La Presse Pontissalienne 135 - Janvier 2011

L’INTERVIEW DU MOIS

La Presse Pontissalienne n° 135 - Janvier 2011

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Parenthèse Nous entrons dans une période de dix- huit mois au cours desquels la séréni- té des débats autour des orientations politiques du pays et plus proche, de nos territoires, sera polluée par la poli- tique au sens étriqué du terme. Dès mars, les élections cantonales donne- ront le feu vert au marathon électoral. Dans le Haut-Doubs, lʼenjeu est de taille, non pour lʼavenir de notre terri- toire mais pour la répartition des forces entre une gauche qui tentera dʼasseoir encore plus sa majorité au Départe- ment et une droite qui sʼéchinera à reconquérir les sièges perdus en 2004. Pour le Haut-Doubiste lambda , bien sûr que ces échéances électorales ne changeront en rien son quotidien. Sʼensuivront dans certains départe- ments des sénatoriales en septembre, puis la présidentielle de mai 2012 avant de terminer à bout de souffle par les législatives un mois plus tard. Le tout, dès ce début dʼannée 2011, sera obs- trué par lʼinterminable psychodrame autour des primaires à gauche qui sous couvert dʼexercice paroxystique de démocratie pourrait tourner au final à un nouveau fiasco, et les querelles lan- cinantes entre sarkozystes et post-sar- kozystes. Bref, autant de sujets qui passionnent les foules… Mais qui ont néanmoins le mérite de masquer les véritables problèmes du pays et dʼocculter les enjeux majeurs de la France de demain. Que voit-on au final au cours dʼannées préélectorales sinon unemise entre parenthèses des grandes ambitions et des projets structurants pour les territoires ? Rien dʼambitieux ne sera en effet lancé, ni dans le Doubs ni en Franche-Comté ni même en Fran- ce. Les années préélectorales, cʼest aussi le temps des grands renonce- ments, celui dʼun Manuel Valls par exemple qui tente de se faire une pla- ce sous les projecteurs pour se démar- quer de ses amis de toujours, celui aus- si des dangereuses opérations de récupération des électorats perdus. La droite ne manquera pas par exemple de remettre au cœur des débats lʼinsupportable question de lʼinsécurité pour ratisser plus large. Lʼextrême-droi- te jouera la surenchère dans le popu- lisme tandis que la gauche de la gauche ressortira le sketch du grand soir. Au final et pour redonner à la France un semblant de ressort dans cette pério- de post-crise, ces longs mois préélec- toraux ne tombent pas forcément bien. J ean-François Hauser Éditorial

PONTARLIER

Produits du terroir “Redonner à l’absinthe ses lettres de noblesse” L’absinthe est sur le point de sortir définitivement du purgatoire. Après 95 ans d’interdiction officielle, l’appellation “absinthe” devrait être à nouveau autorisée au début de l’année prochaine. Les explications de François Guy, le distillateur pontissalien.

Arrière-petit-fils du fondateur Armand Guy, François Guy est le représentant de la quatrième génération de distillateurs.

L a Presse Pontissalienne : Le texte qui vise à abro- ger la loi de 1915 interdisant la dénomination “absinthe” sur les étiquettes est sur le point d’être validé à l’Assemblée Nationale. Qu’est-ce que cela va changer pour vous distillateurs ? François Guy : À la fin des années quatre-vingt, sous l’impulsion du député Vuillaume et pour contrer l’offensive espagnole sur les marchés européens, on a eu la possibilité de produire à nouveau un apé- ritif à base d’absinthe mais à deux conditions : que cette boisson ne titre pas plus de 35 mg de thuyo- ne au litre, la molécule présente dans la plante d’absinthe, et que sur les étiquettes figure la men- tion “spiritueux à base d’absinthe” et non “absinthe”. Après avoir replanté de l’absinthe dans la plaine de l’Arlier, les premiers litres de cette boisson sont sortis en 2001. Mais sur le plan commercial, il a toujours été difficile de faire passer le message avec cette appellation un peu farfelue de “spiritueux à base d’absinthe”. Là, il s’agirait vraiment d’abroger la loi de 1915, c’est-à-dire d’autoriser à nouveau la production d’une boisson qu’on aurait le droit d’appeler “absinthe”. L.P.P. : Depuis dix ans, on a vu sortir tout et n’importe quoi en France en matière de spiritueux à base d’absinthe. Comment vous êtes-vous positionnés ? F.G. : On a en effet été envahis de produits étrangers, plus de 80 sortes en France, dont beaucoup n’avaient rien à voir avec le produit d’origine. On a même vu de l’absinthe sans anis. D’où l’idée qu’on a émise avec le syndicat des producteurs de spiritueux de déposer une demande d’I.G.P. En parallèle, les Suisses qui avaient vu leur législation également modifiée, ont cherché eux aussi à protéger leur absinthe avec une I.G.P. Ayant eu vent de cette volonté suisse, et

