La Presse Bisontine 258 - Décembre 2023

16 Besançon

La Presse Bisontine n°258 - Décembre 2023

DOCUMENTAIRE

Projeté fin novembre à l’Assemblée Nationale Quatre personnalités LGBTQIA+ témoignent de leur quotidien

attachés à l’ancrage local, sont parfois amenés à recroiser les protagonistes de leurs films. Tous deux ayant choisi de travailler à Besançon après avoir exercé plusieurs années à Paris. David, en tant que réalisateur monteur, a notamment participé aux premières saisons de Top Chef et divers pro grammes pour M6 et TF1. Tandis que Stéphane a commencé à travailler pour Culture Pub et Silence ça pousse, avant de produire divers documentaires, don nant la parole à des actrices célèbres pour France Télévisions, entre autres. À son retour en Franche-Comté, ce der nier raccrochera un temps avec l’au diovisuel pour créer l’école de commu nication digitale 2089, pour mieux y revenir en montant sa société “Dans la Boucle productions”. Il collabore aujourd’hui avec David sur différents projets, dont les programmes courts réalisés pour la Ville: “Besançon la romanesque”, “Peur sur Besançon”… bientôt complétés par un nouvel opus sur les femmes bisontines. Une dis cussion serait également entamée avec la Ville de Dijon. n S.G. “L’important, c’est d’aimer”, à retrouver sur les plateformes numériques et en replay sur france.tv jusqu’au 12 juin moi au départ.” Il y dépeint l’histoire som bre d’une femme, marquée par la naissance inattendue de son fils Olivier, qui va s’avé rer autiste. Dans ce roman psychologique, le lecteur est confronté au déni de gros sesse, à l’accueil d’un enfant handicapé, mais aussi aux désillusions et à une dif ficile introspection. L’ancien psychologue pousse le curseur de la noirceur jusque dans le choix de son titre, “Enfant tumeur”, “comme l’expression de l’inconscient de la mère.” Yves Germain assume ce parti pris. “Je voulais aborder cette autre facette de l’au tisme, dont on parle peu. Il n’y a pas que des autistes Asperger. Tout n’est pas comme on veut bien le montrer” , explique-t-il. “Il y a des enfants déficitaires qui ne pourront jamais aller à l’école, ni même communi quer, et pour qui l’inclusion à tout prix n’est pas envisageable.” Une réalité à laquelle il a été confronté et avec qui il renoue, ici, dans une fiction. La figure du père, quasi absente, pouvant aussi trouver une sorte d’écho dans le réel. Le lecteur trouvera, à contre-pied, une forme de légèreté dans le cadre pittoresque et champêtre de l’action. Très attaché au Bessin, où sa grand-mère avait une ferme en bord de mer, Yves Germain plonge en effet ses personnages dans ses racines normandes. Des séances de dédicace sont prévues en début d’année à Cultura et à la F.N.A.C. Châteaufarine. n S.G.

et sociétale, chère aux deux réalisateurs bisontins, qui avaient déjà signé le documen taire “Sans toit, ni choix” sur le parcours de S.D.F. “Il y a dans notre tra vail autant de liberté que de mise en danger” , reconnaît David, qui aimerait que cette co production France Télé visions et Dans la Bou cle productions vive au-delà des diffusions télé. Le duo souhaite

est très actif dans le milieu LGBT à Besançon. Il nous a éveillés sur le fait que de nombreuses difficultés restaient à lever (dans l’acceptation, la recon naissance des droits, la santé mentale, pour trouver un logement, un emploi… ). On a voulu en rendre compte, en ques tionnant ce regard de l’autre et ces notions d’identité et de genre” , résume Stéphane Bonnotte. Le documentaire commence ainsi par la marche des fiertés, organisée en mai 2022 à Besançon. Puis il glisse vers le quotidien de chacun d’entre eux. Tous ont un parcours de vie dif férent et évoquent par bribes leur vécu, tantôt à travers leur fragilité, tantôt leur force et leur joie de vie. À l’image de Milan, né femme, qui raconte combien “il détestait le fait d’avoir une poitrine” , ou de Layenna, qui, rejetée par ses parents, a vécu plu sieurs semaines dans la rue et dont la situation d’hébergement était encore précaire au moment du tournage. Elle n’arrive pas encore, dans son cas, à se définir, se sentant plus Donovan cer tains jours. Tous ont comme point commun d’avoir été harcelés à l’école et tous défendent ardemment ce droit d’exister dans la même indifférence que n’importe qui. Le récit touchant et bienveillant finit sur la chanson de Michel Berger “Pour me comprendre”, comme un appel du pied. On retrouve ici la patte sociale

Et si l’amour n’avait pas de genre ? C’est l’idée sous-tendue dans le dernier documentaire des réalisateurs bisontins, Stéphane Bonnotte et David Perrot, qui met en lumière les droits de la communauté LGBTQIA+.

