La Presse Bisontine 247 - Janvier 2023
Le portrait 39
La Presse Bisontine n°247 - Janvier 2023
BESANÇON
Céline Reylé
La voie lactée pour horizon Seule scientifique de la région à posséder le titre d’astronome, Céline Reylé fait partie du consortium européen Gaia qui vient de se voir décerner le prestigieux Prix Berkeley 2023 par la société astronomique américaine. Parcours.
Q uand elle était petite, Céline Reylé a toujours gardé les pieds sur terre. La tête dans les étoiles, elle l’a eu bien plus tard. C’est un peu par hasard qu’elle a dédié sa carrière aux mystères du ciel profond. “Plus jeune, j’étais plutôt à l’aise avec les maths et la physique, je me suis naturellement dirigée vers des études supérieures scientifiques. Mais je n’ai pas eu ma première lunette à 10 ans. Cela ne m’empêche pas aujourd’hui de réveiller mes filles quand il y a une éclipse de Lune et j’ai choisi d’habiter à une trentaine de kilomètres de Besançon à un endroit où on peut bien voir la voie lactée” sourit Céline Reylé, professeure d’Université, astrophysicienne et unique cher cheuse de la région à pouvoir arbo rer le titre d’astronome, issue du Corps national d’astronomes et de physiciens du globe (C.N.A.P.). La Bisontine a fait ses études à Besan çon (D.E.A. d’astrophysique) avant de faire sa thèse à l’Université de Paris, puis d’être affectée à l’Ob servatoire de Besançon où elle tra vaille toujours. La voie lactée, c’est justement ce qui occupe une bonne part de son travail de chercheuse au sein du consortiumeuropéenGaia qui vient d’être distingué - un honneur rare en astronomie - par une institution américaine, l’AmericanAstronomi cal Society (A.A.S.). Avec deux de ses collègues chercheurs bisontins et d’autres scientifiques européens, elle a obtenu le prix Berkeley 2023.
Bio express l 1995 : Elle passe son Master d’astrophysique. l 1998 : Doctorat d’astrophysique à Paris (Université
Pierre et Marie Curie). l 2002 : Elle intègre le consortium de chercheurs européens Gaia.
l De 2009 à 2017 : elle est membre du conseil scientifique du programme national de cosmologie et galaxies. l De 2010 à 2018, Céline Reylé est vice-présidente, puis présidente et présidente en charge des affaires internationales de la société astronomique française. l De 2012 à 2017, elle dirige l’Observatoire des sciences de l’univers de l’Université Franche Comté-Bourgogne l En 2018, elle devient la présidente du programme national de physique stellaire l En 2021, elle est élue membre du conseil d’administration de l’Université de Franche-Comté. Céline Reylé a déjà publié plus d’une centaine d’articles scientifiques dans des revues internationales
Céline Reylé est astrophysicienne, attachée au laboratoire Utinam de l’Observatoire de Besançon.
Le consortiumGaia, du nomd’une mission spatiale développée par l’Agence spatiale européenne (E.S.A.), consacrée à la mesure de la position, de la distance et du mouvement des étoiles dans la galaxie. Cette mission Gaia a été honorée “pour avoir permis une carte multidimensionnelle de la voie lactée, qui transforme la vision de notre galaxie” résume l’institut Utinam, le laboratoire d’astrophysique de l’Observatoire de Besançon auquel Céline Reylé est rattachée. Depuis son lancement en 2013, le satellite Gaia qui tourne autour du soleil à une distance d’1,5 mil lion de kilomètres de la Terre a enregistré les positions, les dis tances, les couleurs et les mou vements propres de près de deux milliards d’étoiles de notre galaxie. “Depuis près de dix ans, Gaia scanne tout le ciel et à ce
t-elle. Cette mission Gaia a aussi permis des avancées dans les sciences extragalactiques et du système solaire : elle a répertorié 3 millions de galaxies, 2 millions de quasars (noyaux galactiques lointains et brillants) et 156 000 objets du système solaire, y com pris des astéroïdes proches de la Terre. Céline Reylé associe à ce presti gieux prix ses collègues bisontins de l’Observatoire qui comprend trois chercheurs (Annie Robin, Jean-Marc Petit et elle-même) et deux ingénieurs (Gautier Lecoutre et Sékou Diakité). Quand elle n’a pas les yeux rivés sur son ordinateur, Céline Reylé sait s’adonner à une passion bien différente : la décoration. Une manière peut-être de mettre des étoiles dans les yeux de ses proches… n J.-F.H.
donner le vertige… C’est la livraison des dernières données de Gaia aumonde scien tifique qui a valu au consortium cette récente distinction inter nationale. “On commence à obte nir les données de la quatrième mission de Gaia, nous pourrons les publier dans leur intégralité d’ici 2025” ajoute la Bisontine. Pour mesurer l’ampleur des tra vaux du consortium, pas moins de trois articles scientifiques sont publiés en moyenne chaque jour à partir des travaux issus de Gaia. “Ces résultats ont un impact énorme dans toute la commu nauté scientifique” reconnaît la chercheuse. Une de ses fonctions dans le consortium est de “com parer les récentes données avec le modèle de ce qu’on a baptisé la “galaxie de Besançon” mis au point par une de mes collègues il y a une trentaine d’années” ajoute
jour a mesuré et cartographié en 3D 1,8 milliard d’étoiles de notre galaxie la voie lactée. C’est énorme, mais à la fois infime quand on sait que notre galaxie compte 180 milliards d’étoiles…” syn thétise Céline Reylé. Pour tenter de se représenter l’infini grand, on peut préciser que l’étoile la plus proche de notre système solaire, et faisant partie de la voie lactée est distante d’environ
4,2 années-lumière (c’est-à-dire la dis tance que parcour rait la lumière pen dant 4,2 ans) et que la voie lactée s’étend elle-même sur 100 000 années lumière… La voie lactée étant une des 2 000 milliards de galaxies que compte l’univers…De quoi
La voie lactée s’étend sur 100 000 années lumière…
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