immédiate de la mon- naie helvétique. Tout le monde s’interroge sur les remèdes que la B.N.S. va administrer cette fois-ci

ge devrait augmenter.” Selon le K.O.F., les exportations vont marquer le pas. “Elles devraient accuser une baisse notable durant le premier semestre de l’année en cours. Elles pourront bénéficier plus tard de l’amélioration du contexte international. Les clients qui resteront fidèles aux produits suisses malgré l’appréciation du franc accroîtront de nouveau leur deman- de.” Cette situation monétaire devrait avoir des répercussions sur l’économie intérieure suisse et se traduire par un recul des investissements et de la consommation. Selon le K.O.F., il faut s’attendre au final à ce que le taux de chômage en Suisse s’établisse à 4,4 % en 2015 et atteigne les 4,9 % en 2016. Il était de 3,2 % en 2014, encore proche du plein-emploi.

pour reprendre la main sur sa monnaie et dans quels délais. Car les risques qui pesaient il y a quatre ans sur l’économie suisse sont à nouveau d’actualité. L’événement monétaire a conduit le K.O.F. (centre de recherches conjonctu- relles) de Zurich à revoir ses prévisions à la bais- se. Il prévoit “une chute de la performance écono- mique au cours de l’été 2015. Le taux de chôma-

Le chômage à 4,9 % en 2016.

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