La Presse Pontissalienne 160 - Février 2013

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VALDAHON - VERCEL 28

La Presse Pontissalienne n° 160 - Février 2013

VALDAHON

La vie du camp L’histoire d’une gueule cassée devenue champion de sport

L’adjudant David Travadon raconte comment il a perdu sa main droite et son œil lors d’une opération de déminage au Liban. Après avoir frôlé la mort, le militaire du 13 ème R.G. de Valda- hon a compensé par le sport. Au point de penser aux Jeux paralympiques de Rio en 2016.

service, la vie a basculé au Liban lors d’une opération de démi- nage menée conjointement avec des officiers libanais et israé- liens sous contrôle de la F.I.N.U.L. (Force intérimaire des Nations Unies au Liban). C’était le 18 novembre 2009.Avec d’autres militaires, l’adjudant s’échinait depuis 70 jours à détruire ses engins “instables” sur la Blue Line, un passage de deuxmètres de large truffé de mines anti- personnelles déposées entre 1984 et 1985 lors de la guerre du Liban. “J’étais chargé de leur destruction avec mon équipe. J’ai engagé la charge explosive à côté la mine après avoir nettoyé. Et elle a explosé” dit-il. Trois ans et demi après cet acci- dent, il n’a rien oublié. Projeté à plusieurs mètres de l’impact, il ne perdra pas connaissance. “Quand on se relève, on fait le bilan. Je me suis dit : je ne dois pas être mort tellement j’ai mal. J’aurai aimé perdre connais- sance. Je me suis relevé - mais pas longtemps - car je perdais beaucoup de sang. J’aurai dû être mort mais grâce à la for- mation des hommes qui étaient avec moi, j’ai survécu. C’est un de mes sous-officiers, un bout de femme, qui m’a sauvé la vie” raconte-t-il. Après avoir reçu deux litres de sang dans l’hélicoptère, il est transporté en moins d’une demi-heure à l’hôpital de Saïda au Liban. “C’est une prouesse.” Malgré des éclats métalliques dans le crâne et un pronostic vital engagé, David survivra après avoir été rapatrié en Fran- ce avec une artère sectionnée et unœil enmoins.À l’hôpital mili- taire, personne ne souhaite l’opérer. Son cas est jugé trop risqué.Aveugle, l’adjudant signe alors une décharge pour passer sur la table d’opération. “Je ne pouvais pas vivre comme ça. C’était ça passe ou ça casse… et ils ont finalement pu résorber le saignement.” À son chevet, son épouse le sou- tient, l’aide. Par chance, il récu-

père son deuxième œil. La rééducation physique et mora- le peut alors débu- ter. “Je ne vais pas me plaindre. Je n’ai pas fauté. J’aurais pu y rester comme d’autres” avoue le Valdahonnais qui pense bien évi- demment à

P our ses camarades militaires du 13 ème régi- ment du génie de Val- dahon, David Trava- don est un exemple de

courage. Il fait partie comme des milliers d’autres militaires des blessés de guerre, des hommes ou des femmes qui ont perdu un membre lors d’une

opération extérieure. Son his- toire est atypique : gravement blessé, le militaire duValdahon a surpassé ses douleurs phy- siques et mentales en moins de

deux ans pour devenir le porte- drapeau de l’équipe paralym- pique militaire française. Le sport : son médicament. Pour David, 35 ans et 16 ans de

“Ça passe ou ça casse.”

