La Presse Bisontine 71 - Novembre 2006

38 REPORTAGE

Récit Solène Davesne

24 HEURES AVEC… Le phénomène slam débarque à Besançon Véritable phénomène de société depuis plusieurs mois, le slam, une forme d’expression orale à la croisée de la poé- sie populaire et de la culture hip-hop, existe depuis trois ans à Besançon et rencontre un véritable succès. Même si contrai- rement à d’autres villes, les soirées slam rassemblent essen- tiellement des étudiants et un public jeune.

U n livre à la main, Fran- çois griffonne quelques lignes en vitesse sur une feuille, imperturbable au brouhaha des conversations. Ce soir, ce sera son premier slam. “Je suis venu ici écouter les autres deux ou trois fois. J’ai adoré la forme d’expression, maintenant

j’ai envie de me lancer” , dit-il en levant les yeux de son recueil. Pas totalement rassuré, il figno- le jusqu’au bout son interven- tion. Un petit texte sur les méthodes d’éducation. “Mais franchement, j’ai pas trop confian- ce en moi pour écrire, alors je préfère reprendre des textes super

importants, quitte à les arran- ger à ma façon” , reprend l’étu- diant en histoire aux fines lunettes. “Depuis le début, on a chaque soir aumoins un slameur qui se lance pour la première fois. C’est important pour nous, preu- ve que ce ne sont pas toujours les mêmes” , reprend François Por-

pour y assister. L’entrée est par principe gratuit. “Le slam, c’est démocratique. Tout le monde doit pouvoir y venir, faire ce qu’il veut, dire ce qu’il veut. C’est là que rési- de son succès” , analyse François Portal, 25 ans.

tal, à la tête de l’association Poe- trycité, qui promeut le slam à Besançon. Un jeudi soir par mois, c’est jus- tement soirée slam à Besançon, dans le bar La Crémerie. Le concept est simplissime. On s’ins- crit pour passer devant le micro sur la petite estrade, lire ou dire un texte, n’importe lequel, sur n’importe quoi au gré des inspi- rations. En échange, un écriteau rappelle que pour chaque sla- meur un verre est offert. L’occa- sion de susciter des vocations, le seul enjeu aussi. Ici, pas de com- pétition. Ce soir, ils sont une petite quin- zaine à s’être inscrits. La petite salle, elle, est pleine à craquer

Le premier round est lancé

En quelques mois, ces soirées sont devenues un phénomène de société, popularisé par le slameur Grand Corps Malade et dont les médias se sont emparés. Long- temps marginal, le slam est deve- nu tendance. À Besançon, le phé- nomène existe depuis trois ans. Une rencontre de hasard. Pour fêter leurs dix ans d’existence, les “jeudis de la poésie”, qui fédé- raient un petit groupe de pro- fesseurs, avaient invité Pilote le Hot, un des précurseurs fran- çais, à la médiathèque de Besan- çon. Dans le public, François Portal tombe sous le charme de ce mode d’expression inventé aux États- Unis dans les années quatre- vingt sur fond de culture hip-hop et de poésie populaire. “Pilote le Hot nous a mis le pied à l’étrier pour tout organiser. On avait déjà une association culturelle, on avait déjà organisé des lectures mais ça ne nous avait pas satis- faits, on cherchait quelque cho- se de plus dynamique. Le slam était parfait” , raconte le jeune homme. La première soirée est un succès énorme. “Pourtant, la plupart du public n’avait pas bien compris ce que c’était. Mais cela correspondait à une attente. À Besançon, on manquait de pro- positions culturelles sortant de l’ordinaire.” Sur scène, le premier “round” est

Romain, 25 ans. “Je voulais un public pour pouvoir lire ce que j’écrivais, qu’on m’entende.”

Depuis trois ans, les soirées slam font le plein. Un public jeune et étudiant. Comme les slameurs eux-mêmes.

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