La Presse Pontissalienne 179 - Septembre 2014

L’INTERVIEW DU MOIS

La Presse Pontissalienne n° 179 - Septembre 2014

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TOURISME

Réaction et perspectives “La fin de la Voie verte n’est pas la fin du Haut-Doubs”

Après l’échec du recours à la cour d’appel, le président du Conseil général du Doubs Claude Jeannerot revient ce projet qu’il a défendu avec acharnement. Il justifie ses décisions et ses choix.

L a Presse Pontissalienne : La décision de la cour d’appel vous a-t-elle surprise ? Claude Jeannerot : D’abord, elle m’a déçu car elle met un terme à un projet sur lequel on a fondé des espoirs. On prend acte de la décision qui confirme l’annulation d’utilité publique déjà pro- noncée en première instance par le tri- bunal administratif de Besançon. On est dans un pays de droit où l’action des collectivités est toujours très enca- drée. C’est l’arrêté de déclaration d’utilité publique de l’État qui est annu- lé, pas seulement le fait du Conseil général mais aussi des services du pré- fet. Mais dont acte, on ne conteste pas une décision de justice. Aujourd’hui, il faut tourner la page. L.P.P. : Pourquoi ne pas aller jusqu’au Conseil d’État ? C.J. : Il y a un moment où il faut savoir apprécier la situation. Relativisons aussi ce projet de Voie Verte qui n’est pas le seul projet structurant sur le Haut-Doubs. Il s’inscrit dans un pro- jet global de développement écono- mique du secteur et ce n’était qu’un des éléments du plan départemental d’itinéraires touristiques. Cette ambi- tion globale pour le territoire du Haut- Doubs est toujours d’actualité. La fin du projet Voie verte n’est pas la fin du Haut-Doubs. Sur le reste, nous ne sommes pas dans l’espérance mais dans l’action réalisée. L.P.P. : A quelles actions songez-vous ? C.J. : A la mise aux normes des trem- plins de Chaux-Neuve. À la relance de la station de Métabief qui a débuté avec le nouveau télésiège et s’est pour- suivie avec la neige de culture, le tout permettant de fidéliser la clientèle. Il y a aussi le soutien du Conseil géné- ral à la filière nordique. On peut signa- ler la pose d’enrobé sur la totalité du parcours de laVoie du train entre Pon- tarlier et Gilley. L.P.P. : Sans oublier le Conifer ? C.J. : On a engagé une réhabilitation complète du wagon-restaurant. Nous avons aussi acheté les terrains de l’emprise de la voie sur la commune de Montperreux. Cette acquisition per- met de rallonger la ligne sur 3 km. Je suis intervenu comme parlementaire auprès du ministre des Transports pour avoir l’autorisation de se raccor- der au réseau R.F.F. sur La Cluse-et- Mijoux. Le dossier est en cours d’instruction. Notre ambition est bien de rejoindre Pontarlier. L.P.P. : Certains estiment que vous aviez fait de la Voie verte un combat personnel. Que leur répondez-vous ? C.J. : Je récuse totalement cela. Figu- rez-vous que cette Voie verte était déjà dans les cartons du Département avant mon arrivée. Je suis toujours surpris de la violence des opposants sur le dos- sier Voie verte. Ils n’étaient pas nom- breux, mais violents. On avait l’impression qu’on allait construire une centrale nucléaire. C’était démesuré et cela n’avait rien à voir avec ce fameux projet de télécabine entre le lac et le Mont d’Or évoqué par un ancien pré- sident du Conseil général. Par contre, j’en avais fait un combat personnel dans le sens d’aller en présenter l’intérêt aux habitants. J’ai fait la même cho-

se avec le musée Cour- bet qui n’aurait peut- être pas vu le jour sans cette obstination. L.P.P. : Beaucoup contes- taient la question des alter- nats censés sécuriser la cir- culation sur la R.D. 169. C.J. : Je vais vous répondre sur cet argu- ment. Il faut donner une information simple. Dans le cadre de l’expérimentation menée à Saint-Point, la gendarmerie n’a rele- vé aucun accident pen- dant cette période test. L’alternat, c’est une solution possible. Elle pose aussi la question de la relation que le citoyen entretient avec la voiture. Tout cet été, le Conseil général a d’ailleurs mené une campagne de sensibi- lisation sur les routes pour inciter à la pru- dence.

“On avait l’impression qu’on allait construire une centrale nucléaire.”

