La Presse Bisontine 60 - Novembre 2005

UN VI LLAGE À L’HONNEUR

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La Vèze, une forêt pour Besançon H ISTOIRE Une commune créée en 1835

La forêt d’Aglans, qui recouvre près de 170 hectares sur le territoire de la Vèze, est propriété de la ville de Besançon. Une particularité liée à l’histoi- re du village, qui a longtemps été un quartier bisontin.

À la sortie de La Vèze, après l’aérodrome, la petite route s’enfonce dans la forêt d’Aglans. 170 hectares de feuillus situés sur le territoire de la commu- ne, presque les deux-cinquièmes de son territoire. Et pourtant, le village ne perçoit aucun reve- nu foncier. Et pour cause. La totalité de la forêt appartient à la ville de Besançon, qui en gère seule l’exploitation. Une particularité qui découle de l’histoire singulière de La

champêtre. Il faut encore attendre une vingtaine d’an- nées avant que les parties ne se mettent d’accord. Et la forêt d’Aglans reste propriété de la ville de Besançon, tandis que La Vèze reçoit de son côté 47 hectares de bois et 10 hectares de terrains communaux. “Elle a vraiment de la valeur. Elle produit presque autant que tout la forêt de Chailluz qui fait pourtant 1 600 hectares” , note- t-on au service espaces verts de la ville. O

Vèze. Car jusqu’à la fin du XIX è- me siècle, le village fait partie du territoire de la capitale com- toise. En 1822, une cinquan- taine d’habitants de La Vèze

munes se séparent finalement une dizaine d’années plus tard, en 1835. Reste comme dans tout bon divorce, le partage des biens

du ménage. Le partage est diffici- le. La situation de la nouvelle com- mune est alors moins brillante que prévu. Il lui

envoie au maire de Besançon une péti- tion pour demander l’indépendance du vil- lage par rapport à Besançon. La gestion des possessions

Une pétition pour demander l’indépendance.

faut construire une mairie, trouver une école et rémuné- rer l’instituteur et le garde-

forestières devrait, pensent- ils, assurer des revenus impor- tants au village. Les deux com-

Bien que sur La Vèze, la forêt n’apporte pas de ressources au village.

Voler comme l’oiseau S PORT 380 licenciés À l’aérodrome de La Vèze, il n’y a pas que des avions, il y a aussi des parachutistes. Le centre-école, créé en 1975, compte aujourd’hui 380 licenciés et propose à tous des baptêmes de parachutisme. I l faut avoir le cœur bien accroché, pour oser sauter de l’avion Mais la sensation d’être un oiseau est à ce prix. “En fait, c’est une sen- de découverte en ouverture automatique. C’est-à-dire seul. Cinq heures de formation au sol sur les techniques de saut et de réception suffisent pour se lancer. “Cela ne veut pas

“La Blanche”, la mémoire du village T ÉMOIGNAGE Tenancière du café-épicerie Derrière son comptoir, de 1955 à 1984, Blanche Jeannin a récolté les états d’âme de tout le village. L’ancienne tenancière du café-épicerie est désormais à la retraite. Et le café est devenu le restaurant “Le Vézois”. L e café-épicerie, au centre du vieux villa- ge, a appartenu à ses parents tout d’abord. Avant eux, ses grands- l’âge de six ans” n’a presque jamais quitté son village. Elle en est devenue petit à petit la mémoire vivante.

