La Presse Bisontine 174 - Mars 2016

DOSSIER

La Presse Bisontine n° 174 - Mars 2016

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Besançon

Porosité entre religion et politique La Fraternité Saint-Pie X, une communauté à part

On les appelle les catholiques intégristes. À Besançon, ils n’ont pas d’église. Leur chapelle se situe dans un ancien entrepôt qu’ils ont aménagé rue Lyautey dans le quartier Saint-Claude.

C haque dimanche, dans le quartier Saint-Claude, la rue Lyautey s’anime. Il est 10 heures, l’heure de la mes- se pour les fidèles de la Frater- nité Sacerdotale Saint-Pie X. Ce sont les catholiques inté- gristes (ou schismatiques). Leur communauté est née en 1970 à l’initiative de Monseigneur Lefebvre en réaction au Conci- le Vatican II qui marque le vira- ge de la modernité pour l’Église, dont il a rejeté les principes. Une rupture qui a conduit ces catholiques à se marginaliser. En général, l’autorité religieu- se ne leur accorde pas d’église pour célébrer la messe, ou alors exceptionnellement, en fonction des diocèses, pour les mariages et les enterrements. À Besançon, ils se réunissent dans un ancien entrepôt réamé- nagé au bout de la rue Lyautey qui est devenu la Chapelle Saint- Ferréol et Saint-Ferjeux. “On nous appelle les intégristes, alors que nous ne faisons que célébrer la messe en latin à la manière

de nos ancêtres. L’Église moder- ne s’est adaptée au monde. Elle a démantelé les fondements du christianisme” juge sur un ton catégorique un des fidèles quelques minutes avant l’office. Une centaine de personnes fré- quentent ce lieu de culte discret chaque semaine. Elles viennent de toute la Franche-Comté. Le prêtre lui-même vient de Dijon. Il s’agit de l’abbé Renaud de Sainte-Marie. “Nous sommes frappés d’une sorte d’ostracisme qui accentue le caractère “étran- ge” de notre communauté qui

L’abbé Renaud de Sainte- Marie : “Cela

m’arrive de dire que la société part à la dérive.”

est marginalisée. En réalité, nous sommes dans une forme de résistan- ce à une corruption de ce qui fait l’essentiel de la vie de l’Église” estime le prêtre en sou- tane qui chaque dimanche dit la messe en latin. Unemesse à la fois recueillie et ritua- lisée. Il lui arrive

“Nous prenons chaque

de mettre en garde ses ouailles contre ces choses que produit la société contemporaine et qui sont contraires à l’Évangile. “Nous sommes contre l’avortement et la contraception. Nous prenons chaque enfant que Dieu nous donne. Nous les bap- tisons dans les premiers jours de leur naissance” explique une femme de la Fraternité Saint- Pie X. Elle rejette en bloc le pro-

grès de l’Église qui s’ouvre petit à petit aux évolutions de la socié- té, en accueillant par exemple les couples divorcés-remariés. Pendant ses sermons, le prêtre commente parfois ces change- ments. “Cela m’arrive de dire que la société part à la dérive. Mais l’analyse est complexe. On peut avoir conscience des pro- blèmes globaux de la société. Les réponses qu’on y apporte sont à

notre échelle” reconnaît le père de Sainte-Marie. “Revenons aux fondamentaux. Les gens atten- dent des choses qui les structu- rent. Ils veulent des certitudes” affirme une jeune croyante. La fraternité Saint-Pie X reven- dique son caractère conserva- teur au point que la frontière entre la religion et la politique devient parfois poreuse. Des fidèles affichent clairement leur

attachement au Front Natio- nal. Pas au F.N. de Marine Le Pen, mais à celui de son père Jean-Marie “qui défend les valeurs patriotiques” confie un des fidèles qui a milité au F.N. Ce n’est pas un hasard si le mou- vement Civitas qui porte l’étiquette de l’extrême droite est né au sein même de la Fra- ternité Saint-Pie X. T.C.

enfant que Dieu nous donne.”

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