La Presse Bisontine 96 - Février 2009

LE GRAND BESANÇON

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FABRICATION Un seul rescapé Les skis “made in Jura” Au début du XX ème siècle, de nombreux artisans du bois diversifient leur savoir-faire dans le ski. Les rares fabricants qui avaient résisté à l’arrivée du plastique ont périclité, à la seule exception de Vandel à Bois-d’Amont.

Les fabricants jurassiens ont longtemps partici- pé à l’évolution technique, du ski polyvalent tout en bois à fixation libre aux modèles nor-

diques et alpins utilisés aujour- d’hui.

S i les Jurassiens n’ont pas inventé le ski, ils ont su très tôt s’inspirer des premières planches arrivées probablement de Scandinavie. Scénario assez logique car très peu de locaux pouvaient se permettre d’importer des skis de l’étranger. Les arti- sans dubois de lamontagne juras- sienne (menuisiers, charrons, boisseliers) se lancent dans cet- te nouvelle fabrication. On en trouve dans la plupart des vil- lages duHaut-Doubs et duHaut- Jura. Parmi ces pionniers, on trouve par exemple les frères Bonne- ville du côté de La Pesse. Cer-

tains se souviennent peut-être de la marque Retord qui perdu- ra jusque dans les années cin- quante. Les débuts sont assez empiriques. On exploite d’abord les essences résineuses locales. Le sapin bien sûr s’avère vite fra- gile et trop poreux. C’est finale- ment l’utilisation du frêne qui s’impose. Ce bois présente les caractéristiques de solidité, sou- plesse et glisse requises pour un ski. Les lattes sont taillées dans la masse. On cintre les spatules sur une forme en les ayant préa- lablement trempées dans un bain d’eau très chaude. On produit alors un seul type de ski, de très

grande taille et équipé d’une fixa- tion libre. La distinction entre l’alpin et le nordique se fera à partir des années trente à l’époque de la création de ces deux disci- plines au sein de la Fédération Internationale de Ski. Cette époque correspond également aux débuts des plus grandes marques de ski jurassien :Grand- chavin aux Rousses, Lacroix et Vandel à Bois-d’Amont. La pre- mière s’orientera vers le surf des neiges en 1985 puis sera reprise par Rossignol en 1999. Le site de production aux Rousses ferme- ra en 2002. Les skis Lacroix entrent dans la

légende en 1966. Léo Lacroix ter- mine second de la descente des championnats dumonde de Por- tillo avec des skis de la marque familiale, réalisés à sa demande par son cousin Daniel. Le fabri- cant de Bois-d’Amont sera le pre- mier à réussir le virage du plas- tique qui précipita la fin de l’artisanat du ski jurassien. Lacroix sortit même une paire de skis à 1 000 dollars à desti- nation de la jet-set mondiale, de Robert Redford au roi d’Espagne en passant par le président amé-

ricain Gérald Ford. À partir des années quatre-vingt, les pro- blèmes d’enneigement fragilisè- rent l’entreprise qui passa sous le contrôle dugroupeNestlé avant d’être vendu en 1989 à un grou- pement d’investisseurs franco- suisses. Cet inventaire serait incomplet sans évoquer le der- nier fabricant de skis jurassiens, à savoir Vandel. Tout a débuté avec Gabriel Vandel. Ce menui- sier de Bois-d’Amont débute en 1925 une petite production de skis de descente. Il se tourne à partir de 1947 vers le fond qui deviendra la grande spécialité de l’entreprise. Surtout grâce au fils Yvon, inventeur du fameux “F 72”, premier modèle de fond en plastique dont la couleur oran-

ge fluo reste dans toutes les mémoires. Vandel a équipé quelques-uns desmeilleurs skieurs jurassiens. HervéBalland,la référence incon- testée, débuta sur des Vandel. Dans les années quatre-vingt, la production de l’atelier de Bois- d’Amont monte jusqu’à 12 000 paires réalisées par une ving- taine de personnes. L’activité décline ensuite au fur et àmesu- re de l’essoufflement populaire autour de la pratique du fond. Medhi et Loïc,les deux fils d’Yvon, ont néanmoins repris le flam- beau. Ils fabriquent toujours des skis nordiques et ont renoué avec l’alpin en lançant les Vautours, des skis haut de gamme tout en bois.

Zoom “Mont d’Or”, reflet de l’artisanat du ski jurassien La fabrication des skis “Mont d’Or” débute après- guerre dans l’atelier de Gilbert et Raoul Maire, char- rons à Métabief. L’activité perdurera jusqu’en 1970. “I ls ont vécu pauvrement mais comme des seigneurs grâ- ce aux skis” , se souvient Gaby Maire, le fils de Gilbert en évoquant ses souvenirs de jeunesse. À la Libération, on est encore à des années lumière du sport business dans ce village agricole de Métabief. Charles Maire travaille avec ses deux fils Gilbert et Raoul. Le premier est charron, le second forgeron. Histoire de compenser la baisse d’activité hiverna- le, ils se mettent à fabriquer des skis alpins. “Les gens pas- saient commande en vue d’offrir des skis à Noël. Ils ne repar- taient jamais de l’atelier sans avoir bu un coup. Mon père ne comptait pas ses heures et bossait au besoin toute la nuit.” Le plastique n’existait pas. La qualité du ski est d’abord fonc- tion du choix du bois qui sert à sa fabrication. Les frênes uti- lisés sont choisis sur pied, débités chez un scieur puis mis à sécher parfois plusieurs années au grand air. “Ils plongeaient le ski pendant plusieurs heures dans l’eau chaude de la buan- derie puis cintraient la spatule en la coinçant derrière le poê- le à sciure.” Aussi rudimentaire qu’elle paraisse, la technique n’en n’était pas moins efficace. Avec le sens de la débrouillardise propre aux artisans, les deux frères réalisent progressivement l’outillage et les machines adéquats. “Ils installaient la fixation grâce à une mortaise dans laquelle était introduite la plaque de fer repliée ensuite en fonc- tion de la forme de la chaussure.” Au début des années soixante, 250 paires de skis “Mont d’Or” sortent de l’atelier des frères Maire. Les enfants comme les épouses sont mis à contribution quand il s’agit de poser à la main les 100 vis par ski qui maintiennent les carres. “Chaque client était d’abord un ami. À l’époque, ils concevaient le pro- duit ski comme un moyen d’offrir un exutoire à la jeunesse du coin. Cela donnait une ambiance de plaisir assez extraordi- naire” , se souvient Gaby qui n’oublie pas non plus la quanti- té de travail que représentait ce boulot manuel.

250 paires de skis

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“Mont d’or” sortaient de l’atelier Mai- re au début des années soixante.

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