La Presse Bisontine 63 - Février 2006

ÉCONOMI E

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T RIBUNAL ADMINISTRATIF

Indemnisation du préjudice

Refus d’installation pour un pharmacien : 131 000 euros d’indemnisation

E n juin 1999, Benoît Adam sollicite la déli- vrance d’une licence en vue de créer une officine de pharmacie par voie normale dans le Haut- Doubs, sur la commune d’Oye- et-Pallet. Sa requête est reje- tée par le préfet du Doubs le 9 octobre 1999. Pas d’accord avec cette décision, il porte l’affaire au tribunal adminis- tratif le 2 décembre 1999. Une contre-attaque fondée sur l’examen d’une disposition de l’article L. 571 du code de la santé publique. Ce texte pré- cise : “une création d’officine peut toutefois être accordée dans une commune d’une popu- lation inférieure à 2 000 habi- tants lorsqu’il sera justifié de cette commune constitue pour la population des localités avoi- sinantes un centre d’approvisionnement, sous réserve que l’officine à créer et les officines voisines déjà exis- tantes puissent être assurées chacune d’un minimum de 2 000 habitants.” Considérant qu’Oye-et-Pallet remplissait ces conditions, que dans l’hypothèse de l’ouverture d’une pharmacie, celles des localités voisines de Laberge- ment-Sainte-Marie et de La Cluse-et-Mijoux étaient assu- rées de conserver plus de 2 000 habitants, le tribunal a finalement annulé la décision implicite du préfet du Doubs le 21 juin 2001. “Benoît Adam a alors demandé au préfet d’exécuter le jugement. On lui a rétorqué qu’il devait refaire un nouveau dossier alors que

Après deux demandes refusées en 1999 et 2002, Benoît Adam, pharmacien bisontin, s’appuyant sur une première décision de justice en sa faveur a déposé en septembre 2004 une nouvel- le requête au tribunal administratif. Sur les 1,4 million d’euros d’indemnités demandées, il vient finalement obtenu 130 882 euros en décembre dernier. Explications.

cuté le jugement en 1999, Benoît Adam serait devenu propriétaire d’un fonds de com- merce qu’il aurait pu revendre. Il a donc bel et bien perdu une chance. Sur cette chance-là évaluée à 1 million d’euros, le tribunal botte en touche en arguant du caractère éventuel. Paradoxalement, le calcul du manque à gagner se base sur des estimations tout aussi aléa- toires. Benoît Adam ne peut être, selon moi, que partielle- ment satisfait du jugement. On a jusqu’au 7 février pour un éventuel appel.” Au-delà de cette question des dommages et intérêts, cette affaire confirme la quasi- impossibilité d’ouvrir aujour- d’hui une pharmacie dans le Haut-Doubs. “Sur la carte de

ce n’était pas nécessaire. On a volontairement fait traîner les choses en longueur. Benoît Adam a donc déposé un second dossier en novembre 2001, de nouveau refusé en mars 2002 car, entre temps, la loi de 1999 a été complétée par un arrêté préfectoral en date du 5 mars 2002. Grâce à cette manœuvre, on lui a piqué sa clientèle avec un nouveau décret de réparti- tion. Cette affaire de refus est maintenant portée en Conseil d’État” , explique Jean-Luc Carrois, spécialiste en droit pharmaceutique qui travaille aux côtés de l’avocat de Benoît Adam. La dernière requête, celle du 16 septembre 2004, concerne les dommages et intérêts. L’indemnité demandée à l’État comprend princi- palement le

répartition sani- taire, le mailla- ge affiche com- plet sur le secteur. Le nombre d’habitants pour une pharmacie y est inférieur à celui observé dans d’autres zones du dépar-

“On lui a piqué sa clientèle avec un nouveau décret de répartition.”

manque à gagner estimé à 225 637 euros et la perte de chance d’une licen- ce de pharmacie à Oye-et-Pallet. Le tribunal évalue pour sa part le montant du béné-

tement” , précise Pascal Céré- sa, membre de l’Union Régio- nale des Pharmaciens Comtois. L’un des deux syndicats appe- lé à donner un avis consulta- tif sur chaque dossier au même titre le conseil de l’ordre des pharmaciens, la D.R.A.S.S. et la D.D.A.S.S. La décision ultime revient tou- jours au préfet. n F.C.

fice à 136 750 euros. Sur l’indemnisation de la perte de valeur que représenterait le fonds de commerce de l’officine, le tribunal répond “qu’un tel préjudice ne présenterait qu’un caractère éventuel dès lors que la réalisation d’une plus-value serait subordonnée à la reven- te de ladite officine.” Un point de vue que ne partage pas le conseiller du pharmacien bisontin. “Si le préfet avait exé-

Il est devenu quasiment impossible de créer une nouvelle pharmacie dans certains secteurs du Doubs.

