La Presse Bisontine 77 - Mai 2007

La Presse Bisontine n°77 - Mai 2007

DOSSIER

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HISTOIRE De 1837 à 1999 Une saga née il y a plus de 150 ans La sort de l’entreprise Weil est étroitement lié à celui de la même famille, de sa fondation officielle en 1868, jusqu’en 1999, date du premier dépôt de bilan.

À l’embauche, chaque salarié se faisait

remettre un livret d’accueil.

“L es Weil ne sont pas une gran- de lignée industrielle comme les Peugeot, Michelin, Gui- chard ouMulliez qui ont réus- si à survivre malgré les crises, restruc- turations et changements d’activité. Nous ne sommes qu’une simple famille issue de la petite bourgeoisie du XIX ème siècle comme il y en a eu des dizaines de mil- le qui débutèrent à cette époque de la jeune révolution industrielle.” C’est par ces mots que commence le récit - inédit - qu’a écrit BernardWeil alors qu’il venait de transmettre les rênes de l’entrepri- se au début des années quatre-vingt-

dix. La saga Weil, une famille venue d’Al- sace, démarre avec JosephWeil qui s’ins- talle au début des années 1860 avec son épouse à Fraisans (Jura), en tant que commerçant en textiles. C’est là que naissent, en 1866 et en 1868, les deux premiers fils du couple, Henri et Léon. Fraisans était alors un centre sidérur- gique grâce à sa proximité de la forêt de Chaux. Le déclin de l’activité sidé- rurgique oblige le couple Weil à venir s’installer àBesançon au 8, place Labou- rey (actuelle place de la Révolution) où naissent les deux autres fils, Paul en 1873, et Georges en 1874. Après le décès du père fondateur en 1892, les fils décident alors de créer une manufacture pour fabriquer des pèle- rines et des vareuses. L’entreprise s’ins- talle au 13, Grande rue, qui commu- nique avec la place Labourey. Peu après 1901, les frèresWeil font bâtir dans l’ar- rière-cour du 10, Grande rue un bâti- ment de deux étages avec verrières et galeries transversales, et en guise de toit, une des premières terrasses de Besançon. Nous sommes là dans ce qui deviendra quelques décennies plus tard, l’îlot Pasteur, racheté aux Weil par la mairie par préemption dans les années

Vue des usines située dans le quartier Saint- Claude.

dureront pas. “La démographie aurait dû permettre une augmentation impor- tante des ventes de costumes, si les nou- velles générations avaient, comme leurs aînés, adopté ce mode d’habillement” analyse BernardWeil dans son récit. Et bientôt, “la délocalisation deviendra la norme.” Mais grâce à une gestion sai- ne, la société Weil restera bénéficiaire et reste dans le peloton de tête des entre- prises textiles françaises. La saga familiale Weil, c’est aussi une gestion intelligente des successions. “Tous les frères ou cousins ayant été éle- vés dans le sérail, étant tous attelés à un même char, et tirant celui-ci avec pas- sion, les discussions sont parfois très vives” dans la famille avoue M. Weil. Mais “l’entrée de gendres ou de person- nalités étrangères à la famille n’était pas souhaitable dans les réunions directo- riales. Si nous avons pu passer le flam- beau d’une génération à l’autre, c’est que dès leur majorité, profitant de la déco- te due à l’âge des fils, nous avons fait des donations de la nue-propriété des parts.” Ces commentaires ont été écrits audébut des années quatre-vint-dix par un des dirigeants historiques. Neuf ans plus tard, il ne restait plus aucun membre de la famille Weil dans la société. Mais il n’empêche, aujourd’hui, l’esprit Weil hante toujours les locaux presque déserts des vastes bâtiment de la rue de Chaillot.

années cinquante pour que l’on utilise cintres, cartons et chariots de manu- tention” rappelle BernardWeil dans son récit. “Nous payons comptant nos four- nisseurs et cette volonté s’est maintenue jusqu’à ce jour” écrit-il aussi. En 1932, les Weil achètent les établis- sements Julien Jaudel, GérardWeil en prend la direction. Bernard Weil entre bientôt dans l’entreprise familiale en apportant les principes du taylorisme (à la demande des ouvriers). La guerre est une longue parenthèse pour l’entreprise où il reste néanmoins une centaine de personnes à l’effectif. “Lematériel est à bout de souffle, le stock a disparu.” Henri, fils aîné d’Albert, puis Philippe, son deuxième fils, entrent à leur tour dans la société. Lesdeux réseaux Weil et Jaudel écoulent alors des quan- tités de plus enplus importantes de vête- ments. Le babyboom est là, il faut habiller les nouvelles générations. Weil fabrique chaque jour 5 000 pantalons enfants et 8 000 pantalons hommes ! Dans les années cinquante, Didier et Jean-Pier- re intègrent la société. C’est alors que d’autres nouvelles usines bisontines - Rhône-Poulenc et Timex notamment - débauchent à tour de bras. En réponse, Weil crée un atelier à Dole, puis au Creusot. Fidèle à son principe de ne pas emprun- ter, Weil construit d’autres usines dans les années cinquante et soixante : rue deChaillot, enplusieurs phases, et Saint- Claude. Weil ouvre aussi des dépôts à Paris, Lyon…Mais les belles années ne

Un atelier de piquage fabriquant des pantalons.

quatre-vingt-dix (la sui- te est une autre histoi- re). Le fils d’Henri, Albert, développe la partie com- merciale et construit un bâtiment qui donne sur le 14, Grande rue. C’est ensuite Gérard, le fils de Paul né en 1911 qui dès ses 16 ans entre dans l’entreprise com- me apprenti. “L’embal- lage des vêtements fabri- qués est en toile de jute. Il faudra attendre les

Un groupe d’atelier de piquage.

“Nous payons comptant nos fournis- seurs.”

J.-F.H.

L’arbre généalogique Weil, une histoire de famille Tous les garçons de la famille ont intégré la société. Les postes à responsa- bilités se sont répartis entre cousins. Les filles Weil ne géraient pas l’entre- prise. Mais c’est à elles que revenait l’immobilier de l’entreprise. Joseph Weil 1837-1891 Henri Weil Léon Weil Georges Weil Paul Weil 1866-1918 1896-1944 1876-1953 Né en 1874 Albert Weil Gérard Weil Bernard Weil Né en 1898 Né en 1911 Né en 1918 Bertrand Weil - Michel Weil Denis Weil Henri Weil Philippe Weil Jean-Pierre Weil Didier Weil Né en 1926 Né en 1930 Né en 1934 Né en 1936 Patrick Weil

Une salle de presse finale de vêtements.

L’opération de pressing du col.

L’atelier de perforation des cartes électroma- gnétiques.

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