La Presse Bisontine 188 - Juin 2017

L’INTERVIEW DU MOIS

La Presse Bisontine n° 188 - Juin 2017

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SOLIDARITÉ Leur combat contre la maladie les 8 et 9 juin

“Notre démarche est citoyenne, humaniste, solidaire”

L a Presse Bisontine : Pourquoi déployez-vous autant d’énergie pour informer sur le don de moel- le osseuse ? Alexandre Chouffe (vice-président de l’as- sociation Sapaudia Franche-Comté) : En 2009, je suis appelé par mon ami Sylvain Guillaume (médaillé de combiné nordique aux Jeux olym- piques) qui me demande de parti- ciper à une épreuve de soutien pour le fils de Jean-Luc Crétier, touché par une leucémie. J’ai tout de sui- te dit oui. J’ai mobilisé mon entou- rage, je me suis inscrit comme don- neur de moelle en 2009 et j’ai ramené avec Sylvain la Sapaudia à la Transjurassienne pour faire connaître ce don gratuit,mal connu. L.P.B. : Et puis, la maladie touche deux personnes de votre entourage… A.C. : Manu Claret qui était venue en tant que sportive sur la Trans- jurassienne pour soutenir la Sapau- dia avait décidé de prendre le flam- beau. C’était avant qu’elle ne tombe malade. Dans le même temps, la petite Fanny, notre voisine qui est du même âge que mes enfants avec qui elle jouait, décédait de la même maladie à quelques heures d’in- tervalle. Elle rêvait d’être cham- pionne de ski. Elles auraient pu être sauvées si elles avaient eu un donneur compatible. 2 000 patients en France sont touchés par le can- cer du sang : c’est 12 décès par jour dont 6 enfants. Si on trouve la com- patibilité avec l’association Sapaudia militent pour le don de moelle osseuse, acte gratuit qui consiste en une simple de prise de sang. Parce qu’ils ont perdu une amie emportée par la leucémie, Alexandre Chouffe et les bénévoles de

Alexandre Chouffe sera

jeudi 8 et vendredi

9 juin dans le “Défi pour des vies” pour porter le message du don de moelle osseuse.

Information à Besançon le 8 juin.

miers se sont déplacés. 50 per- sonnes ont pu s’inscrire. L.P.B. : Qui peut devenir “veilleur de vie” ? A.C. : Toutes les personnes de 18 à 51 ans en bonne santé. C’est un acte gratuit et anonyme. Nous n’avons rien à vendre : c’est une démarche citoyenne, humaniste, solidaire. 70 % des donneurs sont des femmes. Nous recherchons des hommes notamment de 18 à 30 ans car les hommes sont plus souvent compatibles. L.P.B. : L’association multiplie les infor- mations envers le grand public, dans les entreprises, les lycées. Quel bilan ? A.C. : Je n’aime pas tenir de sta- tistiques mais nous savons que nous avons envoyé des milliers de candidatures de “veilleurs de vie”. Plus nous recrutons, plus nous sauverons. Notre rôle est de recruter, sensibiliser, engager, pas de quantifier. Nous sommes allés dernièrement informer les sala- riés de la société Gardavaud, le Crédit Agricole de Franche-Com- té, les cabinets comptables, les clubs sportifs. Nous discutons avec d’autres très grosses entre- prises. L.P.B. : Qu’est-ce qui vous pousse à vous mobiliser autant ? A.C. : Ce sont par exemple les témoi- gnages de personnes comme Sophie. Cette maman d’un bébé à qui on a détecté une leucémie - alors qu’elle venait de donner naissance - a été sauvée. Elle n’avait pas de donneur compa- tible jusqu’au dernier moment.