J EUNES ENTREPRENEURS Photographie de luxe Édith au pays du luxe Depuis un an, deux photographes bisontins ont créé leur propre agence, l’affaire Édith. Spécialisés dans la photographie de luxe, ils travaillent pour l’horlogerie, la bijouterie, mais aussi certains grands pâtissiers…

I l y a tout d’abord la déception, énorme. Tout ce que nous admi- rons sur les magazines, les énormes panneaux publicitaires avec leurs filles souvent sublimes cou- vertes de bijoux n’existe pas. Dumoins pas tel quel. Toutes les photos sont retouchées, mélangées les unes aux autres, retravaillées par des graphistes. Le mythe s’effondre. “Cela n’a qu’un but, sublimer le produit.Même si vous avez entre les mains une très belle montre, elle comporte la plupart du temps des micro-rayures, impossibles à déceler à l’œil nu. Sur un cliché dix à vingt fois agrandi, par contre, elles deviennent visibles. Notre but, c’est rendre l’image la plus nette possible” , affirme Philippe Kieffer. Après une longue carrière dans une agence de photographie, l’homme est à la tête de sa propre société, L’affaire

briquées. “Pour une montre, il faut que le cadran soit parfaitement éclai- ré pour que le mécanisme soit visible. Il faut un autre éclairage pour mettre en valeur le bracelet cette fois. On recol- le ensuite les deux images” , reprend Philippe Kieffer, qui se charge des retouches. Une minutie qui a un prix, près de 8 000 euros la journée de tra- vail avec unmannequin. Plus de 2 000 sans. En l’espace d’une année, l’affaire Édi- th a réussi à s’implanter dans lemilieu fermé du luxe. “En partie parce que contrairement aux plus grandes agences, nous faisons tout à deux, sans déléguer. On est beaucoup plus réac- tifs” , estime Philippe Kieffer, qui affir- me avoir dépassé les objectifs fixés en termes de chiffre d’affaires. La société, hébergée dans un des bâti- ments de la Boutique de gestion à

Édith, en tandemavec le photographe bisontinAlbert Petracca. Ne cherchez pas ladite Édith, elle n’existe pas. “On avait le sentiment qu’il nous man- quait un élément féminin, on l’a mis dans le nom. Et le contact passe sou- vent plus facilement avec un peu d’humour” , reprend Philippe Kieffer. L’agence, créée il y a un an, est presque exclusivement tournée vers le mon- de du luxe. Horlogerie, bijouterie mais aussi traiteurs ou chocolatiers pari- siens reconnus, certaines des plus grandesmarques parisiennes et suisses réalisent ici les supports qui servi- ront ensuite à leur campagne de com- munication. Dans la région, elles ne sont que deux sociétés à travailler avec les entreprises du luxe. Et pour vendre du rêve, la technique est minu- tieuse. Chaque photo de bijoux est en fait composé de plusieurs photos réim-

Philippe Kieffer et Albert Petracca, fondateurs de l’affaire Édith.

une trace de doigt s’est imprimée, de fines bulles d’air lors de la fabrica- tion irisent sa surface. Tout est cor- rigé par ordinateur. Les mannequins n’échappent pas à la règle. “On a dû faire fondre la dernière de près de dix kilos” , s’amuse le photographe. La fin d’un autre mythe. n S.D.

Palente, cherche désormais à s’agrandir, pour pouvoir développer ses activités, notamment autour de la photo de mannequins. D’un côté de la pièce, le photographe a installé sa chambre de prises de vue. De l’autre, le graphiste retouche sur son écran les clichés d’un chocolat. La chaleur des lampes a fait fondre la texture,

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