Nous gardions l’idée d’un alcool associé aux moments de fête. C’est un apéritif de fête suivi d’un menu extraordinaire. L’absinthe doit rester un produit de convivialité et d’exception. Notre créneau n’est pas non plus de faire ressortir l’aspect sulfureux de l’absinthe. Le créneau facile aurait été de cibler les jeunes avec une absinthe à 75°. On ne l’a pas souhaité. Pour nous, au-delà de 55°, l’absinthe n’a plus aucune vertu gustative. L.P.P. : L’activité continue-t-elle à progresser malgré toutes les campagnes de prévention contre l’alcool ? F.G. : La prévention contre les effets de l’alcool, nous la soutenons. Nous prônons une consommation res- pectueuse en incitant par exemple les jeunes à consommer plus par dégustation que par ivrogne- rie ou en considérant l’alcool comme un simulacre de drogue. Notre politique consiste à axer notre production sur le goût et la qualité plutôt que sur la politique de prix. Nous continuons à progresser gentiment. Les liqueurs et les eaux-de-vie sont en baisse, mais l’absinthe et le Pontarlier Anis conti- nuent leur progression, tous les ans. C’est aussi grâce au fait que nous fassions la promotion de nos produits bien au-delà de la région désormais. Nos produits sont aussi reconnus à travers les trois médailles d’or de suite obtenues à Paris. L.P.P. : En chiffre, que pèse la distillerie Guy ? F.G. : Nous employons 12 salariés pour un chiffre d’affaires de 5,6 millions d’euros. Tous les ans, on enregistre une progression de 2 à 3 %. Un petit bémol cependant pour les fêtes où nous avons enre- gistré une légère baisse des volumes par rapport aux années précédentes. Propos recueillis par J.-F.H.

comme il paraissait beaucoup trop compliqué de mener une démarche commune avec la Suisse, on a tenté de faire bouger les choses en alertant les ministères en vue de l’abrogation de la loi de 1915. Le texte est actuellement en deuxième lecture à l’Assemblée Nationale. Si le texte est validé et que le nom “absinthe” peut à nouveau être utilisé, cela légitimerait le produit que le consommateur achè- te. L’idée est de mettre fin à cette distorsion de concurrence qui permet à certains pays de pouvoir utiliser le terme “absinthe” alors qu’en France on est obligé d’utiliser cette expression farfelue de “spi- ritueux à base d’absinthe”. Cela contribuerait à redonner à l’absinthe ses lettres de noblesse. L.P.P. : Combien êtes-vous de producteurs d’apéritif à base d’absinthe en Franche-Comté ?

F.G. : Nous sommes quatre. Il y a deux producteurs à Fougerolles en Haute-Saône, mon collègue ins- tallé à La Cluse-et-Mijoux, et nous. L.P.P. : Quelle est la production de la dis- tillerie Guy ? F.G. : Nous nous situons entre 20 000 et 22 000 litres par an. Par rapport au Pontarlier Anis, c’est beaucoup moins. Nous produisons environ 450 000 litres de “Pont” par an. L.P.P. : Comment positionnez-vous l’absinthe dans votre stratégie de déve- loppement ? F.G. : L’idée n’est pas d’en faire un produit de grande consommation.

Un chiffre d’affaires de 5,6 millions d’euros.

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Crédits photos : La Presse Pontissalienne, Ville de Pontarlier.

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