La Presse Bisontine 46 - Août 2004

LE GRAND BESANÇON

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Rappel des faits en dates

G RANDFONTAINE Modification du P.O.S. Un rapport d’enquête enfonce le clou Les conclusions d’un rapport d’enquête d’utilité publique confirment les écarts constatés dans la gestion de la municipalité de Grandfontaine.

- Avril 2000 : le procureur classe l’affaire sans suite. - 10 décembre 2002 : l’affai- re est relancée suite à un recours déposé par un habi- tant de Grandfontaine. Il demande au Tribunal Admi- nistratif cette fois d’annuler des extraits des délibérations de conseil qui ne correspon- dent pas au registre. - 8avril 2004 : leTribunalAdmi- nistratif de Besançon annule 9 délibérations datées du 6 mai 1994. Elles concernent notam- ment la demande d’aménage- ment d’un parking, et un emprunt de 800 000 F auprès du Crédit Local de France. - Juin 2004 : un rapport d’en- quête d’utilité publique démontre entre autres les écarts dans la gestion de la commune.

-11avril 1999 : dépôt de plain- te d’une habitante de Grand- fontaine contre la municipa- lité de Grandfontaine et deux maires pour “faux en écritu- re publique.” - Le procureur de la Répu- blique de Besançon Jean-Pier- re Nahon ouvre rapidement une enquête qui dure un an. Le rapport de Gendarmerie soulève des anomalies. Il sti- pule que 175 extraits établis par deux maires successifs de 1990 à 1998 ont été identifiés comme ne correspondant à rien dans le registre des déli- bérations de conseil. Norma- lement, l’extrait est un outil mis à disposition du maire pour qu’il mette en applica- tion les décisions du conseil municipal annotées dans le registre.

C’ est un nouveau rebondissement dans “l’affaire de Grandfontai- ne” dont La Presse Bisontine se fait l’écho depuis novembre 2001. Après les suspicions jetées sur la gestion municipale de cette commune à la suite d’un rapport d’enquête de la Section de Recherche de Gendarmerie qui mettait en évidence des dysfonctionnements sus- ceptibles de constituer une infraction “pour faux en écritures publiques” , c’est au tour d’un commissaire-enquêteur de lancer un pavé dans la mare. Du 4 mai au 4 juin 2004, il a suivi l’en- quête d’utilité publique ayant pour objets “une révision simplifiée du P.O.S.” et “une modification du règlement du P.O.S. ” C’est la commune deGrandfontaine qui a deman- dé cette enquête dans le double but d’ob- tenir les autorisations nécessaires à l’im- plantation d’un “Algeco” dans le prolongement du groupe scolaire, et de combler une doline pour aménager un parking. Une mission somme toute clas- sique pour un commissaire-enquêteur.

R ÉACTION L’aide d’un cabinet d’avocat Pas de commentaires sans un débat municipal Le maire de la commune de Grandfon- taine ne souhaite pas commenter dans le détail le rapport d’enquête publique rela- tif à la révision du P.O.S.

Mais les conclusions de cet expert sont affligeantes pour la municipalité de Grandfontaine. “Le lancement de cette enquête est une offen- se aux règles répu- blicaines, une marque de dédain vis-à-vis de la popu- lation et un affront

“Il existe dans cette commune une politique du fait accompli.”

J ean Jourdain, maire de Grandfontaine, a un avis réservé sur le récent rap- port d’enquête qui accable la municipalité. L’élu contacté par nos soins ne souhaite pas apporter de commentaires tant que ce document “n’a pas été discuté en conseil muni- cipal. On va l’étudier dans le détail. Il n’est pas exclu qu’on en parle à la prochaine séan- ce qui aura lieu en septembre” indique le maire qui se dit “préoccupé” par ce dossier. Il

ment administratif.” C’est le second volet de ce dossier concernant les faux extraits du registre des déli- bérations de conseil, dont 9 ont déjà été annulées par le Tribunal Administratif de Besançon le 8 avril dernier. Sur ce point, Jean Jourdain annonce que la mairie “a fait appel de cette décision.” Pour se défendre, la collectivité a sollicité les services d’un cabi- net d’avocat de Chambéry. Il en coûtera à la commune

fait aux institutions” peut-on lire dans ce rapport. Le préambule est sévère. Un peu peu plus loin, il justifie ses propos en expli- quant que le préfabriqué en question “déjà installé depuis septembre 2003 à l’aide d’un permis de construire délivré le 8 sep- tembre 2003” et que “la doline est déjà comblée depuis 1998 et sert de parking depuis cette époque.” En clair, les projets sur lesquels on lui demande d’enquêter en vue de leur réalisation (possible ou non) sont déjà concrétisés !

La doline était déjà remblayée pour un parking quand le commissaire-enquêteur a débuté son travail.

