La Presse Bisontine 55 - Mai 2005
30 REPORTAGE
Récit Solène Davesne
24 HEURES AVEC… Le service des Urgences pédiatriques
Les Urgences. Le mot impressionne. Enco- re plus quand il s’agit d’enfants. À l’hôpi- tal Saint-Jacques, en plein centre de Besan- çon, l’équipe du professeur Menget, à la tête du service des urgences et de la réani- mation infantile, se relaye toute la journée pour assurer l’accueil des patients. Petits bobos, fractures, maladies… Les patho- logies plus ou moins graves défilent. Et pour l’équipe médicale - deux infirmières, deux internes et un médecin en perma- nence - il faut savoir soigner mais aussi consoler les plus petits.
D es clowns en papier aux cou- leurs criardes sont pendus un peu partout au plafond, dans le long couloir, dans la salle dattente, dans les salles dauscultation. Et sur les murs, à hauteur denfant, des affiches aux dessins naïfs et colorés détaillent le contenu de la salle dopération ou de la chambre dhôpital. Cest ce qui distingue lendroit de nim- porte quel couloir dhôpital. Ici, les patients sont des enfants, de 0 à 15 ans. Laprès-midi est cal- me. Il est un peu plus de 16 heures, les trois salles dauscultation - les boxes - de chirurgie et les trois de médecine sont tous vides. Dans les chambres de court séjour aménagées au fond du service des Urgences, il ny a que la petite Lin- da, 4 ans, qui reste silencieuse et somnole dans son grand lit. Une gas- tro-entérite qui dure depuis plu- sieurs jours lui a fait perdre beau-
coup de poids et lépuise. Elle est arrivée de Maîche en début daprès- midi, et doit passer la nuit dans le service, en observation. Sa mère, qui ne la quitte pas des yeux, va passer la nuit avec elle, sur une chauffeuse installée près du lit. Dans la petite salle étroite réservée aux médecins, Héloïse profite du calme pour réviser ses cours. Étu- diante en cinquième année de méde- cine, elle est externe en pédiatrie. Cette nuit, cest sa première garde dans le service des Urgences pédia- triques. De midi à 8 heures le len- demain matin, cest elle qui exami- nera en premier les patients, sauf en cas de durgences vitales, avant que linterne - un étudiant en méde- cine en fin de cursus - ne lauscul- te à son tour. Chaque année, près de 15 000 enfants défilent dans le service des Urgences. Des fractures, des entorses, des gastro-entérites Ça dépend
de la météo. Quand il fait beau, on fait beaucoup de traumatologie, lhi- ver, cest plutôt de la pédiatrie, avec les épidémies , samuse linfirmière en chef. Les périodes de pointe : la fin daprès-midi, la soirée et les week- ends - quand les cabinets de méde- cin sont fermés. Laffluence est loin de celle enregistrée dans les ser- vices adultes, mais le premier week- end davril, le service a connu un record. 72 personnes en une seule journée. Cétait de la folie. Les patho- logies sont parfois plus graves. Brusquement, la porte battante des Urgences souvre. Les pompiers por- tent un petit garçon de 4 ans sur un brancard. En tombant dun muret, il sest brisé le fémur. Pour calmer la douleur, on lui injecte de la mor- phine. Il restera un moment aux Urgences, le temps de faire la radio. Avant de partir pour un autre ser- vice en fin daprès-midi.
C’est surtout le soir et le week-end que les urgences sont les plus chargées.
18 heures - Louis est un blondinet à lunettes de 4 ans qui a du mal à respirer. Il arrive blot- ti sur les épaules de son père. À laccueil, Véronique, lune des deux infirmières du ser- vice, remplit le dossier dadmission. Cest elle qui trie les patients, entre ceux qui doivent être examinés par un pédiatre et ceux qui doivent voir le chirurgien, repère les cas graves à faire passer en priorité. Et cest Héloïse, la jeune externe qui soccupe du petit Louis. Lenfant est un peu tendu. Tu veux bien que je texamine ? Non ? Tu vas voir, je vais écou- ter tes poumons. Ça ne va rien faire, je le réchauffe dans mes mains. Dune voix dou- ce, Héloïse explique, le stéthoscope dans la main. Tu vas pas me faire une piqûre ? sin- quiète quand même Louis, alors quelle lui examine les oreilles. Sébastien, linterne de pédiatrie, arrive. Le petit Louis est envoyé à la radio.
Passés 18 heures, les Urgences se remplis- sent progressivement. Une femme arrive por- tant un nourrisson qui a des vomissements, Matthieu, qui sest cassé le bras en tombant de vélo, repart avec un plâtre tout neuf. Une petite fille qui a des maux de ventre patien- te dans un des boxes de pédiatrie. Les six boxes sont bientôt occupés, deux personnes attendent dans la petite salle dattente, un bébé dans les bras. Émilia, deux ans, qui a avalé une cacahuète, va passer la nuit dans une des petites chambres de court séjour avec sa mère. Entre deux patients, il faut nettoyer à toute vitesse. Cest le travail de Fanny, lagent de service hospitalier. Je suis aussi souvent celle qui console, qui est là pour ras- surer explique-t-elle. Jai travaillé dans des services différents, mais cest mieux avec les enfants. Ils sont plus reconnaissants, même quand ils sont malades, ils sourient.
Linda, quatre ans, a été hospitalisée pour une gastro-entérite. Elle va passer la nuit avec sa mère dans une des chambres de court séjour.
21 heures - Le box 4, cest une petite Juliet- te qui attend de faire un scanner. Là, cest un petit garçon qui a avalé des antidépresseurs de sa mère Magali et Myriam, les deux infirmières du service de nuit viennent dar- river. Avant de prendre le relais, elles effec- tuent le tour des patients avec les deux infir- mières de jour, pour être au courant de qui est là. En chirurgie, Vanessa, une jeune fille dune douzaine dannées revient de la radio. Elle a le poignet cassé. Cest Philippe, lex- terne de chirurgie, en cinquième année de médecine qui va plâtrer. Frédérique, linter- ne, est derrière et lobserve, le corrige. Com- me à chaque fois, la première fois, ça foire. Il y a quatre choses fondamentales à savoir et jen ai oublié une , avoue-t-il avec dépit. Dans le même temps, la petite Lou, 18 mois, vient darriver. Il est près de 21 h 30. En tom- bant sur une bouteille, elle sest profondé- ment entaillé la main. Elle a depuis navigué entre deux hôpitaux, avant datterrir à Besan- çon. À Chalon, les Urgences nous ont envoyés à Dijon, car ils ne savaient pas faire. Mais à Dijon, ils navaient pas danesthésiste pour enfant , explique le père, à bout de force. Elle
est presque aussitôt transférée en chirurgie. Le petit Louis, lui, part rejoindre le service des maladies infectieuses, avec son père.
Héloïse, la jeune externe, effectue sa
première garde aux urgences pédiatriques. Elle remplit la feuille de soin du petit Louis.
Pour aider Louis, quatre ans, qui a du mal à respirer, les infirmiers lui ont mis un masque. En attendant de rejoindre un autre service, il lit avec son père.
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