La Presse Bisontine 166 - Juin 2015
DOSSIER
La Presse Bisontine n° 166 - Juin 2015
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le mal-être dont en plus en ten- sion et donc très vulnérables par rapport aux troubles mus- culo-squelettiques. Les person- nels sont soumis à des dégra- dations mentales et physiques. 60 % des aides-soignantes du C.H.U. souffrent de l’épaule ou du dos. Il faut savoir que par- mi les patients qu’elles mani- pulent, de plus en plus sont dépendants, grabataires ou obèses. Et comme dans les éta- blissements de soins on encou- rage les hospitalisations courtes, il y a beaucoup plus d’entrées et de sorties de patients, ce qui augmente d’autant les flux et donc la charge de travail des agents. Quand on est infirmiè- re aujourd’hui, mieux vaut ne pas idéaliser le métier, sinon on est tout de suite en souffrance. On ne fait qu’empiler les actes, il y a de moins en moins de rela- tions à l’autre.Même chose pour le personnel des maisons de retraite. Une toilette qui devrait se faire en 45 minutes se fait aujourd’hui en dix minutes avec des audits extérieurs qui chro- nomètrent les actes. On estime que c’est de la maltraitance ins- titutionnalisée. Dans les éta- blissements, on emploie aujour- d’hui des termes de l’industrie ! Le mot productivité n’est plus tabou dans les établissements de santé. L.P.B. : Le directeur du C.H.U. Patrice Barberousse qui quitte ses fonctions en septembre a tout de même réussi à rééquilibrer les comptes de l’hôpital. Un bon point ? C.T. : Il a réussi en effet, avec un
Santé
Les burn-outs se multiplient “Les personnels sont soumis à des dégradations mentales et physiques” Secrétaire générale C.F.D.T. santé sociaux du Doubs, Christelle Tisserand dresse un état des lieux plutôt alarmiste du service public de la santé. Malgré les créations de postes, les conditions se dégradent.
L a Presse Bisontine : Comment se porte le service public de la santé ici dans le Doubs ? Christelle Tisserand : Le système de santé est malade et cette pro- blématique est encore plus gra- ve quand la société va moins bien car les établissements de recours, ce sont les hôpitaux. La santé va mal aussi parce que pour la première fois les dépenses de l’O.N.D.A.M. (Objec- tif national des dépenses d’assurance-maladie) sont à la baisse cette année alors que nor- malement tous les ans, cet objec- tif est en augmentation. Sur le plan national, ça se traduit par 22 000 suppressions de postes. L.P.B. : Le C.H.U. de Besançon aug- mente pourtant chaque année ses effectifs qui atteignent aujourd’hui les 5 000 salariés ! C.T. : L’augmentation des effec- tifs répond à l’augmentation de l’activité mais le problème est
l’insuffisance de la hausse des effectifs. La dégradation des conditions de travail est évi- dente au C.H.U. notamment. Les agents sont rappelés de plus en plus sur leur temps de R.T.T. ou même de congés. L’hôpital dispose d’un pool de remplace- ment pour pallier l’absentéisme ou les absences pour congés de formation mais le problème est
de contrats ne sont pas renou- velés au C.H.U. L’activité au C.H.U. augmente de 5 % par an, c’est énorme. Les effectifs augmentent aussi, mais insuffisamment au lit des patients. Le système de la tari- fication à l’activité génère une course folle qui n’est pas ver- tueuse. On crée artificiellement de l’activité qui n’est pas rému- nératrice. Sur le plan de l’emploi, les contrats précaires augmen- tent, les C.A.E. dans les mai- sons de retraite, etc. On est en train de précariser la santé. L.P.B. : Quelles conséquences sur la santé des agents ? C.T. : Toutes ces sollicitations ont un impact énorme sur la vie des agents et génèrent de l’absentéisme pour des raisons de fatigue. Des personnes en pleurs à deux doigts du burn- out, on en a deux par semaine au téléphone. Et les gens dans
que ce système- tampon n’existe même plus dans les faits tellement les choses sont à flux tendus en per- manence. Et com- me près de 80 % du budget de l’hôpital est consti- tué des dépenses de personnel, si des économies sont à faire, c’est forcé- ment dans ce bud- get-là. Beaucoup
“Une course folle qui n’est pas vertueuse.”
Pour Christelle Tisserand, “c’est aussi la prise en charge des patients qui se dégrade.”
personnel qui s’est suradapté. Mais avec la baisse de l’O.N.D.A.M., il est clair que le C.H.U. va repartir en déficit. Et les agents ne peuvent pas faire plus qu’ils ne font actuellement. On assiste déjà à des choses aber- rantes comme des échanges de personnel entre les pôles. On a
accompagné des équipes vers une organisation en 12 heures de travail car c’était la seule façon de s’en sortir. Mais c’est juste des pansements bien insuf- fisants pour faire tenir cette gros- se machine qu’est l’hôpital. Propos recueillis par J.-F.H.
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