La Presse Bisontine 163 - Mars 2015

BESANÇON

16 La Presse Bisontine n° 163 - Mars 2015

LEUR NOUVELLEVIE DE SÉNATEURS Nouvellement élus au Sénat, Jacques Grosperrin et Jean-François Longeot ont pris leurs repères. L’actualité de la réforme territoriale fait partie de leurs actuelles préoccupations. Mais pas que… Reportage au Palais du Luxembourg. RENCONTRE

Jean-François Longeot “Nous sommes en train de mettre en place un système ingérable” Sénateur et maire d’Ornans, Jean-François Longeot est réservé sur la pertinence de la loi N.O.T.R.E. (Nouvelle organisation territo- riale de la République). S’il est nécessaire selon lui d’entreprendre une réforme, la méthode retenue n’est pas la bonne.

Jacques Grosperrin a vite pris ses marques Le sénateur bisontin a déjà produit deux rapports parlementaires depuis son installation au Palais du Luxembourg. Entouré d’un staff compétent, il prend une certaine hauteur, loin des chicaneries bisontines.

de 70 millions d’euros le budget de l’enseignement supérieur a plié. Sans cela, des facultés ne pouvaient plus payer leurs profs faute de moyens.” C’est finalement le président Hollan- de qui tranchera en exigeant de remettre ces fameux 70 millions. Cet- te première passe d’armes a valu au sénateur bisontin quelques lettres de remerciements de présidents d’université. Le second rapport que Jacques Gros- perrin a rédigé en tant que rapporteur est sorti le mois dernier : il est consa- cré à l’avenir de l’Université des Antilles-Guyane. “Christiane Taubi- ra voulait absolument créer une uni- versité autonome pour la Guyane, en la distinguant de celle des Antilles. Tout cela pour 1 700 étudiants…L’idée de ce rapport était de tenter de sortir de ce conflit. Finalement cette univer- sité sera autonome. Sans cela, on allait devant de vraies tensions en Guyane. C’est assez gratifiant d’être en quelque sorte le chauffeur d’un véhicule légis- latif.” Ce programme à suivre du mardi au jeudi, jours où en général Jacques Grosperrin est à Paris, la rédaction de ces deux rapports parlementaires, les interventions dans l’Hémicycle… : pour préparer son action de parlementai- re, Jacques Grosperrin s’appuie sur trois collaborateurs parlementaires. Deux sont la plupart du temps à Besan- çon (Marie Lambert et Jean Pétre- ment), le troisième, qu’il voit toutes les semaines à Paris l’épaule dans la rédaction des questions et de ses inter- ventions. C’est Jean-René Binet, un professeur de droit qui a longtemps enseigné à Besançon (il enseigne aujour- d’hui à Rennes). Il est la caution juri- dique du sénateur Grosperrin. Quatre mois après son entrée au Palais du Luxembourg, Jacques Grosperrin a pris toutes ses marques. Et de la hau- teur dit-il. “Ce mandat au Sénat me donne notamment plus de sagesse au conseil municipal de Besançon. Je me dois de prendre de la hauteur.” Un ren- dez-vous donné pour 2020 ?… J.-F.H.

L a Presse Bisontine : Dans le micro- cosme politique local, on s’interroge sur votre appartenance possible à l’U.D.I. Avez-vous oui ou non pris une carte à ce parti centriste ? Jean-François Longeot : Ce qui est sûr, c’est que je ne suis plus à l’U.M.P. depuis le 31 décembre. Je n’ai plus d’adhésion. Au Sénat, je suis membre du groupe U.D.I., dans lequel je me sens très bien. Je suis allé vers lui car j’ai eu la garan- tie de conserver mon indépendance tout en partageant les valeurs de l’U.D.I. Mais je n’ai pas pris de carte dans ce parti. En revanche, si je devais prendre une adhésion, je la prendrais au parti radical. L.P.B. : Avant d’être élu en septembre, vous n’aviez jamais eu d’expérience de parlemen- taire. Comment avez-vous vécu vos premiers jours de sénateur ? J.-F.L. : J’ai eu un grand moment d’émotion lorsque j’ai pris mes fonc- tions au Sénat le 30 septembre. Contrai- rement à ce que l’on pense, c’est une institution qui fait un travail impor- tant que ce soit dans les commissions, lors des auditions, ou dans l’hémicycle. L’écoute est importante. Il y a un grand respect entre les sénateurs. L.P.B. :Vous avez voté contre la loi sur la fusion des régions. Pour quelle raison ? J.-F.L. : Cette opération consiste à redé-

couper les régions tout en gardant les départements et en créant des métro- poles. Bref, on conserve à peu près tout, et on fait croire aux gens que la réfor- me territoriale va générer des écono- mies. Ce ne sera pas le cas. Pour faire des économies, il fallait commencer par réduire le nombre d’élus dans les assem- blées départementales et régionales. Or, on fait le contraire. Nous sommes en train de mettre en place un systè- me ingérable. À mon sens, le bon scé- nario aurait été de créer une seule col- lectivité par région née de la fusion des quatre départements dans le cas de la Franche-Comté et qui aurait réuni toutes les compétences. L.P.B. : La fusion de la Bourgogne et de la Franche-Comté va-t-elle créer un déséquilibre à la défaveur de Besançon ? J.-F.L. : La Bourgogne étant plus gran- de que la Franche-Comté, à l’évidence la capitale de la future région sera Dijon. Cela n’est pas la faute du mai- re de Besançon Jean-Louis Fousseret, mais à un projet de loi qui est mal fice- lé. Le seul point que je partage avec cette loi est la nécessité qu’il y a à réfor- mer les collectivités locales, mais il ne fallait pas s’y prendre de cette maniè- re. Tout le reste n’est qu’une trompe- rie pour nos concitoyens.

