La Presse Bisontine 170 - Novembre 2015

BESANÇON 12

La Presse Bisontine n° 170 - Novembre 2015

L e C h i f f r e

TRAM ET BUS

Lutte contre la fraude

De 800 à 1 000 P.V. par mois sur le réseau de transports en commun La fraude est un fléau qui

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19 octobre, les Suisses n’avaient pas

encore vu la couleur de ce joli pactole. Au pays de la préci- sion horlogère, le manque de ponctualité de la Grande Nation agace Pascal Broulis, conseiller d’État,chef du dépar- tement des finances et des rela- tions extérieures du canton de Vaud. D’autant que ce n’est pas la première fois que la France joue les mauvais payeurs. “Ça pêche à Bercy au niveau technocratique et pas politique. Cela donne un sen- timent d’amateurisme” dit-il. La France doit par exemple 93millions d’euros au seul can- ton de Vaud.

C’ est enmillions d’euros la somme que doit le ministère des Finances français à huit cantons suisses au titre d’une rétrocession rela- tive aux impôts prélevés par l’État français sur les revenus des travailleurs frontaliers. Un accord signé en 1983 entre la France et ces cantons pré- voit le versement le

N athalie prend régulièrement le tramdepuis lemois demai pour se rendre à son travail. Titu- laire d’un abonnement payé en partie par son employeur, elle sait pré- cisément combien de fois elle a pris place à bord d’une rame. “À la date du 15 octobre, je suis montée dans le tram à 120 reprises. Sur cette période, je n’ai été contrôlée qu’une fois” annonce l’usagère, salariée dans le social, sur- prise d’avoir eu à rendre aussi peu de comptes aux contrôleurs. “Franche- ment, c’est facile de frauder. D’ailleurs, j’ai l’impression que la plupart des gens coûte cher à Besançon Mobilité qui exploite le réseau de transports en commun. La stratégie mise en place pour lutter contre ce problème est insuffisante pour beau- coup de chauffeurs.

30 juin au plus tard de cette redevance annuelle qui cor- respond à 4,5 % de la masse salariale brute. Or, le

les contrôleurs étaient plus nombreux. Les gens les voyaient sur toutes les lignes de bus. Ils savaient qu’en absen- ce d’un titre de transport, ils risquaient d’être amendés. Aujourd’hui, on ne voit pas les contrôleurs. Ils sont débordés. Les usagers se rendent compte de cela. Ils savent qu’ils ont peu de chance de se faire attraper. Je vois les gens qui montent dans le bus sans prendre de ticket. C’est lamême chose dans le tram.” Pas vu pas pris. Selon les chauffeurs de bus, la fraude actuelle sur le réseau bisontin est sous-

des gamins, les plus faibles qui ne peu- vent pas courir” ironise un salarié de Besançon Mobilité. Le montant des amendes n’est pourtant pas anodin : 34,50 euros pour un titre non valable, 51,50 euros pour l’absence d’un titre, et 169 euros pour insulte à un contrô- leur ou dégradation. La plupart des contrôleurs redoutent désormais d’être agressés comme ce fut le cas récem- ment pour une équipe en service qui a été prise à parti. Si les contrôleurs dressent des P.V. en nombre, les contrevenants ne paient pas leur amende sur le champ. D’après nos renseignements, le taux de recou- vrement est de 50 %, et de plus en plus de personnes demandent des facilités de paiement. “Si vraiment on voulait lutter efficacement contre la fraude, ce ne sont pas 16, mais 50 contrôleurs qu’il faudrait mettre en poste sur un réseau comme celui-là. On verbalise- rait un temps, mais les gens compren- draient vite qu’il vaut mieux prendre un ticket” estime un chauffeur de bus convaincu que seule la peur du gen- darme permettra d’enrayer le phéno- mène de la fraude dans les transports en commun bisontins. T.C.

Trop d’usagers considéreraient aujourd’hui qu’il est facile de frauder.

septembre 2014, le système de contrô- le des usagers a changé. Avant, il y avait 28 contrôleurs sur le réseau, qui étaient également chauffeurs de bus. Désormais, il n’y en a plus que 16 ! Moins nombreux, ils fonctionnent par équipe de quatre mais sont entière- ment dédiés à cette mission de contrô- le. En professionnalisant le contrôle, Besançon Mobilité espère lutter de manière plus efficace contre la frau- de. “On attend de mesurer les fruits de cette stratégie. Le problème dans les transports en commun, c’est l’inertie qui est forte. Il faut du temps avant que les usagers intègrent le fait que s’ils voyagent sans titre de transport, ils prennent le risque d’être contrôlés et sanctionnés” dit-on du côté de l’exploitant. Le nombre de procès-verbaux dressés par les contrôleurs depuis la mise en service du tram donne une idée de l’ampleur de la fraude. Selon nos infor- mations, entre 800 et 1 000 P.V. par mois sont délivrés sur le réseau, c’est presque cinq fois plus qu’avant le tram. Qu’est-ce qui a changé en si peu de temps ? “ La présence, tout simplement rétorque un chauffeur de bus. Avant,

