La Presse Pontissalienne 138 - Avril 2011

L’ÉVÉNEMENT

La Presse Pontissalienne n° 138 - Avril 2011

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RECHERCHES Déjà dans les années soixante Pontarlier, la cuve à pétrole Économisez l’énergie, renouvelez-la, ne gaspillez pas ! Ces mots que l’on vous rabâche sans cesse perdent de leur valeur à l’heure où le Haut-Doubs pourrait délivrer des énergies fossiles. occasionnant un “buzz” médiatique. Mais contrairement à ce qui a été annoncé, la volonté première des compagnies pétrolières n’est pas d’exploiter le fameux gaz de schiste, dangereux pour l’environnement, mais bien de chercher du pétrole ou du gaz dits conventionnels, moins coûteux et plus faciles à extraire du sous-sol. La Presse Pontissalienne a creusé un sujet sensible. HAUT-DOUBS, LA RUÉE VERS L’OR NOIR L'augmentation du prix du pétrole aiguise l’appétit des pétroliers venus chercher de nouveaux gisements dans le Haut-Doubs et en Suisse voisine. Une compagnie pétrolière anglaise a obtenu une concession pour prospecter des terrains historiquement prometteurs sur une zone de 1 470 km 2 autour de Pontarlier. L’annonce a été révélée par les écologistes du Haut-Doubs

L e Haut-Doubs, futur Koweït ou Dallas à la sauce française ? L’image est forte, celle de voir un jour d’immenses tours de forage alignées dans les environs de Pontarlier, Sainte-Colombe, du Mont d’Or, du Laveron ou au pied du Jura suisse, retirant de notre “terre” du pétrole ou du gaz. Et pourtant, le sous- sol jurassien renferme bel et bien ce fameux or noir présent également dans le bassin parisien, en Alsace ou en Aquitaine. Pour retrouver la preuve indéniable de cette présence, direction le musée de géologie de Lausanne où une fiole de pétrole - recueilli à la surface d’un marais près d’Orbe en 1912 - est pré- cieusement conservée. En 1962, plus de 100 tonnes de brut d’excellente qua- lité ont été récoltées à Essertines-sur- Yverdon, en Suisse voisine. Dans le même temps, le sous-sol duHaut-Doubs s’avérait moins productif après les explorations menées dans les années Les forages de reconnaissance réalisés dans le Haut-Doubs Le plus ancien forage de reconnais- sance est celui de Sainte-Colombe. Cinq sites ont déjà été la cible des compagnies pétrolières mais aucun puits de la Haute-Chaîne nʼa délivré le moindre litre de pétrole. Voici leur localisation : Essavilly (vers Mignovillard) en 1964, - 2 067 m Mont du Laveron (Forêt de Migno- villard) en 1959, - 2 485 m Risoux (Chapelle-des-Bois) en 1960,, - 1 958 m Châtelblanc en 1978, - 2 672 m Toillon (Bief-des-Maisons) en 1958, - 1 573 m

vingt puis dans les années soixante à Sainte-Colombe ou dans le Risoux. Le seul forage “productif” est le puits de Valempoulières (Jura) qui a produit 85 millions de m 3 de gaz entre 1961 et 1983 (forage à - 1 250 m). Maurice Saillard, le maire actuel de Valem- poulières (217 habitants), s’en souvient parfaitement : “Aujourd’hui, on ne voit