Finalement, deux cordons ombili- caux l’ont sauvée. Comme elle le raconte si bien, Sophie nous a dit qu’on lui a redon- né vie une secon- de fois. Elle a sa date de naissan- ce et la date à laquelle elle a reçu sa poche de sang. C’est sa deuxième nais- sance. Cela fait six ans aujour- d’hui. L.P.B. : Ces histoires humaines, terribles, touchent. Est-ce plus facile pour faire pas-

sède toutes les compétences. Nous n’aurions pas eu cet effet boule de neige sans l’appui des méde- cins. L.P.B. : Vous mobilisez au niveau régio- nal. Quels sont vos objectifs pour por- ter plus haut votre message ? A.C. : Soit on s’essouffle, soit on trouve une action nationale et internationale. Nous devons essai- mer notre message pour que d’autres associations le relaient. Le don de moelle appartient à tout le monde. L.P.B. : Pourquoi cet événement “Un défi pour des vies” les 8 et 9 juin, le premier du genre en Franche-Comté ? Il transi- te et s’arrête à Besançon. A.C. : Nous ferons 450 km en une seule étape, de jour, de nuit. Le but est de partir ensemble, arri- ver ensemble. Chacun va aider l’autre. Il n’y a plus de différence entre les individus : chacun est dans le même défi, le plus fort aidant le plus faible. Le bus d’in- formation s’arrêtera à Morteau, Besançon, Champagnole, Pon- tarlier. À Besançon, les cyclistes passeront devant la Maison des familles.Un bus informera le 8 juin et accueillera les participants à la salle de sport Besançon Fitness chemin des Planches (en soirée). Toutes les communes traversées ont été informées de notre pas- sage, de notre combat. 100 béné- voles nous aideront. n Propos recueillis par E.Ch.

vrai combat ? A.C. : Notre combat est d’informer. Il a du sens, il n’enrichit person- ne mais donne au contraire de l’espoir. Notre but est que le plus grand nombre de personnes puis- sent donner car elles peuvent sau- ver de leur vivant leur enfant, leur neveu ou nièce, ou un étran- ger. C’est un don qui se fait de son vivant, un cadeau pour une personne qui attend dans l’une des nombreuses chambres sté- riles à l’hôpital de Besançon qu’un donneur compatible soit trouvé. Le malheur de Manu a fait le bon- heur d’autres familles car sans elle, nous aurions moins progressé dans notre combat d’information. Ce travail que l’on mène, on en aura la récompense dans les années à venir ! L.P.B. : Pourquoi ce don fait-il peur ? A.C. : Car il est méconnu. Il s’agit simplement d’une prise de sang qui permet de vous enregistrer dans une base de données et ce n’est pas une grande aiguille que l’on vient vous planter dans le dos. Cela fait moins mal qu’une ampoule au pied. Les prises de sang se font à Besançon ou à Bel- fort. Nous sommes justement en train de demander pour que d’autres sites soient ouverts. Nous avons réussi à faire monter des membres de l’Établissement Fran- çais du Sang aux Rousses car près de 100 personnes étaient prêtes à donner pour la petite Emma, touchée par la maladie… Pro- blème, elles devaient prendre un jour de congé pour venir. Après notre insistance, médecin et infir-

Bio express

l Originaire de Voujeaucourt Habite Labergement-Sainte-Marie l

42 ans

l

l Ancien cycliste professionnel (Big Mat) de 1999 à 2002 l Chef d’entreprise Vice-président de l’association Sapaudia Franche-Comté

“Le plus fort aide le plus faible.”

d’autres personnes, ce sera autant de décès en moins. En France, nous avons seulement 250 000 veilleurs de vie contre 6 millions en Allemagne. Ces per- sonnes sont inscrites après avoir fait une prise de sang et sont appelées le jour où un donneur compa- tible est identifié. Moi, depuis 2009, je n’ai par exemple pas été appelé. Mais je peux donner à n’im- porte qui dans le monde.

ser le message ? A.C. : Oui, mais on ne fait pas pleu- rer les gens. Nous leur disons bien que ce don de leur vivant, c’est un cadeau à l’inverse du don d’or- gane qui se fait souvent à sa mort. Un malade a 1 chance sur 4 d’être compatible avec un frère ou une sœur, mais seulement 1 chance sur 1 million en dehors de la fra- trie avec une personne prise au hasard. L.P.B. : Le milieu médical vous soutient. Un commentaire ? A.C. : Nous bénéficions à Besan- çon avec les professeurs d’un centre de cancérologie qui pos-

“Notre combat est d’informer.”

Un défi pour des vies jeudi 8 et vendredi 9 juin à Besançon et Pontarlier : defi-sapaudia-2017.ekablog

L.P.B. : C’est devenu un

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