La Presse Pontissalienne 141 - Juillet 2011

ÉCONOMIE

La Presse Pontissalienne n° 141 - Juillet 2011

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BÂTIMENT Le nouveau président “Le phénomène des prix bas a atteint une limite” L’entrepreneur Pierre Genzi vient de prendre ses fonctions à la tête de la Fédération Française du Bâtiment et des T.P. du Doubs. Il succède au Pontissalien Alain Boissière.

Pierre Genzi succède au Pontissalien Alain Boissière à la tête de la F.F.B. du Doubs.

L a Presse Pontissalienne : Le bâtiment et les travaux publics sont-ils sortis de la crise ? Pierre Genzi : Je ne pense pas qu’on ait encore sorti la tête de l’eau. Les trois dernières années n’ont pas été bonnes. La reprise semble plus marquée dans l’industrie qui est en train de se redonner un outil de travail, un pont de trésorerie mais l’investissement du clos couvert n’est pas enco- re à l’ordre du jour pour les entre- prises industrielles. Si bien que notre secteur d’activité n’a pas encore redémarré. L.P.P. : L’inquiétude demeure ? P.G. : J’annonce que 2011 sera encore difficile, c’est clair. Avec d’autres facteurs comme l’évolution des taux d’intérêt, la croissance limitée de la Fran- ce, des dispositifs fiscaux en baisse et l’O.C.D.E. qui se met à contester le principe de la T.V.A. à 5,5 %, les signes ne sont pas positifs. Nous n’avons pas encore sorti la tête de l’eau mal- gré une légère amélioration du secteur du logement. Ce qui nous

Malgré des permis de construi- re autorisés, tous les chantiers n’ont pas démarré. Autre élé- ment : nous sommes dans une année préélectorale. Dans ces périodes-là, les investisseurs sont dans l’attentisme, ils atten- dent de voir ce qui est suscep- tible de se passer, à quelle sau- ce ils vont être mangés. La F.F.B. prépare un livre blanc de pro- positions que l’on transmettra à tous les candidats. L.P.P. : À part les soucis de conjonc- ture, quels sont vos autres sujets de préoccupation à la F.F.B. ? P.G. : Un des gros soucis actuels reste les vols sur chantier, un phénomène qui s’aggrave. Avec des prix des matières premières à plusieurs milliers d’euros la tonne, c’est de pire en pire. Et non seulement nos entreprises sont confrontées à des vols de matériaux, mais désormais, on assiste à des vols d’appareillages. On voit des chantiers où on démonte par exemple les salles de bains ! Le vol de matériaux représenterait selon nos calculs,

inquiète surtout, c’est la situa- tion financière des entreprises. Plusieurs entreprises du Doubs ont mis la clé sous la porte depuis le début de l’année. L.P.P. : Vous évoquez le logement, qui a été poussé par certains dispositifs comme Scellier : ce secteur d’activité a-t-il vraiment redémarré ? P.G. : Entre le 31 mars 2010 et le 31 mars 2011, 3 450 loge- ments ont été autorisés dans le Doubs (permis de construire) et 3 628 ont commencé. C’est une augmentation de 27,6%. Concer- nant les locaux industriels, com- merciaux et de bureaux,

1 % du chiffre d’affaires des entreprises du bâtiment, c’est énorme. Nos parlementaires commencent à se pencher sur cette question. L’idée est d’obtenir un amendement qui interdise les règlements en espèces en cas de transaction avec les ache- teurs de métaux et ces tran- sactions seraient désormais sou- mises à déclarations fiscales. Un exemple récent : mon entre- prise a réalisé le chantier de gros œuvre du nouveau musée Courbet à Ornans. On a été obli- gés de mettre un gardien jour et nuit et samedi dimanche pour surveiller le chantier. Et bien sûr, toutes ces dépenses n’ont pas été répercutées dans nos prix. C’est un vrai sujet de

cière des entreprises se dégra- de gravement.Alors qu’enmême temps le prix des matériaux ne baisse pas, les prix de l’énergie non plus, les salaires non plus et que les délais de paiement ont baissé du fait de la loi L.M.E. Ce cercle vicieux est très dan- gereux. Un autre sujet sur lequel nous allons travailler aussi cette année, c’est la sécurité au tra- vail. Il faut savoir que les acci- dents de la route restent la pre- mière cause d’accidents du travail dans nos métiers. Nous réfléchissons à des campagnes de sensibilisation et à un pro- gramme de formation à desti- nation de nos salariés. Propos recueillis par J.-F.H.

réflexion actuellement au sein de notre fédération. L.P.P. : D’autres sujets de préoccupa- tion ? P.G. : Le sujet majeur lié à la cri- se que le bâtiment traverse depuis deux ans, c’est le phé- nomène des prix bas. Avec la conjoncture qui s’est dégradée, les choses empirent et ont atteint une limite. En gros œuvre par exemple, on était habitués à avoir 12 ou 13 mois de carnet de commandes. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. La préoccupa- tion des chefs d’entreprise est légitimement de préserver l’outil et le personnel. Conséquence : on arrive à des prix tellement aberrants que la situation finan-

216 000 m 2 ont été autorisés, soit + 12,5 %, et 164 500 ont démarré, soit + 7,2 %. L’activité a certes redémar- ré mais on sent bien que les investisseurs sont frileux.

“Les vols sur chantier s’aggravent.”

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