La Presse Pontissalienne 112 - Février 2009

Le portrait

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S ECOURS

Sylvie Martin, responsable des pistes de ski à Métabief Métabief a son ange gardien Seule femme en France à gérer la sécurité d’un domaine skiable, Sylvie Martin s’est imposée dans un univers masculin. À Méta- bief, la chef des pistes est respectée. Mais avant de dévaler la pente, elle a dû l’escalader.

L es hommes sont à ses pieds. Ou plutôt à ses skis. Responsable de la sécurité des pistes de Métabief, Sylvie Martin diri- ge 14 pisteurs, 6 chauffeurs dameurs et 1 snow makeur sans compter la sécurité de milliers de skieurs dévalant chaque jour les 44 km de ski alpin du domaine. Une res- ponsabilité avant d’être un défi pour ce petit bout de femme d’environ 1,60 m dont l’originalité est d’être la seule femme en France à sécuriser un domaine skiable. L’été, elle gère les activités touristiques. Posée, Sylvie Martin n’a pas brûlé les étapes.Avant d’accéder à un grade convoité par de nom- breux hommes, elle a patien- té et travaillé pour finalement s’imposer. “J’ai commencé au bas de l’échelle” , lâche-t-elle. Aujourd’hui, elle est en haut. Une vision qui lui permet jus- tement de trouver les mots justes pour évoquer son métier et donner ses ordres. Sylvie l’avoue : les débuts n’ont pas toujours été faciles. “À 26 ans, il fallait que je montre que j’avais le niveau physique…” Elle y est parvenue, ne cachant pas que l’univers machiste ne

connaissances du massif et du métier. Voilà qui est dit. Bref, si elle garde 24 heures sur 24 son talkie-walkie à ses côtés, ce n’est pas un hasard mais une obligation et une “pas- sion.” Sans ce goût pour lamon- tagne, elle aurait lâché. “C’est prenant” , concède la Franc- Comtoise partie un temps à Grenoble avant de revenir tra- vailler à Métabief. Quant à la vie de famille, elle tente de l’adapter à son métier qui l’oblige parfois à se lever d’avalanches.” À Métabief, le souvenir d’une coulée de neige qui avait coûté la vie à une jeu- ne femme dans le secteur de Piquemiette est toujours pré- sent. Dix ans après, l’évocation de ce drame est difficile. Syl- vie Martin ne souhaite pas le commenter, préférant noter que trois tirs préventifs ont été réa- lisés cette année avec des charges explosives. Ce n’est qu’une partie de son boulot qui en recèle d’autres : “Il y a la décision d’abattre ou non des tôt. Très tôt même. “Cela arrive de se réveiller en milieu de nuit pour un plan d’intervention de déclenchement

l’a jamais épargnée. “Même enceinte, j’ai travaillé. Je le vou- lais. Au septième mois de gros- sesse, je descendais encore les skieurs dans les barquettes” , souffle-t-elle amusée.À 45 ans, Sylvie se dit plus forte qu’avant et surtout plus “expérimentée.” Mieux, elle dit n’avoir “plus rien à prouver” même si elle ne manque pas une occasion de retourner sur le terrain, his- toire de montrer et tester ses acquis. “En théorie, je dois pas- ser 50 % de mon temps dans Lorsque certaines femmes pas- sent des heures à choisir le bon tailleur pour se rendre au tra- vail, elle, n’a besoin que de quelques minutes. Son blou- son, sa salopette… et le tour est joué. La chef des pistes s’en amuse : “Ce n’est pas une contrainte. Au contraire, ça me permet de paraître strict (elle rit), et cela évite toute ambi- guïté.” En clair, si elle est arri- vée à ce grade, ce n’est pas grâ- ce à son regard d’un bleu perçant mais grâce à ses mon bureau à régler le travail administratif et l’autre partie sur les pistes. En pratique, je suis davantage au bureau…”

Vingt minutes pour réagir.

Responsable de la sécurité des pistes de Métabief, Sylvie Martin ne quitte jamais son talkie-walkie.

l’hélicoptère de la sécurité civi- le cette saison. “Mais il n’est pas venu…” On ne connaît pas la conséquence. Toujours est- il que la plupart des interven- tions relèvent de la “bobologie”. “Ce sont des entorses, des cou- pures… On a également des traumatismes.” Parfois, elle reçoit les remerciements de skieurs évacués et remis sur pied. “J’ai eu les remerciements d’Américains après une inter- vention. Cela fait toujours plai-

sir.” Lors de l’entretien, son talkie- walkie crépite. Ni une ni deux, elle augmente le volume : “Un skieur est couché sur la piste depuis quelques minutes.” Quelques secondes plus tard, un pisteur est envoyé sur les lieux. La journée peut se pour- suivre… Et Sylvie Martin de continuer à veiller sur le Mont d’Or. À moins que ce ne soit l’inverse ! E.C.

arbres avant la saison, de pla- cer les tapis de protection, d’arrêter un télésiège ou de fer- mer le domaine.” Une ferme- ture complète de la station, Syl- vie a dû la décréter voilà deux ans à la suite d’un fort coup de vent. D’autres décisions ont été prises comme l’évacuation de skieurs bloqués sur un télé- siège. “On a vingt minutes pour réagir dans ce cas” , calcule la responsable qui a également fait appel - par deux fois - à

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