La Presse Pontissalienne 141 - Juillet 2011

LA PAGE DU FRONTALIER

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La Presse Pontissalienne n° 141 - Juillet 2011

LA RIVIÈRE-DRUGEON Plus de vie de famille Stop à la Suisse ! Après 9 ans en Suisse, Nicolas Pernelle ne supportait plus les contraintes du travail frontalier. Il cherche à se mettre à son compte en France. Pas évident non plus.

Après la Suisse, Nicolas Pernelle tente de se mettre à son

L’ argent ne fait pas le bon- heur. Chef d’atelier dans un centre d’entretien auto- mobile en Suisse, Nicolas Per- nelle avait comme on dit une bonne situation. Il disposait de cette reconnaissance profes- sionnelle qui vous assure un avenir serein.Mais pour en arri- ver là, que de sacrifices, que de temps passé loin de chez lui sans voir grandir son fils. “À 20 ans, ça passe, à 35 ans ça devient plus délicat” dit-il. Originaire de Bonlieu dans le Jura, ce mécanicien de forma- tion a “atterri” dans le Haut- Doubs “pour les nanas” , avoue- t-il en souriant. Il trouve un emploi dans ses cordes, part ensuite faire le cuistot à

jour ou l’autre vivre dans le Lot. Comme quoi, on peut quitter la Suisse et aussi le Haut-Doubs. “ On se plaît beaucoup à La Riviè- re-Drugeon où l’on a reçu un très bon accueil” , tient aussi à sou- ligner Nicolas.Tout de même… F.C.

heures de trajet.” Plus le goût du travail, l’impression de passer à côté de l’essentiel, Nicolas Pernelle finit par jeter l’éponge l’été dernier. “J’étais devenu de plus en plus terne comme me le disait mon chef avec qui j’ai toujours tra- vaillé.” Et l’argent dans tout ça ? Nicolas a toujours été vigilant de ce côté-là. La folie des gran- deurs, on ne connaît pas dans la famille Pernelle qui vit dans une petite maison à La Riviè- re-Drugeon. “Je ne suis pas tom- bé dans le train de vie du fron- talier dépensier. Même pour les emprunts, j’ai raisonné comme si j’étais un ouvrier français.” Pas de dépendance. La Suisse n’était pas une finalité en soi. Nicolas Pernelle a toujours eu le projet de vivre et travailler en France. Depuis son rapa- triement côté France, il cherche à monter sa propre structure, de préférence en lien avec la menuiserie. “J’essaie de me posi- tionner dans la construction d’abris, de petits chalets en bois et dans la rénovation de mobi- lier et de parquets. Ce n’est pas facile de trouver la formule adé- quate.” L’ancien frontalier qui ne touche plus que la moitié de son reve- nu découvre ou redécouvre la réalité des fins de mois tendues. “On continue à rembourser des prêts en francs suisses. Avec l’envolée des cours, on est un peu bloqué dans nos projets” avoue- t-il. La famille rêve de partir un

compte dans le travail du bois.

SOCIAL

Jusqu’à 8 semaines

Quatre, cinq, six semaines de vacances par an ? Les travailleurs frontaliers sont-ils mieux lotis que les salariés de France en matière de congés payés ? Le cadre légal autorise quatre semaines, mais il est souvent dépassé.

Majorque d’où il revient illico pour embrayer sur la Suisse en 2001. “Au bout de 9 ans, j’avais le sentiment d’avoir fait le tour du job. J’avais envie d’entreprendre de nouveaux chal- lenges.” Les déplacements, 2 heures de tra- jet quotidien, lui pèsent aussi. “Sur l’année, ça représente 2,5 mois de travail supplémentaire si on compte en

L’impression de passer à côté de l’essentiel.

le cadre rigide de la loi n’est pas immuable. La loi fédérale suisse fixe à quatre semaines de congés payés et cinq semaines avant l’âge de vingt ans. Mais “la plupart des gens qui travaillent en Suisse sont soumis à une C.C.T. (convention collective de travail). Plus de 2 mil- lions sur les 4 millions de travailleurs. Et la plupart des C.C.T. sont meilleures que le cadre légal” explique Nico Lutz, co-responsable du département communication au syndicat suisse Unia. Dans l’industrie horlogère par exemple, les salariés ont droit à 5 semaines de vacances. Les apprentis sont enco- re mieux lotis : 7 semaines quand ils sont en première année, 6 semaines en deuxième année. Au-delà de 50 ans, les horlogers ont droit à 6 semaines également. D’autres branches sont encore mieux loties. La C.C.T. du groupe La Coop, le numéro 2 de la distribution en Suisse, offre 7 semaines à ses salariés au-delà de 60 ans, et même 8 semaines pour ses salariés de 63 ans et plus.Autre exemple : dans le secteur de la construction, les salariés ont 5 semaines dès l’âge de 50 ans. Malgré cette souplesse, on est quand même loin du sys- tème français qui, depuis l’instauration des 35 heures,

T ravailler de l’autre côté de la frontière, beaucoup en rêvent et franchissent le pas, malgré les contraintes notamment liées aux trajets et au coût de la pro- tection sociale. Mais les salaires souvent bien supérieurs à ceux pratiqués en France et la conjoncture actuelle de l’industrie suisse attirent encore de nombreux travailleurs. Y vont-ils aussi pour le nombre de semaines de vacances ? Pas vraiment, même si, contrairement aux apparences,

permet à certains salariés de cumuler, avec les R.T.T., jusqu’à 8, 9 oumême 12 semaines de congés dans certains métiers (sans même parler de l’Éducation nationale). Quant à la durée hebdomadaire de travail, côté suisse, le cadre légal est plus que sévè- re : le volume peut monter jusqu’à 54 heures. Mais là encore, dans la réalité, le système est beaucoup moins sévère. “Dans la plu- part des C.C.T., les gens travaillent de 40 à 42 heures par semaine” poursuit Nico Lutz. Conclusion, sur l’aspect vacances et temps de travail, avantage France tout de même. J.-F.H.

La Coop offre 7 semaines.

Les travailleurs frontaliers, ont, à la base, 4 semaines de vacances par an.

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