qui prennent le tram avec moi n’ont pas ticket” remarque Nathalie.À écou- ter cette passagère, la fraude dans les transports en commun à Besançon serait de grande ampleur. En réalité, BesançonMobilité qui exploite le réseau estime que le coût de la fraude avoi- sine les 700 000 euros par an, soit 7 % des recettes qui s’élèvent à 10 millions d’euros. Depuis la mise en service du tram en

estimée. Elle serait plus forte le matin, le soir et le samedi. “C’est impos- sible de contrôler un bus articulé aux heures de pointe avec 200 personnes à bord, comme c’est très difficile de contrôler un tram à quatre contrôleurs qui se mettent aux deux portes (N.D.L.R. : il y en a quatre sur une rame), quand cinquante per- sonnes descendent en même temps. Il faudrait être au moins six ou huit pour être efficace. On va verbaliser des mamies,

“Les contrôleurs sont débordés.”

Il faudrait plus de contrôleurs pour mieux lutter contre la fraude.

SOCIAL

Récompense Adultes handicapés devenus pros du tourisme fluvial

Doubs Plaisance est récompensé pour son innovation sociale. L’établissement permet à des personnes handicapées de s’ouvrir au milieu ordinaire avec un modèle économique et social.

T out est parti de la crise de 2008. À cette époque, les sous-traitants auto- mobiles baissent leurs commandes. Parmi les premiers touchés, les établissements qui font travailler des personnes handicapées. En 2009, Solida- rité Doubs handicap (S.D.H.) fait le pari de “reconvertir” des salariés handicapés dans le domaine du tourisme. Elle en emploie 170. L’établissement répond. Il remporte l’appel à projet du Grand Besançon pour la gestion de son port fluvial, à Besançon. Six ans plus tard, Agnès Brutillot qui avait des difficultés au départ à commu- niquer avec les touristes sait désormais les conseiller, les accueillir, les renseigner sur ce qu’il ne faut pas manquer dans la cité Vauban. “Je sais même

échanger quelques mots en alle- mand et en anglais. Je peux leur expliquer où aller manger. Nous avons même reçu des Sud-Afri- cains…” explique la jeune fem- me avec un large sourire. Elle et ses collègues réalisent le ménage dans les bateaux mis en location.

aux travailleurs handicapés de développer leurs compétences techniques et relationnelles et facilite ainsi la passerelle entre milieu protégé et milieu ordi- naire” explique le directeur adjoint.Un nouveau travail valo- risant et valorisé. La gestion d’un tel équipement par un E.S.A.T. - Établissement et ser- vice d’aide par le travail - est unique. “Nous essayons, de plus en plus, de nous ouvrir aumilieu ordinaire” , explique Pascal Grandmottet, responsable de la filière tourisme pour l’établissement S.D.H. D’autres activités comme la location de bateaux électriques, l’organisation de croisières pour adultes handicapés et un chan- tier nautique à la halte de Deluz ont été mis sur pied. Pour cette innovation sociale,

Les quatorze tra- vailleurs handica- pés, dont six femmes, se relaient sept jours sur sept à Doubs Plaisance, enca- drés par quatre salariés perma- nents. Leurs inter- locuteurs sont des plaisanciers à 80% étrangers. “Cette nouvelle activité touristique permet

Pour pallier la crise industrielle.

Agnès Brutillot (à droite) est travailleur handicapé. Elle explique son rôle dans l’accueil des touristes à Besançon, halte du Moulin Saint-Paul.

a cassé des barrières entre le monde “ordinaire” et celui du handicap. Elle a ouvert un res- taurant (Le Pixel situé à la Cité des Arts) dont une partie du fonctionnement est assurée par ces travailleurs.

S.D.H. a été récompensée d’un prix de 2 000 euros remis dans le cadre du concours “Rally’Nov” conduit par F.A.C.T. (Franche- Comté Amélioration des Condi- tions de Travail) en partenariat avec R.I.F.C. (Réseau Innova-

tion Franche-Comté) et la C.R.E.S.S. (Chambre Régiona- le de l’Économie Sociale et Soli- daire), avec le soutien financier de l’État et de la Région Franche- Comté. Au-delà de la récompense, S.D.H.

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