I ls s’appellent Corentin, Océane, Milan et Layenna et ont bien voulu partager comme n’importe quels autres jeunes leurs désirs et visions de l’avenir, face caméra. À la différence

près qu’un plus grand nombre de défis se sont déjà présentés à eux et conti nuent de se poser, dans une société toujours marquée du sceau de l’into lérance. “On a rencontré Corentin qui

Un récit touchant et bienveillant.

rait qu’il soit utilisé à des fins de sen sibilisation dans les collèges, les lycées et par les associations. Il a d’ailleurs déjà reçu deux demandes de Centre de documentation et d’information (C.D.I.) d’établissements locaux. La projection prévue à l’Assemblée Natio nale le 28 novembre, sous l’impulsion du député du Doubs, Laurent Croizier, devrait aussi permettre de lui offrir une aura plus large. “On est heureux de faire ce genre de films pour laisser une trace et que les gens en parlent derrière. Même si c’est difficile aussi humainement pour nous, car cela suppose un détachement sur des situations de vie parfois compli quées” , observe Stéphane Bonnotte. D’autant plus que les deux réalisateurs,

Stéphane Bonnotte et David Perrot ont déjà réalisé plusieurs documentaires pour France Télévisions.

EN BREF

LITTÉRATURE Vient de paraître L’enfance à l’épreuve du handicap : de la réalité à la fiction Le Bisontin Yves Germain vient de publier, à 75 ans, son tout premier roman. Un récit intitulé “Enfant tumeur”, inspiré en partie de son vécu de psychologue clinicien.

Recherche Le laboratoire L.I.N.C. de l’Université de Franche-Comté va devenir à compter du 1 er janvier 2024 une nouvelle Unité Mixte de Recherche (U.M.R.) de l’I.N.S.E.R.M. Fort de 98 chercheurs, personnels, doctorants et post-doctorants, le laboratoire de Recherches Intégratives en Neurosciences et Psychologie Cognitive (L.I.N.C.) fédère l’ensemble des personnels du site autour d’un objectif commun, la santé mentale et le développement des neurosciences, avec un budget recherche de plus d’1,5 million d’euros. Ce laboratoire participe à de nombreux réseaux recherche au niveau national et européen. Cette nouvelle U.M.R. est un marqueur important de la confiance accordée par l’I.N.S.E.R.M. dans la qualité des travaux de recherche des équipes du Professeur Emmanuel Haffen. enseignants chercheurs,

S pécialisé dans l’aide au dévelop pement de l’enfant handicapé et l’accompagnement de ses parents, Yves Germain a consacré une bonne partie de sa carrière à la prise en charge de la déficience intellectuelle et “ce qu’on appelle aujourd’hui l’inclusion.” Une bataille qu’il a menée à la suite de ses études de psychologie à Besançon, Dijon et la Sorbonne. C’est lui qui a notam ment participé à créer le service d’édu cation et de soins spécialisés à domicile Les Marmots, avec deux collègues à Besan çon, en 1974. L’un des tout premiers en France à proposer une assistance précoce aux familles. “Il y avait un vrai vide en la matière.” Peu désireux de s’installer à son compte à l’époque, il sera amené à exercer diverses autres missions, en plus de celles réalisées pour l’A.D.A.P.E.I., auprès d’adultes han dicapés, de centres d’aide par le travail et même d’un internat pour délinquants en Haute-Saône, au fil des ans. “J’ai tra vaillé aussi bien dans le champ de la délin quance que du handicap. Ce sont deux

thèmes qui m’intéressaient car les deux n’avaient pas leur place dans la société.” Si aujourd’hui, il reconnaît que les choses ont heureusement évolué, il reste néan moins “beaucoup à faire” aux yeux de ce professionnel. “La loi de 2005 prônait une accessibilité de tout, à tous et pour tous. Mais il y a toujours des décrets qui ne sont pas appliqués.” Les moyens d’action auraient également tendance “à s’assécher” de son point de vue, “avec beaucoup de

Yves Germain a exercé pendant 40 ans à Besançon et dans la région.

en centre de loisirs…” Devenu un référent sur ces questions et celle des fratries, il est aussi beaucoup intervenu par le passé à l’étranger. Au Portugal, en Italie, en Pologne et même au Québec “où j’étais venu parler de cette expérimentation de classe maternelle ouverte aux enfants de toute déficience, dans les années quatre vingt, aux Clairs-Soleils.” Ce parcours professionnel a été émaillé, au passage, de diverses publications scien tifiques dans des revues spécialisées. Mais jusqu’ici, l’ancien psychologue bisontin n’avait jamais publié de roman. Passionné de littérature, il dit écrire pourtant des poésies depuis l’âge de 15 ans et avoue même en avoir “tout un stock.” Ce premier roman arrive finalement un peu par hasard. “Je l’avais commencé plus pour

tâches administratives et moins de temps accordé au soin à la personne.” Pas totalement à la retraite, Yves Germain continue de partager son expérience en tant que formateur pour divers organismes. “J’inter viens notamment pour le Cen tre National de la Fonction Publique Territoriale (C.N.F.P.T.), l’Institut régional du travail social (I.R.T.S.)… sur le thème de l’accueil de l’enfant handicapé en crèche,

“Il reste beaucoup à faire.”

“Enfant tumeur”, Yves Germain Édition Les 3 colonnes 132 pages, 15,50 euros. Sur commande en librairies

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