La Presse Bisontine 73 - Janvier 2007

DOSSIER

15

SUISSE Canton de Neuchâtel À Neuchâtel, 180 entreprises attendent de s’implanter Depuis le début de l’année, 70 entreprises étrangères se sont implantées dans le canton de Neuchâtel. 180 seraient sur le point de faire de même. À la clef, des milliers d’emplois dans le biomédical, les microtechniques ou les services.

“Une entreprise qui vient pour faire du “ tax break ” ne nous intéresse pas” , affirme Gérard Lopez, directeur du développement économique de Neuchâtel.

“T out le canton bouge enmême temps en ce moment. Les fêtes de fin d’année seront bonnes” , sourit Gérard Lopez, le directeur du développement économique du canton de Neuchâtel. L’homme a de quoi être heureux. En 2006, 70 entreprises étrangères se sont implantées sur le territoire du canton et 180 dossiers sont actuellement en

cours d’étude. Des chiffres à faire pâlir d’envie la Franche-Comté voisine. Sur- tout que la plupart des projets, qui concernent aussi bien le biomédical, les microtechniques ou les centres de décision, sont d’envergure. Le groupe japonais de machines outils M.O.R.I. Seïki vient ainsi de racheter une entre- prise de 80 salariés au Locle. Il pré- voit de créer 120 nouveaux emplois et

de rapatrier deux lignes de production du Japon dans l’usine helvétique. Le leader mondial de production de vélos professionnels Cervélo vient éga- lement de s’implanter, avec 50 emplois à la clef. Dans le domaine biomédical, c’est Obtech, filiale de l’américain John- son et Johnson, spécialisée dans la pro- duction d’anneaux gastriques, qui s’ins- talle au Locle. Une centaine d’emplois

devraient à termes être créés, 25 le sont déjà. La liste donne le tournis. La ville de Neuchâtel vient aussi d’attirer le siè- ge social d’une banque française, le C.I.A.L. “Pour un beau projet. Dans le canton, c’est la première fois que nous attirons une entreprise de service” , se félicite Gérard Lopez. “On attire des entreprises des États-Unis, d’Asie, d’Al- lemagne et… de Fran- ce.”

Une réussite telle que les services du canton reconnaissent “avoir du mal à suivre. On est obli- gé d’embaucher du per- sonnel pour suivre les dossiers.” Raison de cet engouement, la bonne santé de l’économie suis- se, qui devrait réaliser près de 3%de croissance cette année - contre un peu plus de 2 % pour la France. Neuchâtel comme la plu- part des cantons suisses a aussi mis en place un

INVESTISSEMENT ÉTRANGER Retard Pour attirer les entreprises étrangères, la Franche-Comté se veut plus offensive

Parmi les nouveaux arrivants :

Obtech, Cervélo, C.I.A.L., M.O.R.I. Seïki.

La Franche-Comté peine à intéresser et attirer les entreprises étran- gères. Pour rattraper son retard, l’agence régionale de développement s’est lancée depuis douze mois dans une politique plus offensive de séduction des entreprises potentiellement intéressantes pour la région.

système fiscal attractif : les nouvelles sociétés qui s’implantent dans le can- ton peuvent ainsi être exemptées de l’impôt sur les sociétés au niveau com- munal et fédéral, les niveaux où les impôts sont les plus élevés, pendant dix ans et ce, sur la totalité de leurs bénéfices. Le canton n’est d’ailleurs pas le seul à voir les entreprises affluer. Lors des six premiers mois de l’année, une quin- zaine d’entreprises étrangères - prin- cipalement des sièges sociaux - se sont implantées dans le canton de Vaud, tandis qu’une demi-douzaine de pro- jets étaient à l’étude. En tout, 1 000 nouveaux emplois devraient être créés dans les services principalement. “Mais une entreprise qui vient pour faire du “ tax break” ne nous intéresse pas. Désor- mais, on mise sur le développement stratégique en visant celles qui vont créer de la valeur ajoutée dans le can- ton. Depuis que nous avons axé notre communication autour de cela, les demandes d’implantations explosent” , reprend Gérard Lopez. “On prépare pour chaque entreprise un plan de sou- tien précis et particulier, et ensuite on les accompagne dans toutes leurs démarches jusque chez le notaire.” Un cabinet d’audit externe vient d’être mandaté pour évaluer l’ensemble des emplois directs et indirects créés sur le canton. Car désormais, Neuchâtel veut parler “emploi”. Et des emplois, le canton et ses 170 000 habitants n’en manquent pas. Car si les entreprises étrangères sont nombreuses à choisir de s’implanter à Neuchâtel, celles déjà présentes ne sont pas en reste. Depuis avril, Baxter a ainsi créé 180 nouveaux emplois, tandis que dans le biomédi- cal, une entreprise américaine déjà implantée au Locle agrandit son site de production pour créer 200 emplois supplémentaires.

