La Presse Pontissalienne 148 - Février 2012

DOSSIER

La Presse Pontissalienne n° 148 - Février 2012 21

CONSOMMATION Un renvoi d’ascenseur Les restaurants locaux ignorés des frontaliers L’hôtel Bellevue situé au bord du lac de Joux part en croisade contre les restaurants d’entreprise et convie les frontaliers à dépenser aussi là où ils gagnent leurs salaires.

“O n souhaiterait que les frontaliers participent davantage au main- tien de l’économie loca- le” , lance Daniel Leuenberger qui tient l’hôtel Bellevue avec son épouse française Dalila. Le couple n’est pas spécialement vindi- catif envers les frontaliers. Certains travaillent d’ailleurs dans leur éta- blissement. Les métiers de l’hôtellerie avec leurs contraintes horaires pâtis- sent toujours d’un manque d’attracti- vité en Suisse comme en France. Si le renchérissement du franc suisse par rapport à l’euro n’incite pas les touristes français à consommer suis- se, il favorise en revanche une certai- ne paix salariale avec les frontaliers. Sur les milliers qui passent quoti- diennement la frontière, très peu vien- nent déjeuner à l’hôtel Bellevue. “Cela nous semblerait logique qu’ils dépen- sent un peu plus leur argent à l’endroit où ils gagnent leur salaire. Ce n’est pas tant une question de prix. Chez nous, le menu du jour est à 18 francs suisses.” Daniel et Dalila Leuenberger en veu- lent surtout aux groupes horlogers de

la vallée qui rivalisent d’avantages sociaux pour conserver leur main- d’œuvre. Exemple chez Jaeger- LeCoultre qui a ouvert un restaurant d’entreprise où l’on sert 300 repas par jour. “Du coup, la clientèle en prove- nance de cette entreprise a diminué de 50 %. Certains restaurateurs dans la vallée commencent à tirer la langue” , observe Daniel Leuenberger. Sitôt informé que le groupe Swatch (entreprises Bréguet, Blancpain, Fran- çois Golay, ETA…) avait l’intention d’ouvrir un autre restaurant d’entre- prise dans la vallée, le couple est mon- té au créneau en sollicitant à l’époque directement Nicolas Hayek. “On a réus- si à faire plier le Swatch Group qui emploie 1 500 à 2 000 personnes sur la vallée. Ils ont prévu de mettre en pla-

Le dynamisme est aussi touristique Avec son lac, ses montagnes et ses infrastructures, la vallée de Joux res- te une belle destination touristique. “On enregistre une augmentation régu- lière des nuitées depuis dix ans” , com- mente Denis Waser, le directeur du Centre Sportif. Les Suisses repré- sentent 60 % de la clientèle touris- tique. Lʼenvolée du franc suisse par rapport à lʼeuro nʼa donc pas trop péna- lisé les opérateurs touristiques. “On fonctionne très bien avec le tourisme de mai à septembre” , confirme Daniel Leuenberger.

ce des tickets restaurants même si l’on n’a toujours pas eu de nouvelles sur ce projet. Avec les restaurants d’entre- prises, les frontaliers vivent en vase clos.” L’hôtel Bellevue n’est pas franchement une cantine. Cet établissement de 200 couverts fonctionne davantage avec les touristes et la clientèle affaire. Il n’empêche. “Le menu du jour n’est pas la priorité mais cela permet de confor- ter des emplois. On arrêtera la formu- le dès qu’on serviramoins de vingt plats du jour car ce n’est pas rentable.” Les restaurateurs locaux craignent que la vallée de Joux ne devienne qu’un site de production industrielle. “La création d’autres restaurants d’entre- prises nous condamnerait presque à n’ouvrir qu’en été” , conclut l’hôtelier.

“On a perdu 50 % de la clientèle frontalière suite à l’ouverture du restaurant d’entreprise de Jaeger-LeCoultre” explique Daniel Leuenberger de l’hôtel Bellevue.

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