La Presse Bisontine 193 - Décembre 2017

BESANÇON 16

La Presse Bisontine n° 193 - Décembre 2017

HISTOIRE Témoignages d’anciens cheminots Ils ont connu le charbon… Voyage dans le temps à l’époque des locomotives à vapeur. Un demi- siècle plus tard, des anciennes “gueules noires” bisontines témoignent.

C’ est un temps que les ex-cheminots de moins de 85 ans ne peuvent connaître… elui du charbon et de la sueur, mais aussi où noblesse et héroïs- me rimaient encore avec le métier, dont l’image est aujour- d’hui bien égratignée. Michel Garrigues et Gilbert Taton, deux Bisontins nés respectivement en 1930 et 1929 font partie de ces derniers cheminots encore en vie ayant connu la traction à vapeur. Malgré des conditions

de travail effroyables à cette époque, la nostalgie est bien palpable chez ces passionnés du rail, sans doute liée à l’em- prise corporative du milieu. Après l’obtention du C.A.P.Ajus- teur, ils entrent tous deux à 17 et 18 ans au service du dépôt de Besançon, avant de com- mencer le métier en 1957. À cet- te époque, deux cheminots occu- paient la cabine : le “mécanicien”, autrement dit le chef, qui conduisait la locomo- tive, et le “chauffeur” qui entre-

tenait le foyer. Les deux Bison- tins commenceront en bas de l’échelle, au poste de chauffeur. “Nous subissions les intempé- ries : les grands froids et les grandes chaleurs, avec parfois des pics à 40 °C dans la cabi- ne, rapporte Gilbert Taton. Le foyer était ouvert toutes les cinq minutes. Il fallait perfectionner son “coup de pelle” pour bien répartir le charbon, au risque de se brûler en l’étalant de nou- veau avec un pic. On recevait aussi régulièrement des escar- billes dans les yeux.” Les machines pouvaient atteindre les 120 km/h. Un ten- der, wagon spécial placé après la locomotive, assurait son approvisionnement en charbon et en eau. Il pouvait accueillir jusqu’à 30 000 litres d’eau et dix tonnes de charbon.À chaque montée - on citera notamment celle le long de la Citadelle de Besançon - il fallait pelleter davantage, asphyxiant encore plus les chauffeurs. Mais d’autres dangers guettaient les cheminots : les traumatismes crâniens lorsqu’il fallait sortir la tête pour identifier les signaux. Si Gilbert Taton ne s’est frotté qu’à une buse qui a fini sa course contre son visa- ge, d’autres auront eu moins de chance, notamment avec les chocs aux entrées de tunnel. Il fallait aussi composer avec les

Les deux anciens cheminots, Gilbert Taton à gauche et Michel Garrigues, portent encore aujourd’hui les stigmates d’un métier difficile.

risques liés au manque d’eau dans la chaudière : l’engin devait impérativement rouler entre 12 et 16 bars, en dessous de quoi on “battait la grolle”, dans le jargon. “Je me rappelle un parcours Montbéliard-Dole, un des plus longs. Nous avions bat- tu la grolle entre Montbéliard et Besançon, avec une perte de quatre minutes. À Besançon, lors de la réfection du feu, nous avions basculé l’ancien feu dans le cendrier, une grande cuve en dessous du foyer. Mais celui-ci était plein. Les charbons sont alors tombés sur la voie, brû-

toujours amis aujourd’hui, et qui ont connu par la suite la transition vers le diesel et l’élec- tricité. “Nous méritions, tout comme les mineurs, notre retrai- te à 50 ans. Aux conditions de travail s’ajoutaient les horaires décalés, le travail de nuit et les dimanches, la difficulté de prendre des congés…Un grand coup de chapeau à nos épouses qui n’ont pas eu un rôle facile, entre l’éducation souvent seule des enfants, et la préparation des gamelles pour deux ou trois jours.” n C.G.

lant huit traverses en bois sur les voies. Nous nous étions pris une sacrée soufflante” raconte hilare Michel Garrigues.

Malgré tout, les retards et les incidents étaient beaucoup moins fréquents qu’au- jourd’hui. La nostalgie des copains, du tra- vail en équipe, de la bonne entente n’a jamais quitté les deux camarades,

“Des pics à 40 °C dans la cabine.”

À Besançon, une locomotive à vapeur dans

les années cinquante.