L.P.P. : Et que dire du coût de ce projet que d’aucuns trouvaient indécent dans le contex- te actuel ? C.J. : On s’attache depuis des années à faire des économies sur le fonctionne- ment de la collectivité. La question du coût se pose si l’on sait combien cela rap- porte. C’est l’histoire de l’œuf et de la poule.Nous avons démontré sur la vélo- route qu’il y avait des retombées parce que les équipements existaient. Notre ambitionn’est pas dedépenser de l’argent mais de créer de la richesse. L.P.P. : Est-ce que l’abandon de la Voie verte ouvre la porte à d’autres alternatives ? C.J. : Je vais reprendre une citation d’Edgar Faure qui disait : “C’est un grand tort d’avoir raison trop tôt.” Cet équipement vient sans doute trop tôt. Il a été victime d’intérêts personnels qui prétendaient se draper derrière l’intérêt général. Nous ne lâcherons rien. L’option bande cyclable n’est pas plus pertinente. Un tel équipement coûte aussi cher car il faudrait égale- ment élargir l’emprise de la route. Sans offrir le même niveau de sécurité. On ne souhaite donc pas s’engager dans une opération qui coûte aussi cher et qui manque d’intérêt. L.P.P. : L’argent économisé sera redistribué sur les autres projets ? C.J. : Rappelons d’abord que l’investissement s’étalait dans le temps. Avec toutes nos autres ambitions sur le Haut-Doubs, on ne manquera pas de possibilités. On continuera à ser- rer les dépenses de fonctionnement pour privilégier l’investissement qui prépare l’avenir et améliore le cadre de vie au niveau des communes. L.P.P. : Sur un autre thème, quelle a été votre réaction à l’annonce de la suppression des Départements ? C.J. : Finalement, le Département notam- ment en zone rurale n’a pas encore dis- paru. Je me réfère au combat que j’ai mené au Sénat sur le premier texte de loi de la réforme territoriale. Je me

“L’option bande cyclable n’est pas plus pertinente”, estime Claude Jeannerot, le président du Conseil général du Doubs.

pe affaires sociales. J’ai été rapporteur sur les emplois d’avenir, sur la sécu- risation de l’emploi, la formation pro- fessionnelle et le dialogue social. J’ai présenté ma candidature dans une logique de service et non pas de car- rière. Comme j’ai été battu de deux voix au Conseil fédéral, j’étais fondé à présenter une liste alternative même hors parti mais je m’y suis refusé car c’est tout le contraire d’une action de rassemblement. J’ai décidé deme recen- trer sur le Conseil général avec cette perspective de la réforme territoriale. Les 2 400 agents de la collectivité ont besoin de perspectives et au-delà tou- te la population. Finalement, compte tenu des circonstances, j’ai fait le choix de privilégier ma collectivité et de pré- parer l’avenir. Je veux le faire dans un souci de rassemblement le plus large autour de ce que nous allons faire de ce territoire. Propos recueillis par F.C.

alors une réalité et j’ai aussi envie de reprendre mon souffle. Ces deux man- dats se sont bien complétés. À l’issue du mandat de sénateur, j’ai proposé au parti socialiste de pouvoir être recon- duit dans une logique de service, à la lumière de trois arguments. D’abord, le fait qu’en 2008 à mon élection séna-

suis opposé et je pense qu’avec d’autres parlementaires, nous avons pu faire entendre la voix des territoires ruraux. La disparition des Départements risque de les desservir. Le Département va engager un plan de relance bâtiment- travaux publics qui accélérera les pro- cédures en matière d’accessibilité, de qualité des rivières et du développe- ment du haut-débit. Autour de ces quatre enjeux, nous escomptons relan- cer l’activité économique et créer de la richesse. L.P.P. :Votre sentiment sur les prochaines séna- toriales ? Après avoir été écarté au profit de Martial Bourquin, comment envisagez-vous votre avenir politique ? C.J. : Depuis six ans, j’assure complè- tement mon mandat de sénateur et celui de président du Conseil général. J’avais annoncé qu’à l’échéance de sénateur, je n’assurerais plus qu’un seul mandat. Le non-cumul devenait

toriale, j’ai été parmi les trois sénateurs du Doubs celui qui a été le mieux élu avec 55 % des suffrages. Cela a permis l’élection d’un second sénateur socia- liste. Je rappelle qu’à l’époque, on était dans un scrutin uninomi- nal. Le deuxième aspect s’appuie sur mon bilan de mandat où j’ai respecté mes engagements. J’animais mon grou-

“Aujourd’hui, il faut tourner la page.”

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