La Presse Bisontine 223 - Novembre 2020

LE PORTRAIT

43 La Presse Bisontine n°223 - Novembre 2020

RECHERCHE

Une haute distinction scientifique

Daniel Hissel reçoit la médaille de l’innovation du C.N.R.S.

Le chercheur rattaché à l’Institut F.E.M.T.O.-S.T., a très tôt misé avec son équipe sur le développement de l’hydrogène, en travaillant de façon un peu précurseur sur l’intégration des piles à combustible.

O n en entend de plus en plus parler dans le sec- teur de l’énergie et des transports. Pourtant, cela ne paraissait pas si évident il y a encore 15 ans. Comme souvent dans la recherche, il a d’abord fallu explorer l’inattendu. “Vou- loir développer l’intégration de la pile à combustible, qui n’était pas mature à l’époque, paraissait anachronique” , concède Daniel Hissel. Après l’obtention de son diplôme d’ingénieur en génie électrique, puis un passage àAlstomTrans- port àTarbes, c’est pourtant bien dans cette direction que ce Lor- rain d’origine se dirigera. “J’ai rejoint Belfort où se créait un département de recherche autour des systèmes de pile à hydrogène.

contrer son marché au bon moment. “L’hydrogène se présente comme une des solutions dans la transition énergétique et la décarbonisation. Il coche toutes les cases, d’un point de vue éco- logique à condition qu’il soit pro- duit de façon propre, d’un point de vue économique avec de nom- breux marchés à prendre (véhi- cules lourds et légers, bâtiments… ) et d’un point de vue sociétal en favorisant le circuit court.” Tout en sachant que l’hydrogène est l’élément le plus abondant de l’univers. “Si on ne s’y intéresse pas, on a raté quelque chose !” La réception en juin dernier de cette médaille de l’innovation du C.N.R.S. (qui salue des recherches ayant conduit à des innovations majeures) couronne “un travail collectif” , rappelle Daniel Hissel, “qui se poursuit aujourd’hui. Nos sujets de recherche initiaux restent d’actualité. On travaille à amé- liorer la durabilité et l’efficience de la pile à combustible, ce qui permettra aussi de réduire les coûts.” Et bien que la Bourgogne- Franche-Comté se soit montrée précurseur sur la question, “il reste à transformer l’essai” comme l’explique par ailleurs ce pas- sionné de rugby. En dehors de son laboratoire, c’est à un autre type d’énergie que se consacre ainsi cet entraîneur. Mais cela, c’est une autre histoire… n S.G.

Le chercheur franc-comtois défend néanmoins ce position- nement original. “On partait du principe que l’objet pile à com- bustible serait mature assez vite grâce aux autres travaux de nos collègues électro-chimistes. Et cela a été le cas. Petit à petit, l’équipe s’est structurée. On a développé des projets de recherche partenariaux avec différents industriels.” L’accompagnement des structures académiques et des collectivités a permis la créa- tion du F.C.L.A.B. : une fédéra- tion de recherches dédiée qui regroupe cinq laboratoires (dont l’université de technologie Bel- fort-Montbéliard, l’université de Franche-Comté ou encore de l’université de Lyon 1), installée au Techn’Hom de Belfort. “ Aujourd’hui, nous sommes plus d’une centaine.” Les travaux de recherche enga- gés ont également conduit Daniel Hissel à créer la start-up “H2sys” en 2017 avec cinq associés (qui emploie désormais dix salariés et poursuit son développement en commercialisant notamment des groupes électrogènes avec des systèmes piles intégrés). Ce transfert vers le milieu industriel est une de ses sources de fierté. “Nous travaillons aussi à cette valorisation.” Le chercheur se montre d’autant plus enthousiaste que cette thé- matique, passée de l’émergence à la concrétisation, semble ren-

Bio express

l Diplômé de l’École Nationale Supérieure d’Ingénieurs Électriciens de Grenoble (E.N.S.I.E.G.) en 1994 l Directeur de la Fédération de

Recherche (F.C.L.A.B.) entre 2012

et 2019, il a publié plus de 450 articles dans des journaux et conférences internationales l Il est récipiendaire de la médaille Blondel 2017 et de la médaille de l'Innovation 2020 du C.N.R.S.

Nous étions trois ou quatre à tra- vailler là-dessus. On nous trouvait avant-gardistes et cela se com- prend, quand on sait que leur durée de vie tour- nait alors autour d’une dizaine d’heures. Dire qu’onmettrait ça dans des véhi- cules plus tard paraissait impensable. Per- sonne n’y croyait.”

“Personne ne croyait à la pile à combustible.”

“C’est un grand plaisir de voir aujourd’hui ce vecteur hydrogène être repris dans l’économie”, remarque Daniel Hissel (photo C. Fresillon).

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