La duperie est de taille et l’affaire s’est rapidement révélée plus complexe qu’el- le n’y paraissait. “Cette enquête permet de mettre en lumière qu’il existe dans cette commune une politique du fait accompli, qui pour ce qui nous concerne consiste à faire valider par un commissaire-enquê- teur des “projets” qui sont déjà réalisés à l’encontre de toute règle en cours, à l’en-

contre également de l’esprit de l’enquête publique et des principes fondamentaux de l’État Républicains” fustige le rapport. Au regard de cet ensemble d’éléments, le commissaire-enquêteur a naturellement rendu un avis défavorable au terme de son analyse. ! T.C.

29 900 euros par an, pour une affaire qui semble mettre d’abord en évi- dence la respon- sabilité du pré- décesseur de

reconnaît que dans ce rapport, “certaines choses semblent anor- males.” Sans s’étendre sur la question, il apporte de façon

I NCOHÉRENCE Un problème dans les dates Une démonstration qui pourrait relancer l’affaire

“Jusque-là, nous n’avons pas su nous défendre.”

Jean Jourdain, aujourd’hui premier adjoint. “Je sais, c’est une somme énorme dont on se serait bien passé. Mais ça fait longtemps que nous sommes attaqués. Jusque-là, nous n’avons pas su nous défendre. Quand un incendie est lancé, on tente d’abord de l’éteindre avec des seaux d’eau. Si ça ne marche pas, il faut faire appel aux pom- piers.” Cette assistance juridique dont se prémunit la mairie a pour but “de préserver l’ave- nir et protéger la commune d’annulations intempestives de décisions du maire ou du conseil municipal pour vice de forme au motif qu’un mot, qu’une phrase ou qu’une vir- gule n’aurait pas précisément été reportée dans le registre des délibérations du conseil” a écrit la municipalité dans un courrier distribué aux habitants du village. !

succincte sa version des faits sur le remblaiement d’une doline dans le village pour en faire un parking. Un sujet largement discuté par le com- missaire-enquêteur. “Ce par- king, c’est tout une histoire. La doline n’a pas été rem- blayée à la demande de la commune. À l’époque, nous, élus, n’avons pas été assez vigilants. Il aurait peut-être fallu entreprendre une action en justice.” Jean Jourdain n’en dira pas plus. Pourtant, le rapport d’enquête stipule au contraire que c’est la commune qui “demande une révision d’urgence du P.O.S. pour combler une doli- ne en vue d’y aménager un parking” alors que cette même doline est remblayée depuis 1998. Le document précise ensuite que “ce terrain n’ap- partient pas “réellement” à la commune puisqu’il a été acquis à partir d’un faux docu-

Le commissaire-enquêteur a démontré qu’un faux avait été commis en toute connaissance de cause.

relatif à l’acquisition de la parcelle sus- ceptible d’accueillir le parking. Le com- missaire-enquêteur a expliqué que cet extrait présentait des incohérences fla- grantes avec la chronologie des événe- ments et le registre des délibérations de conseil. Il apparaît notamment qu’en date du 6 mai 1994, la parcelle en question n’était pas numérotée au cadastre. Elle ne le sera que plusieurs semaines plus tard. Par conséquent, comment le numé- ro de parcelle peut-il figurer sur l’extra- it du 6 mai ? La réponse est dans le rap- port : “L’extrait du registre des délibérations établi par le maire de l’époque le 6 mai 1994 affirmant que le conseil municipal avait délibéré pour acquérir la parcelle n° 255 est donc un faux commis en toute connaissance de cause.” Cette conclusion pourrait désormais ser- vir d’argument à certains habitants de Grandfontaine qui entendent porter l’af- faire devant le tribunal pénal. !

E n novembre 2001, l’ancien procu- reur de la République de Besan- çon Jean-Pierre Nahon tenait à relativiser l’affaire de Grandfontaine en

ne, il manque précisément la volonté déli- bérée de frauder de la part des deux maires mis en cause” (Richard Sala maire avant 1995 et Jean Jourdainmaire depuis 1995) .

Mais le récent rapport d’en- quête d’utilité publique n’est pas aussi affirmatif. Dési- gné pour étudier la deman- de d’une révision d’urgen- ce du P.O.S. pour combler une doline en vue d’amé- nager un parking, le com-

expliquant qu’il “s’agissait d’un manque de rigueur de la part du maire.” Le repré- sentant du ministère public justifiait ainsi pourquoi il avait classé cette affaire sans suite après avoir diligenté une enquête qui a duré un

“Un faux commis en toute connaissance de cause.”

missaire-enquêteur a vraisemblablement démontré “qu’un faux - reconnu comme tel par le tribunal de Besançon le 8 avril dernier - avait été commis en toute connais- sance de cause.” Ce document daté du 6 mai 1994 était

an, suite à une plainte déposée par une habitante de Grandfontaine. Il précisait enfin que “pour qu’un faux soit reconnu comme tel, il doit y avoir une volonté affi- chée de le commettre et qu’il soit préju- diciable. Dans l’enquête de Grandfontai-

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