EN BREF

SANTÉ

Des vies sauvées Plus de 200 personnes en attente de transplantation en Franche-Comté

Secours Populaire Le Secours Populaire de Besançon organise un loto dimanche 19 novembre à 14 heures au complexe sportif de la Malcombe (88 quines d’une valeur globale de 4 500 euros, dont des bons d’achat de 15 à 500 euros et une T.V. L.E.D. 102 cm). Il organise également une braderie de jouets les 28, 29 et 30 novembre, salle de la Malcombe. Renseignements au 03 81 25 43 69. Citadelle Grâce aux bons soins du Muséum et de ses équipes animalières, le couple de Lémurs couronnés de la Citadelle de Besançon, Kanto et Électra, a donné naissance à un premier petit en 2016 puis à un deuxième en 2017. Deux naissances porteuses d’espoir pour la sauvegarde de cette espèce classée en danger sur la liste rouge de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature et peu commune en Europe (seulement 75 adultes et 7 jeunes dans les parcs zoologiques du continent). Dans le cadre du programme d’élevage européen de cette espèce, le jeune mâle né en 2016 est parti le 13 novembre pour la Réserve zoologique de Calviac (Dordogne).

Un arbre de vie a été inauguré au C.H.U. Minjoz à Besançon en hommage aux donneurs d’organes, encore trop rares. 91 greffes y ont été réalisées l’an dernier.

Le D r Sabine Verdy (au centre) et les infirmières Élise Mougin et Lætitia Bazin du C.H.U. Minjoz rappellent qu’on peut se procurer une carte de donneur sur Internet ou auprès d’associations.

L es besoins sont grands. En 2016,21 464 personnes étaient en attente d’une transplantation en Fran- ce. Quand on sait que seules 7 000 greffes sont réalisées en moyenne par an, on voit bien que du chemin reste à faire. L’écart se creuse encore avec les nouveaux inscrits, au nombre de 8 000 l’an dernier. Avec les progrès de la médeci- ne, on a toutefois “recours à la greffe plus tôt, parfois avant le traitement par dialyse”, recon- naît le Dr Sabine Verdy, méde- cin au service de coordination des prélèvements du C.H.U. bisontin. La majorité des gref- fons se fait à partir de dons post- mortem et non du vivant (ces derniers restant limités au rein et à la moelle). Parmi les premiers centres auto- risés, le C.H.U. Minjoz pratique depuis 1987 tous types de pré- lèvements ainsi que les greffes

de foie et de rein. C’est ici qu’ont d’ailleurs eu lieu les toutes pre- mières greffes de foie en lien avec l’échinococcose alvéolaire, pour laquelle il reste centre de référence mondiale. Au niveau des tissus, le C.H.U. transplan- te également cornées, vaisseaux, valves cardiaques et prélèvera aussi bientôt la peau, utile notamment aux grands brûlés. Voulu comme un symbole, son nouvel arbre de vie, qui prend la forme d’un sticker, a été ins- tallé dans le hall d’accueil de

ont laissé des messages. Une initiative qui devrait être bien accueillie par les Francs- Comtois, plus favorables au don d’organes qu’enmoyenne natio- nale : avec un taux de refus à 20 % contre 33 %. L’an dernier, le C.H.U. bisontin représentait, avec l’hôpital de Trévenans, la deuxième région préleveuse de France. 47 personnes en état de mort encéphalique (suite prin- cipalement à desA.V.C.) avaient

fait le choix de donner leurs organes. “Sur le plan légal, c’est le consen- tement présumé qui s’impose” , rappelle Élise Mougin, infir- mière au service de coordina- tion. “Si l’on est opposé au don, il faut soit en parler à sa famil- le, soit remettre un document à son médecin ou à un proche ou s’enregistrer sur le registre natio- nal des refus.” Un travail est, de fait, engagé

avec l’entourage au sein du ser- vice. “On leur laisse le temps de réfléchir.” Car au-delà du choc émotionnel, des inquiétudes demeurent autour du don d’or- ganes d’ordre religieux ou cul- turel, “vis-à-vis du respect de l’intégrité du corps notamment.” D’où l’importance de “faire connaître son choix autour de soi” , conclut Lætitia Bazin, autre infirmière coordinatrice. n S.G.

l’hôpital.Il rem- place le ginkgo autrefois plan- té en extérieur mais déplacé avec les tra- vaux. Ses racines évo- quent les don- neurs et ses branches, les greffés, qui y

Un consentement présumé pour tous.

Made with FlippingBook Annual report