“U n des moteurs de l’attractivité d’une région est sa capacité à attirer actifs et entreprises sur son territoire” , affirme l’I.N.S.E.E. en préambule de son étude consacrée à l’attractivité de la Franche-Comté parue en mai dernier. Force est de constater que celle-ci laisse à dési- rer sur le plan international. Au premier jan- vier 2001, selon l’I.N.S.E.E., les entreprises à participation étrangère représentaient moins de 20 % des effectifs de l’industrie en Franche- Comté. Une des régions avec l’Auvergne et la Corse où cette proportion est la plus faible. “La région se distingue par une très faible par- ticipation étrangère dans les investissements industriels, 18 % des investissements contre 38 % en France, soit une différence de près de 100 millions d’euros sur la Franche-Comté accueillait autant de capitaux étrangers en pro- portion que la France” , note l’institut de sta- tistique.

L’Agence Régionale de Développe- ment se met à la chasse aux investis- seurs.

Dans la C.A.G.B., elles sont une trentaine d’en- treprises à avoir des capitaux étrangers, sui- te à des rachats ou par la création de nouvelles filiales d’un groupe international. Au niveau de la provenance des capitaux vient en tête la Suisse - qui concerne neuf entreprises et pas uniquement dans l’horlogerie - suivie des États- Unis. La Franche-Comté passe à l’offensive Dans un contexte international toujours plus concurrentiel, mieux vaut ne pas rester en retrait si on veut attirer à soi des implanta- tions étrangères. “Il faut aller les chercher où elles sont, tout en veillant à rester en relation avec les entreprises présentes dans la région” , reconnaît Monique Gosselin, la chargée de communication de l’agence régionale de déve- loppement, l’A.R.D. Depuis un an, date de la création de la structure, la Région a adopté une nouvelle dynamique. Un changement de stratégie bienvenu pour la Franche-Comté, qui jusque-là avait plutôt tendance à rester passive. La réaction devenait urgente face à des voisins beaucoup plus entreprenants dans ce domaine. “C’est vrai que ce n’était pas une culture forte ici. L’effort est en cours, il faudra du temps. On est en train d’établir une forme de rupture” , reconnaît Denis Baud, vice-pré- sident à la C.A.G.B. Car la concurrence est impitoyable. Précur- seurs, les Suisses mènent déjà depuis plusieurs années une politique volontairement offensi- ve, en n’hésitant pas à démarcher les entre- prises comtoises qui les intéressent. Des sémi- naires d’un jour sont régulièrement organisés dans les villes du Grand Est à destination des chefs d’entreprises français. “C’est très effica- ce. On est reçu par l’ambassadeur de Suisse en France. Puis pendant toute la journée, on vous détaille les avantages fiscaux, la législation du travail, les démarches à faire. Les cantons sont tous représentés, on se propose même de vous aider à trouver un terrain, de vous aider pour tout” , explique un chef d’entreprise qui a par- ticipé il y a quelques années à un séminaire

de promotion de la Suisse à Strasbourg. Et les Suisses sont loin d’être les seuls à appliquer cette politique. Récemment, plusieurs entre- prises de l’agglomération bisontine ont ainsi reçu un mailing de la part de l’Autriche, van- tant les avantages d’une implantation dans le pays : une fiscalité moindre que celle prati- quée en France et des salariés qui ne font jamais grève mettait en avant le document. L’exemple suisse et autrichien Face à cela, que fait la Franche-Comté ? “Pas de mailing . On veut mener des actions plus ciblées, démarcher des entreprises très poin- tues” , reprend Monique Gosselin. Cible privilégiée de la Région, les entreprises de la microtechnique. Lors du dernier salon Micronora, pour la première fois, “on a invité des entreprises qui nous intéressaient pour les courtiser. On leur a organisé une visite de Micro- nora, le laboratoire F.E.M.T.O.-S.T. puis des rencontres avec des industriels déjà implantés à Besançon.” Pour le moment, des premiers contacts auraient été tissés avec plusieurs entreprises étran- gères, dont des allemandes et des anglo- saxonnes. Pour être plus offensive, l’A.R.D. veut désormais mettre en place un “interlo- cuteur unique” , qui oriente les démarches de l’entreprise en recherche d’implantation, com- me cela existe en Suisse, dans les années qui viennent. “Car si vous voulez faire venir un entrepreneur allemand, il faut aussi pouvoir lui trouver un logement, inscrire ses enfants à l’école…” Histoire de lentement rattraper le retard pris face à ses voisins.

En 2007, avec l’ouverture du centre Arté- mis et des “Temis Cen- ter”, près de 200 emplois supplémen- taires

devraient être créés sur Temis.

S.D.

Made with FlippingBook - Online Brochure Maker