La Presse Bisontine 68 - Juillet-Août 2006

28 24 heures avec…

Pour se mettre en conformité avec la loi, l’agglomération de Besançon doit construire cinq nouvelles aires d’accueil pour les gens du voyage. L’aire de la Malcombe, à Besançon, est fermée pour rénovation. En attendant, les caravanes ont été installées sur un terrain vague appartenant à la ville. Même si le nombre de places d’accueil augmente, les gitans souffrent toujours de discrimination. Blues tsigane dans le Grand Besançon

Eden et Matt devant leur caravan Pour beaucoup de jeunes, l’école problème. “Lorsqu’on allait à l’éc mettait au fond de la classe et on pas de nous”, reconnaît un des m

L e cadre n’a rien d’idyllique. La demi- douzaine de caravanes et autant de camionnettes - toutes blanches - s’est installée là, sur le terrain vague où de grandes herbes disputent la place aux cailloux. À moins de dix mètres, c’est la route nationale de Beure “Et encore, ça tient du miracle, on a pu avoir l’électricité et l’eau” , s’anime Louise. Le petit groupe est installé là depuis deux semaines. Contraint et forcé, parce que “ma nièce doit accoucher d’un moment à l’autre. Il faut qu’on reste sur place. Et on ne peut quand même pas la laisser seule” , explique Antonio, son mari, qui répare une remorque un peu plus loin. Depuis que l’aire d’accueil des gens du voya- ge de la Malcombe a été fermée, en mai, pour derniers arrivés ont dû implanter leur camp plus haut, le long de la route nationale. “Si on avait pu, on ne serait pas là. Mais les terrains de camping ne nous veulent pas. Aux alentours, personne ne pouvait nous accueillir. Alors on s’est mis ici, même si ce n’est pas une zone auto- risée. Depuis deux semaines, les policiers muni- cipaux sont déjà venus plusieurs fois, ils nous ont menacés d’un référé. Mais on ne peut pas bouger” , soupire Louise. Pas assez de place. Selon la loi Besson de 2002, chaque ville de plus de 5 000 habitants doit être dotée d’une aire de stationnement pour les gens du voyage. Toutes sont encore loin d’être équipées. À Besançon, c’est la commu- nauté d’agglomération qui est chargée de cet- te compétence. Début mai, une aire “pour les grands passages” a été ouverte à Thise pour recevoir plusieurs dizaines de caravanes pen- dant quelques jours seulement. L’inaugura- tion a raté. Détrempé par la pluie, le terrain s’est transformé en marécage, les premières caravanes se sont embourbées. “Finalement, ils se sont provisoirement installés sur le par- king d’E.D.F.” , reconnaît Jacques-Henry Bauer, le maire de Mamirolle, en charge de la ques- tion des gens du voyage à la C.A.G.B. D’ici septembre, l’aire de la Malcombe devrait, elle, être entièrement réhabilitée, “avec la mise en place de sanitaires pour chaque emplace- ment.” Un investissement de 750 000 euros, subventionné à 80 % par l’État et la Région. Mais surtout, pour respecter le schéma dépar- temental des gens du voyage adopté en 2005, la C.A.G.B. devrait créer d’ici 2009 cinq nou- velles aires de stationnement. La première, à la sortie de Mamirolle, en bor- dure de la R.N. 57, devrait être opérationnel- le dès le premier semestre 2007. Les travaux devraient débuter en septembre. D’autres devraient suivre à Saône, à Pirey et à Grand- fontaine, avec une capacité d’accueil de cinq caravanes pour chacune. “En construisant des être rénovée, leurs caravanes sont venues s’installer sur une grande esplanade recouverte de cailloux blancs, le long du Doubs. Un terrain prêté par la ville de Besançon, qui peut accueillir une vingtaine de véhi- cules. Trop petit. Faute de place, les

aires, on évite les installations non concertées sur des terrains. Et ce ne sont pas que des par- kings, ce sont des lieux où on peut aussi ins- taller des services sociaux” , reprend Patrick Bontemps, également en charge du dossier à la C.A.G.B. En plus de la Malcombe, une seconde aire de 20 places devrait aussi se construire à Besan- çon même, mais pas avant 2008. Le terrain n’a pas encore été choisi, même s’il avait été question un temps de l’implanter en direction de Pirey. Plus de zones pour stationner, Louise et Anto- nio sont pour. Eux restent rarement plus de deux semaines à un même endroit et traver- sent la France au gré des marchés et des foires où Antonio vend ses chaises, le revenu de la famille. “Mais le problème, c’est que les terrains “gêner partout.” “Pour certains, il ne faudrait pas qu’on s’arrête. Même lorsqu’on fait une pau- se pour manger sur le bord de la route, ça arri- ve que les riverains nous envoient les gendarmes, de peur qu’on s’éternise. Chez les gitans com- me chez les autres, il y a des voleurs. Mais on n’est pas tous des bandits” , regrette-t-elle. Autour de la table de jardin, deux jeunes femmes se sont approchées. Elles aussi racontent les regards qui les accueillent à chaque étape, le manque de compréhension. Les difficultés pour inscrire leurs enfants à l’école. “Pour les ins- crire, il faut être sur un terrain autorisé, pro- duire les papiers nécessaires. Un jour, ils avaient été acceptés par le directeur d’école, mais sont revenus le midi avec un mot. Le maire ne vou- lait pas d’eux” , raconte l’une des mères. Sa fille Eden, 7 ans, n’est pas allée à l’école à Besan- sont souvent pris par des gitans qui sont pratiquement sédentarisés. Et nous, on n’a pas de place” , reprend la femme aux cheveux blonds cen- drés. Mais plus d’aires, c’est loin d’être assez.Avec tristesse, elle recon- naît avoir parfois l’impression de

Cinq nouvelles aires dans la C.A.G.B.

Jimmy, Jean-Henri,

Tony et les autres. Tous vivent près de six mois de l’année à Besançon.

L’aire de la Malcombe est en rénovation. Faute de place sur l’aire provisoire, les derniers arrivés ont dû s’installer au bord de la route.

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