La Presse Pontissalienne 148 - Février 2012

DOSSIER

La Presse Pontissalienne n° 148 - Février 2012

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COMMENTAIRE

Jacques-André Tschoumy

“Nous sommes condamnés à imaginer un co-développement” Président du Forum Transfrontalier et responsable de projets à la Maison de l’Europe transjurassienne, Jacques-André Tschoumy défend la création d’une grande région qui réunirait la Franche-Comté et l’Arc Jurassien. Il dit pourquoi.

Jacques- André

Tschoumy : “En France, le pouvoir central qui mute les gens pose de réelles diffcultés.”

L a Presse Pontissalienne: Dans le cadre du ForumTransfrontalier, vous défen- dez l’intérêt d’envisager le rappro- chement entre la Franche-Comté et l’Arc Jurassien. Pourquoi? Jacques-André Tschoumy : La Franche- Comté et l’Arc Jurassien sont dans une situation de Finistère, vu de Paris pour la première, et de l’axe central Zurich, Berne, Genève pour le second. Nous avons l’un et l’autre une mar- ginalité commune. Il ne faut pas pleu- rer chacun dans son coin, mais au contraire mettre nos faiblesses ensemble pour en faire des forces. La Franche-Comté n’est pas la Côte d’Azur comme l’Arc Jurassien n’est pas l’Oberland Bernois, mais nous avons chacun des atouts, industriels entre autres, à faire valoir. Nous sommes condamnés à imaginer un co-déve- loppement. L.P.P. : Des Suisses et des Français ne voient pas l’intérêt d’un rapprochement. Que leur

répondez-vous ? J.-A.T.: Nous sommes de jeunes Suisses! La fondation du canton de Neuchâ- tel date de 1848. Pendant six siècles, nous avons appartenu à différents comtés comme le comté de Bourgogne. Si l’on regarde le passé, ce sont les Français et les Allemands qui ont fait notre histoire. La mentalité populai- re a oublié ces épisodes. Nous sommes

qu’il y a un siècle, les relations entre nos deux territoires étaient étroites. Elles allaient au-delà d’échanges éco- nomiques forts, puisque souvent, les gens se mariaient. L.P.P. : Il y a beaucoup de similitudes, mais tout reste à faire n’est-ce pas ? J.-A.T.: Nous avons beaucoup de points communs : une même frontière lin- guistique, le même esprit frondeur, le même génie de manufacture, la même culture de l’utopie, des échanges culturels riches. La différence majeu- re entre nos deux pays, c’est qu’en Suisse le pouvoir décisionnel est proche, alors qu’il est éloigné en Fran- ce. Nous avons les meilleurs contacts

qui soient avec la préfecture de Besan- çon, mais votre pouvoir central qui mute les gens pose de réelles diffi- cultés pour construire un projet trans- frontalier. À chaque fois nous devons repartir de zéro avec de nouveaux interlocuteurs. C’est tuant et décou- rageant. L.P.P.: Peut-on sérieusement espérer la créa- tion d’une région transfrontalière ? J.-A.T. : Nous sommes actuellement dans une période de transition entre un inventaire d’actions ponctuelles et isolées, voulues par des personnes ou des groupes seuls qui pensent que cette frontière n’a plus de sens, et des étapes à franchir pour arriver à une

production de projets communs par- tagés de part et d’autre de la fron- tière, financés, suivis. La troisième et dernière étape serait de créer une région transfrontalière entre la Franche-Comté et l’Arc Jurassien ani- mée par une gouvernance bilatérale et dotée d’une délégation de compé- tences dans des domaines identifiés. C’est un but ultime. Je rappelle qu’il y a 130 régions transfrontalières en Europe, celle de Bâle-Mulhouse en est une. Je sens queMarie-Guite Dufay (présidente de Région) et Pascal Brou- lis (chef des relations extérieures du canton de Vaud) veulent faire avan- cer les choses. Propos recueillis par T.C.

en 2012, à deux ans près cela fera 100 ans que les relations entre l’Arc Jurassien et la Franche-Com- té ont été interrom- pues pour trois causes : les deux guerres mondiales et le positionnement de nos pays respectifs face à l’Union Euro- péenne. Ces trois évé- nements nous ont mis dos à dos alors

“Beaucoup de points communs.”

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