Les huit puits de Valempoulières ont représenté 0,5 % de la production fran- çaise. Ils ont cessé de produire faute de rentabilité, la commune n’a récu- péré aucune contrepartie financière. Aujourd’hui, les pétroliers reviennent à la charge pour diverses raisons : à commencer par le prix du pétrole. À 70 dollars le baril (il est environ à 115 dollars actuellement), il devient rentable d’investir pour en trouver, “même en quantité limitée.” Parallè- lement, les techniques de pompage se sont beaucoup améliorées, de même que les méthodes de prospection. Le forage demeurant l’étape la plus coû- teuse - plusieurs dizaines de millions d’euros pour atteindre 5 kilomètres de profondeur - les compagnies se basent sur des indices toujours plus fiables avant de creuser. Elles prennent sur- tout moins de risques qu’auparavant lorsqu’elles faisaient appel à des sour- ciers ! Des “camions-vibreurs” pourraient

un déni de démocratie, disent les Verts. Le gouvernement et les compagnies pétrolières veulent passer coûte que coûte et le moyen le plus efficace, c’est la discrétion. Malheureusement, le gouvernement s’est déjà engagé, en notre nom !” Pour rassurer, le préfet de Franche- Comté a rappelé que cet accord déli- vré à la compagnie pétrolière ne per- mettait en aucun cas l’exploitation. Avant de remplir son réservoir de pétro- le “made in Haut-Doubs”, de l’eau devrait encore couler sous les ponts. Heureusement. E.Ch. Le chiffre 1,1million d’euros Cʼ est le montant versé par la com- pagnie Celtic Energy Petroleum à lʼÉtat français pour obtenir cette conces- sion de 5 ans lui permettant dʼexplorer le sous-sol du Haut-Doubs sur une sur- face de 1 470 km 2 . Ce permis est déli- vré par le ministère de lʼÉcologie. Il est paru au Journal officiel le 30 septembre 2010. Les travux sont suspendus par le Premier ministre François Fillon qui a prolongé le moratoire sur la recherche et le forage de gaz de schiste L'interdiction de recherche et de forage expirait jus- qu'à présent à la mi-avril.

débarquer sur nos routes du Doubs, technique permettant d’obtenir des échographies du sous-sol. Une tech- nique infaillible paraît-il. Officiellement, la compagnie Celtic Energy Petroleum a obtenu des per- mis d’explorationminiers pour “recher- cher du pétrole ou du gaz de houille”, permis délivré par l’ancien ministre de l’Écologie Jean-Louis Borloo. En pleine période de polémique sur le gaz de schiste, processus nécessitant l’apport d’eau pour récupérer le gaz et conduisant à une pollution de la nap- pe phréatique, cette annonce de conces- sion délivrée a mis de l’eau dans le gaz. Europe Ecologie-Les Verts et la section du parti socialiste du Haut- Doubs sont montés au créneau, dénon- çant l’exploitation de gaz de schiste annoncée à Pontarlier. Même le séna- teur Claude Jeannerot a interpellé le préfet en lui demandant des garanties tout en lui disant qu’il “s’opposerait à toute explorationmenée dans ce cadre.” Les élus ont-ils crié au loup trop vite ? Peut-être à en croire un géologue bison- tin. Il n’empêche, la méthode utilisée par l’État paraît cavalière : aucun mai- re, aucun président de communauté de communes n’a été informé sur ce permis d’exploration accordé. Le minis- tère se défend d’avoir accordé le pré- cieux sésame (lire le zoom) dans le dos de tous. Motif : il était clairement indi- qué sur le site Internet, donc consul- table par tous. Un argument contesté par la section du Haut-Doubs d’Europe Ecologie-Les Verts (E.E.L.V.) : “C’est

plus rien. Jusqu’à 20 personnes ont travaillé ici avant la fermeture dans les années quatre- vingt.” Valempoulières avait fait la une des médias en 1966 à la sui- te d’une fuite de gaz consécutive à une mau- vaise manœuvre : “L'électricité au village avait été coupée par peur d’une explosion. On entendait ronfler la terre mais il n’y avait rien eu” précise l’édile.

“Permis signé par Jean-Louis Borloo.”

Voici la zone d’exploration accordée à la société pétrolière par l’État français dans le Haut-Doubs. Elle a encore quatre ans pour analyser le terrain.

Renseignements : www.behp.net ou www.developpement-durable.gouv.fr/Aspects-geologiques.html

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