La Presse Pontissalienne 168 - Octobre 2013

LE PORTRAIT

La Presse Pontissalienne n° 168 - Octobre 2013

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PONTARLIER

Fidèle au poste depuis 25 ans

Franck Genre-Jazelet :

Emmaüs avec ou sans objection

Arrivé dans la structure pour y effectuer son service civil en 1987, le premier salarié d’Emmaüs Pontarlier est resté fidèle au poste. C’est aujourd’hui le responsable du personnel

B ouger, bricoler, avoir le sen- timent d’être utile, le job avait tout pour lui plaire même si logiquement il aurait pu faire carrière dans l’industrie avec son C.A.P. de tour- neur. “J’ai testé mais sans plus” , explique l’intéressé qui ne se voyait pas enfermé toute la journée. Pour autant, il ne regrette pas d’avoir acquis quelques bases mécaniques qui lui seront fort utiles par la sui- te. Quand l’heure du service militaire sonne en 1987, ce citoyen originaire de La Cluse-et-Mijoux opte pour l’ob- jection de conscience. Il frappe à la porte d’Emmaüs qui l’accueille sans problème. Début d’une longue his- toire qui dure toujours.“On était enco- re installé chez Cofreco”, précise Franck Genre-Jazelet déjà en char- ge des tournées de ramassage. Le ter- ritoire de collecte s’étend à l’époque de Mouthe à Maîche. “C’est un tra- vail assez physique. Comme on inter-

vient sur demande, on est toujours attendu et bien reçu” , poursuit celui qui ne compte plus les pauses-café partagées avec la “clientèle”. Avec la création d’une antenne Emmaüs aux Fins, le secteur d’in- tervention des compagnons pontis- saliens se limite désormais au Haut-

Surtout pour les vêtements, on récu- père souvent du neuf avec des éti- quettes. Tout est mis en vente aumaga- sin.” Par souci de transparence, Emmaüs s’est fixé des règles strictes vis-à-vis de ses bénévoles. Ils peu- vent acquérir un objet donné si et seulement si celui-ci a déjà été mis en vente au moins trois semaines. Depuis les années Cofreco, les choses ont pas mal évolué à Pontarlier. L’as- sociation s’est étoffée. Elle a acquis ses propres locaux en zone indus- trielle. Au terme de son objection de conscience, Franck Genre-Jazelet a rempilé sans l’ombre d’un regret. “Je n’ai jamais eu envie de partir.” Si, au départ il n’avait pas forcément le sou- ci des autres, il s’est finalement pris au jeu de la solidarité. L’esprit Emmaüs s’est enraciné dans ses valeurs avec le plaisir de se sentir utile. Avec la montée en force de la société des loisirs et du gaspillage, le boulot ne manquait pas chez les récupérateurs caritatifs. “On remplit

Doubs forestier. Les principes sont inchan- gés. “On n’achète rien et le ramassage est gratuit. Le tri s’effectue au déchargement du camion.” On fait appel à Emmaüs dans le cadre d’un déménagement, d’un décès, d’une suc- cession ou tout simple- ment par envie de renou- veler son mobilier. L’effet de la Suisse se fait sen- tir dans la nature des objets donnés à Emmaüs. “C’est clair, on sent qu’il y a du pouvoir d’achat.

Jamais eu envie de partir.

Le responsable du personnel d’Emmaüs Pontarlier n’est pas du genre à rester toute la journée au bureau.

quasiment deux camions par jour.” Il a fallu embaucher, se structurer, se professionnaliser. L’équipe s’est étof- fée. Elle compte sept salariés dont quatre emplois aidés. Franck Genre-Jazelet a pris du galon. Il est responsable du personnel. Un rôle pas toujours facile à assumer surtout quand il s’agit de se séparer d’un employé incompétent. “On fonc- tionne comme une entreprise.” À chaque nouvelle embauche, la recrue s’engage sur le respect d’un règle- ment. C’est pareil pour les bénévoles. Avec le temps, le chef d’équipe s’im- plique davantage dans la vie de la structure. Il participe à des réunions à l’échelle du groupe Emmaüs Bour- gogne-Franche-Comté. “Les activités tendent à se diversifier. On est main- tenant impliqué dans la gestion d’une plateforme de tri textile basée vers Sellières dans le Jura. Elle réunit douze associations au sein du collec-

tif “Textile franc-comtois”. Ce dispo- sitif a généré 14 emplois.” Emmaüs Pontarlier a dernièrement signé une convention avec Préval et l’entreprise Armstrong pour la récu- pération de papiers. L’association a investi dans une imposante presse qui permet de conditionner des bal- lots de papier avant livraison au fabri- cant de plafonds. “On livre environ deux bennes par mois.” D’autres opé- rateurs s’intéressent aussi au mar- ché de la récupération. Certains font vibrer la corde sensible du caritatif pour s’adonner finalement à une acti- vité purement commerciale. Franck Genre-Jazelet cite l’exemple des appels aux dons estampillés croix orange qui sont actuellement distribués dans les boîtes à lettres du secteur. “Il s’agit d’un privé qui cherche seulement à remplir ses camions pour ne pas cir- culer à vide” prévient-il. F.C.

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