La Presse Bisontine 170 - Novembre 2015

L’ÉVÉNEMENT

La Presse Bisontine n° 170 - Novembre 2015

LA JUSTICE BISONTINE SOUS LE FEU DES CRITIQUES POLICIÈRES

La justice serait-elle trop clémente en accordant la liberté conditionnelle à des détenus qui récidivent dès qu’ils sont dehors ? Beaucoup de policiers estiment que oui au regard des dernières affaires qui ont fait la une de l’actualité. Les magistrats se défendent en disant qu’ils ne font qu’appliquer strictement la loi.

Les policiers ont une dent contre la justice Manifestation Un ras-le-bol palpable Le moral n’est pas au plus haut du côté des policiers. Ils ont le sentiment que par les décisions que la justice

excès de vitesse. Si vous commettez un vol pour la première fois, il y a de fortes chances qu’au tribunal on vous fasse la morale et un rappel à la loi. Et vous sortirez libre. En revanche, si vous vous faites prendre en excès de vitesse, vous aurez une amende à payer et vous ris- quez un retrait de permis. Je ne cherche en aucun cas à excuser ce genre de ges- te, mais à mon sens la justice fait trop souvent preuve de laxisme dans l’ap- préciation des affaires qu’elle juge. J’ai en mémoire l’histoire d’un délinquant qui avait volé une voiture et qui condui- sait ivre. Nous l’avons arrêté sept fois avant qu’il aille en prison. Vous ima- ginez s’il avait tué une famille dans un accident ? Qu’aurait-on dit ? À mon sens, cet homme a été mis hors d’état de nuire beaucoup trop tard” témoigne le gendarme. La magistrature réfute l’accusation des policiers selon laquelle ils feraient preuve de laxisme. “Au contraire, la loi est dispensée de façon très sévère par les tribunaux” dit-on du côté du Palais de Justice. Ils pensent que la justice et la police fonctionnent main dans la main. Thierry Silvand n’en est pas convaincu. “Si nous travaillions aus- si bien ensemble, nous ne serions pas là à manifester devant le Palais de Jus- tice” termine le représentant syndical qui estime qu’il y a eu “trop de loupés” ces derniers temps du côté de l’insti- tution judiciaire. Les policiers en paient les pots cassés. T.C.

sé par Winston Blam. Ce braqueur multirécidiviste n’avait pas regagné son centre pénitentiaire après avoir bénéficié d’une permission de sortie le temps de régler des problèmes de suc- cession suite au décès de son père. Le malfrat de 24 ans était en cavale depuis le printemps. Cette affaire a consterné les policiers et soulevé leur colère. “L’histoire est horrible. C’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Il y a trop longtemps que ça couvait. Nous en avons assez d’être pris pour des idiots. Cette fois on dit stop. On veut que la loi soit appli-

quée avec une fermeté proportionnelle à l’in- fraction” observe Thier- ry Silvand, du syndicat F.P.I.P. (Fédération pro- fessionnelle indépen- dante de la police). L’exaspération des poli- ciers est montée d’un cran à Besançon quand ils ont appris le 7 octobre qu’un détenu de la mai- son d’arrêt avait profité d’une sortie àV.T.T. pour s’échapper. “Franche- ment, on a l’air de quoi ? On marche sur la tête !”

prend vis-à-vis de certains délinquants, c’est leur travail qui est remis en cause.

L e 14 octobre à midi, une cin- quantaine de policiers en civil a manifesté en silence sous les fenêtres du Palais de Justice de Besançon. Ils entendaient dénon- cer ce jour-là, comme partout en Fran- ce, des conditions de travail de plus en plus dures, et une justice trop souple

lorsqu’elle accorde une permission à des détenus qui, malheureusement parfois, récidivent en liberté. Les policiers présents avaient tous en tête le drame de Seine-Saint-Denis qui s’est noué le 5 octobre, lorsqu’un de leur collègue de la Brigade anti-cri- minalité (B.A.C.) a été grièvement bles-

“Il vaut mieux commettre un vol qu’un excès de vitesse.”

s’exaspère un policier manifestant qui se demande aujourd’hui s’il ne va pas quitter les forces de l’ordre dans les- quelles il est entré par passion il y a une quinzaine d’années. “On n’a plus de moyens de bosser. Il n’y aucune recon- naissance de notre hiérarchie. Et quand on arrête trois, quatre, ou cinq fois les mêmes délinquants qui passent devant les tribunaux et qui bénéficient d’amé- nagements de peine, on se demande à quoi on sert.” Le 14 octobre, un gendarme s’est joint aux fonctionnaires de police attroupés devant la porte du Tribunal de Gran- de Instance. Le militaire en fonction dans le Grand Besançon est venu par solidarité avec ses collègues dont il partage les préoccupations. “J’en suis arrivé à la conclusion que dans ce pays, il vaut mieux commettre un vol qu’un

Une cinquantaine de policiers en civile a manifesté le 14 octobre sous les fenêtres du Palais de

Justice de Besançon.

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