Pour l’épauler dans son travail de parlementaire, Jacques Grosperrin est entouré de Marie Lambert et du juriste Jean-René Binet.

U n pied à Paris, un autre à Besançon avec désormais une permanence au cœur de la vil- le, au 12, square Saint-Amour. Ce jeudi 22 janvier, c’est à Paris que Jacques Grosperrin passe sa journée. Elle commence par une réunion à 9 h 30 de la délégation sénatoriale à la pros- pective. Les sénateurs présents audi- tionnent Jean-Paul Bailly, ex-P.D.G. de La Poste aujourd’hui président de la délégation à la prospective et à l’évaluation des politiques publiques du Conseil économique et social. La journée se poursuit par la séance publique dans l’Hémicycle notamment consacrée à l’accord France-Irak sur la coopération culturelle, scientifique et technique. L’autre gros morceau de la journée, c’est la fameuse loi N.O.T.R.E. (Nouvelle organisation ter- ritoriale de la République), celle qui modifiera les règles de fonctionnement des collectivités locales, augmentera les seuils des communautés de com- munes et changera en profondeur le mode de gouvernance des petites col- lectivités. Les sénateurs examinent ce texte en deuxième lecture après un premier passage à l’Assemblée Natio- nale. L’après-midi, Jacques Grosper- rin en passe une bonne partie dans l’Hémicycle. C’est le jour des questions-

Entre-temps, pendant la pause de midi, le sénateur discute avec ses deux assis- tants de la question des réserves par- lementaires. “Le lendemain des séna- toriales, on recevait déjà des demandes de maires à ce sujet, explique Jacques Grosperrin. Nous avons 100 000 euros de réserves à distribuer, et le groupe U.M.P. peut nous attribuer quelques milliers d’euros en plus en fonction de notre assiduité. Je fais le choix de sou- tenir les maires dynamiques surtout dans les petites communes rurales, là où les budgets sont les plus serrés. J’ai déjà une trentaine de demandes en exa- men. Il y a un vrai risque de saupou- drage, mais pour des petites communes, même une petite somme est un levier intéressant” estime-t-il. Dès le lendemain de son élection, le sénateur a tout de suite été immergé dans le bain. Début des grandes manœuvres pour la répartition des fonctions et des rôles dans les diffé- rentes commissions. Certainement grâce à son passé de député, le nou- veau sénateur Grosperrin est nommé secrétaire de la commission de la cul- ture, de l’éducation et de la commu- nication. “À peine élu, je recevais un coup de fil de Nicolas Sarkozy qui me dit : “Bravo pour ton élection, tu as mieux réussi que moi…” (N.D.L.R. : M. Sarkozy n’a jamais été sénateur). Il voulait aussi tâter le terrain pour savoir si je soutenais “son” candidat à la présidence du Sénat Jean-Pierre Raffarin.Moi, j’ai soutenu Gérard Lar- cher, il est moins dans la communica- tion que Raffarin” estime le sénateur du Doubs. “Les sénateurs n’aiment pas qu’on guide leur choix de toute façon, c’est ce qui fait aussi la différence avec l’Assemblée.” La première passe d’armes à laquel- le s’est livré le sénateur Grosperrin, c’était sur le budget des universités. Deux mois après son entrée au Sénat, c’est lui qui a co-signé avec la séna- trice Dominique Gillot le rapport par- lementaire sur la loi de finances 2015 de la recherche et de l’enseignement supérieur. “Suite à ce rapport, le gou- vernement qui avait prévu de rogner

L.P.B. : Tout est plus compliqué donc, y com-

cribles au gouvernement. La ministre Geneviève Fioraso qui représente Najat Vallaud-Balkacem défend l’application de la réforme des rythmes sco- laires et sa difficile mise en œuvre dans certains territoires de la Répu- blique. Ce jour-là, Jacques Grosperrin ne prendra pas la parole. C’est le jeu- di suivant qu’il interpel- lera la ministre Chris- tiane Taubira sur les conséquences de sa poli- tique pénale. Applaudis- sements sur les bancs de la droite, huées sur les bancs socialistes. Clas- sique.

“T’as mieux réussi que moi” lui dit Nicolas Sarkozy.

Le sénateur Grosperrin en compagnie du président de la Haute assemblée Gérard Larcher, le 22 janvier dernier.

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