re, “surtout pendant la guerre, onne chauffait presqu’avec cela.” Après 1945, la tourbe a un peu servi pour le jardinage, puis a progressivement été oubliée. Blanche est dynamique, bat- tante. À côté du café et de l’épi- cerie, elle a aussi fait office de receveuse des postes, vendait les timbres et les bonbons aux enfants de l’école. Il avait aus- si la cabine téléphonique, le res- taurant. Tout cela seule. En 1984, elle a vendu son café pour prendre sa retraite. Le lieu est devenu le restaurant “Le Vézois”, une table plutôt bien cotée, qui attire les Bisontins le dimanche. Quand elle y retourne, Blanche a parfois un pincement au cœur, cherche encore un instant la place de l’ancien comptoir. “Mais je vou- lais qu’un petit commerce res- te au pays. Alors je suis conten- te quand même.” Mais la retraite a aussi du bon. “C’est peut-être mes meilleures années” , affirme l’alerte vieille dame qui a découvert le goût des voyages à 64 ans. La Yougoslavie, l’Es- pagne, l’Autriche, elle a pro- fité de son nouveau temps libre pour s’échapper, deux fois par an. Et pour ne pas rester trop souvent sans rien faire, Blanche s’est trouvé une nou- velle activité dévorante. Le scrabble. “Tous les quinze jours, on se retrouve une vingtaine au club de loisir et on joue tout l’après-midi. C’est vraiment sympathique” , ajoute-t-elle, l’œil plein de malice. O

ses frictions entre voisins, Blanche sait tout ou presque. De derrière son comptoir, elle a recueilli les confidences des uns et des autres. “Du bon, du moins bon, je savais tout. J’écoutais, mais je sais aussi rester muette” , raconte-t-elle d’une voix rieuse. Le café était un endroit où “tout

Rural, le village a vécu jusqu’à la fin des années 40 des gla- cières. En hiver, dans les étangs gelés des marais, les hommes découpaient de larges plaques de glace, qu’ils conservaient jus-

parents y travaillaient déjà. Et leurs propres parents égale- ment. “Alors vous dire de quand il date, je ne peux vrai- ment pas vous dire. Au moins trois générations.” Blanche Jeannin, 85 ans, a pas- sé trente ans derrière son comp- toir, de 1955 à 1984. Ici d’ailleurs, personne ne l’appel- le “Madame Jeannin”. Pour tout le monde, c’est “La Blanche”. Du nom du café-épicerie, bap- tisé “Chez la Blanche”. Du vil- lage, de ses petits soubresauts,

dire que l’on apprend tout en si peu de temps. Mais pour le premier saut c’est assez. Après pour ceux qui veulent continuer, il y a un suivi, avec un systè- me de brevets à pas- ser” , rectifie la pré- sidente de l’association, Christine Blondeau. Deux cents téméraires le tes- tent chaque année. Mais l’aérodrome de La Vèze ne voit pas que des parachu- tistes amateurs s’exercer. Au sein de l’association, les équipes de voile-contact, entraînées par Jean-Michel Poulet, multiple champion du Monde, ont déjà rapporté trois podiums cette saison, en s’im- posant en coupe de France et en championnat de France. Joli palmarès. O

sation très douce. On se sent porté par l’air, c’est agréable. Tu descends à près de dix mètres/secon- de mais tu n’as abso- lument pas la sen- sation de tomber” , raconte Delphine, qui vient de faire son

Pour ceux qui veulent tester les grands frissons.

qu’aux chaleurs estivales dans des glacières, des puits creu- sés dans le sol. “Ils allaient

le monde se retrouvait. La semaine, les clients et la bou- tique. Le week- end, c’était sou-

“C’est peut-être mes meilleures années.”

ensuite livrer la glace l’été à Besançon, en voiture à cheval” , se souvient-elle. Il y avait aus- si l’exploitation de la tourbiè-

vent des amis. Je ne connaissais pas de jours de fermeture.” Née en 1920, elle qui affirme “avoir eu la fibre du commerce depuis

premier saut en tandem avec un moniteur. Le plus impres- sionnant, affirme-t-elle, c’est avant de sauter, quand on regarde le sol. Fondé en 1975, le centre-éco- le de parachutisme de Besan- çon-La Vèze est l’association la plus importante du villa- ge, avec ses 380 licenciés et 500 membres. Pour tous ceux qui veulent tester les grands frissons, le centre propose de mars à novembre des bap- têmes de parachute. En tan- dem, mais surtout des sauts

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À 85 ans, Blanche Jeannin est devenue la mémoire du village. Elle a tenu pendant trente ans le café-épicerie du centre, devenu le restaurant “Le Vézois”.

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