La Presse Pontissalienne 180 - Octobre 2014

LA PAGE DU FRONTALIER 42

La Presse Pontissalienne n° 180 - Octobre 2014

VALLORBE

Il a créé sa propre boîte Sa vérité sur le salaire suisse : “On ment aux nouveaux venus” Son salaire à l’appui, David M. explique que les rémunérations en Suisse sont aujourd’hui beaucoup moins alléchantes qu’elles ne l’étaient auparavant. Licencié, ce frontalier a choisi de créer sa boîte… à Vallorbe.

dans le médical pour 18,79 francs suisses de l’heure. “C’est peu par rap- port au poste à responsa- bilité que j’occupe en bout de chaîne” dit-il. La première semaine, il touche 662,60 francs suisses, 547 la seconde puis 1 225 par semaine et 1 195 francs suisses le seconde pour un travail de nuit, soit 3 629 francs pour le mois (soit 3 001 euros en brut). “En

fédéral de la statistique. “C’est faux. Aujourd’hui, les nouveaux salariés fron- taliers qui sont embauchés sont plutôt à 2 500-3 000 francs suisses, chose qui n’existait pas avant. J’ai touché en inté- rim 2 584 euros. La presse ment aux nouveaux venus” dit David en expo- sant sa fiche de paye. Rencontré dans un café à Vallorbe, il interpelle la ser- veuse : “Et vous, touchez-vous 4 272 francs suisses bruts par mois pour votre poste ?” Réponse de l’employée, un peu gênée, “non, beau- coup moins, dit cette frontalière. J’ai travaillé un mois dans un alpage en Suisse comme serveuse à 100 % pour environ 1 600 euros” témoigne la jeu- ne femme. Licencié en mai 2013 d’une industrie spécialisée dans les câbleries à haute tension, David est resté 3 mois sans activité avant de s’inscrire dans une boîte d’intérim. À 45 ans, ce père de famille qui a acheté une maison a, com- me tout le monde, l’obligation de payer ses traites. “Lorsque vous vous pré- sentez à un entretien, il ne faut pas rêver : on ne vous embauche plus à 4 500 francs suisses. Les entreprises ont tellement de C.V. venus de Bor- deaux, Paris, du Nord, qu’elles choi- sissent les nouveaux venus. Elles essayent de se séparer des anciens fron- taliers qui coûtent cher” estime-t-il. Les nouveaux frontaliers seraient, à l’entendre, moins regardants sur les salaires : “Il y a une désinformation : ceux qui arrivent ne savent pas ce qu’est le deuxième pilier ou qu’ils devront payer leur assurance-maladie, les tra- jets, plus d’impôts, etc.” À l’entendre, le marché serait bousculé par cette arrivée massive de candidats à l’eldorado suisse. David est finalement embauché en intérim par une société spécialisée

2 500 euros nets par mois.

L’ histoire professionnelle de David M. est peut-être révé- latrice d’un nouvel état d’esprit chez les travailleurs fronta-

tière veut couper court à certaines véri- tés. Et notamment celle que le salai- re médian était en 2012 de 5 100 francs suisses par mois comme l’affirme l’Office

liers confrontés à des bas salaires, notamment pour les nouveaux venus. Cet habitant de Jougne qui travaille depuis 30 ans de l’autre côté de la fron-

net, cela me fait un salaire de 2 584 euros ! On est loin des chiffres annoncés…” S’il dit ne pas être déçu du travail fron- talier, DavidM. a toutefois décidé d’être son propre patron. “Marre de travailler pour les autres” souffle-t-il. Il a créé une société spécialisée dans la vente et la valorisation de pneus usagés… en Suisse, à Vallorbe, en s’associant avec Franco Montinari. Ce nouveau costume le fait-il changer de discours par rapport aux salaires, lui qui recherche désormais un chauffeur poids lourds pour son activité qui a débuté en septembre ? “On a reçu une dizai- ne de C.V. de Français originaires de la région parisienne, de Strasbourg, des Pyrénées, qui voulaient tout quit- ter pour s’installer ici sans réfléchir” relate David. Son collaborateur, de nationalité suisse, ajoute : “Certains demandent 5 700 francs bruts, c’est juste impossible. Nous, on propose entre 4 000 et 4 500 francs suisses et c’est déjà pas mal.” Si la Suisse demeure attractive, elle n’est pas l’eldorado que beaucoup voudraient laisser entendre…

David M. (à gauche) joue la transparence sur son ancien salaire suisse, pas si mirobolant. Il a créé sa boîte spécialisée dans la valorisation des pneus, avec son associé Franco Montinari.

E.Ch.

LES VERRIÈRES

Une consommation de 120 ménages 7 000 m 2 de panneaux photovoltaïques

à deux pas de la frontière Aussi surprenant soit-il, la zone industrielle de la glacière aux Verrières abrite l’un des plus grands parcs photovoltaïques du canton de Neuchâtel. Qualité allemande.

B asé à Leipzig en Alle- magne, le groupe Biacryl a investi en 2007 dans la construction d’une usi- ne auxVerrières où elle fabrique des plaques en acrylique de très

Quel rapport autre l’énergie solaire et la production de vitrages spéciaux ? A priori aucun, sauf que Bernward Bie- lawski a choisi d’optimiser tou- te la surface du site Biacryl aux Verrières. Pour plusieurs rai- sons. “On est très favorable à une politique d’énergie verte. On a les moyens financiers de l’investissement et on n’a pas besoin de surface de travail sup- plémentaire sur le site.” Résul- tat : en 2012 le groupe installe 7 000 m2 de panneaux au sol et en toiture pour une puissance de 600 kW. L’installation pro- duit en moyenne 500 000 Mwh par an, soit l’équivalent de la consommation de 120 ménages. Toute l’énergie produite est ven- due au groupe E, distributeur d’électricité sur les cantons de Neuchâtel et de Fribourg. Le site Biacryl consomme enmoyen- ne 60 Mwh par an. “On produit largement plus d’énergie que l’on en consomme” , poursuit le diri- geant allemand qui a continué à se diversifier dans l’équipement photovoltaïque. “EnAllemagne,

grands formats. Elle conçoit par exemple des parois d’aquarium pour des zoos et des parcs aqua- tiques dans toute l’Europe. “On peut produire des plaques de 3 m sur 8 m pouvant faire jus-

qu’à 340 mm d’épaisseur. C’est ce qui se fait de plus grand en Europe” , explique Bernward Bie- lawski, l’un des dirigeants de ce groupe familial. L’activité mobilise deux salariés.

on gère quatre autres installa- tions.” Les panneaux fabriqués en Allemagne sont de type couches minces. Cette techno- logie s’avère plus efficace que les produits chinois. “Ces pan- neaux produisent moins quand il y a beaucoup de soleil mais ils marchent toujours quand il y a des nuages. Ici aux Verrières, la production peut varier de 500 à 3 800 kWh par jour. Sur tou- Le dirigeant allemand devant le tableau de production mensuel.

te l’année, on enregistre seule- ment 4 ou 5 jours sans produc- tion quand le ciel est vraiment bouché. La température exté- rieure n’a aucune incidence. C’est le type de panneau idéal en zone montagneuse.” Comme rien se perd chez Biacryl, un modeste troupeau de mou- tons passe l’été à l’ombre des panneaux.

Le site Biacryl est entièrement recouvert de panneaux au sol et sur la toiture du bâtiment.

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