l’adjudant Mozic (décédé en 2011) ou encore au lieute- nant Damien Boiteuxmort dans le conflit armé au Mali. David a accepté le fait qu’il ne pourrait plus remporter les cross du régiment mais n’a pas pour autant fait une croix sur sa vie de militaire. Il forme actuelle- ment les cadres dans la prépa- ration des concours. Accompagné de sa femme, spor- tive, il remonte très vite la pen- te malgré cinq opérations qu’il appelle “de finition.” En mars dernier, il a représenté la Fran- ce auWoundedWarrior Trial, à Camp Pendleton aux États-Unis, une compétition qui réunit les blessés de guerre. Il y a rem- porté une médaille d’argent et le bronze en course à vélo et 100m sprint. Il deviendramême vice-champion du monde de duathlon en octobre dernier à Nancy. Avec un entraînement hebdo- madaire de 12 heures à 20 heures par semaine, David est devenu le porte-drapeau régional de l’association des “Gueules cas- sées” qui l’aide financièrement. Son régiment lui alloue des plages horaires afin qu’il puis- se s’entraîner correctement. Si sa vie est différente d’avant, l’adjudant la juge “plus riche.” Son souhait n’est pas de semettre en avant mais “montrer aux bles- sés qu’il y a des choses à faire.” Le militaire s’est fixé un objec- tif : participer aux Jeux para- lympiques de Rio. Pas de dou- te : l’adjudant est un combattant. E.Ch.

David Travadon, blessé de guerre, est

aujourd’hui le porte-drapeau du sport paralympique

militaire français.

LOGEMENT

Une initiative originale Il propose de louer gratuitement ses appartements… Propriétaire, Bernard Vieille a écrit à trois

L a ministre du Logement se creu- se la tête pour offrir un toit à tous les Français en hiver. C’est sa mission, son combat. Elle l’a rappelé dans ses vœux le 21 janvier dernier. Bizarrement, lorsqu’une solution concrète et originale arrive sur son bureau, aucune réponse ! Cette solu- reprises à la ministre du Logement Cécile Duflot. Il propose de louer gra- tuitement ses logements en hiver afin que des per- sonnes ne dorment plus dans la rue. Seule condi- tion : que l’État se porte garant. Lettre morte jusqu’à présent.

durant l’hiver. Il l’a proposé à trois reprises à la ministre du Logement par envoi d’une lettre recommandée. La première le 7 novembre, puis le 16 octobre et enfin le 5 décembre. Ses lettres recommandées n’ont pas trou- vé d’écho. Florilège de la dernière : “Je me pro- pose d’ouvrir le ou les appartements dont je suis propriétaire, non occupés durant l’hiver, sous condition que vous m’apportiez la garantie totale que ce(s) logement(s) me soient restitués au prin- temps dans des conditions d’état et de salubrité au moins identique qu’au moment de l’installation, et que les frais de charge (eau, électricité) me soient remboursés et que l’on prenne des dispositions afin que le compor- tement de “casseur” soit lourdement sanctionné.” Au-delà de son caractère altruiste, Bernard Vieille veut créer le débat. Lassé d’avoir à réparer à ses frais des appartements fracassés, sans comp- ter les impayés par des locataires peu scrupuleux, il veut prouver que les propriétaires ne sont pas tous véreux et qu’ils ont parfois plus de devoirs que de droits. Selon lui, ces personnes ont trimé pour construire un capital que “d’autres ont saccagé sans res- pecter les règles de société.” Il en par- le en connaissance de cause : un de ses locataires ne l’a jamais payé et lui a rendu un appartement version “por- cherie” dit-il. “Je peux comprendre que quelqu’un ait des soucis financiers mais je ne comprends pas la dégra- dation” poursuit-il. Sa plainte pour dégradation volontaire a d’ailleurs été

déboutée par le procureur de la Répu- blique. Si des assurances existent, elles couvrent rarement tous les dom- mages. Bernard Vieille imagine alors un principe, qui devrait faire réagir les associations de droit au Logement : “Que l’on fiche les casseurs comme l’on fiche aujourd’hui une personne qui a fait un excès de vitesse au volant.” Le débat est lancé…

Un appartement vide durant l’hiver, ce propriétaire du Doubs propose de le louer gra- tuitement à condition que l’État se porte garant.

tion, c’est Bernard Vieille qui la lui offre. Cet habitant de Mami- rolle, chef d’entreprise d’une société de maté- riaux à la retraite basée à Étalans, frappe un grand coup. À l’heure où le ministère tape sur les “propriétaires voyous” considérés com- me des marchands de sommeil, lui se dit prêt à offrir un ou plusieurs de ses logements vides

Ficher les locataires casseurs.

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