La Presse Bisontine 159 - Novembre 2014

LE DOSSIER

La Presse Bisontine n° 159 - Novembre 2014

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LA RÉFORME QUI MET LES FRANCS-COMTOIS EN ÉMOI

En décembre2015, les électeurs seront appelés aux urnes pour voter la première assemblée de la future Région Bourgogne-Franche-Comté. D’ici là, la présiden- te Marie-Guite Dufay s’est lancée dans un marathon pour tenter de convaincre les Francs-Comtois du bien-fondé de cette réforme territoriale. Une gageure ?

Rencontre avec ceux qui doutent de la fusion Ambiance Ce qu’ils pensent de la réforme Le 1er octobre, la présidente de Région Marie-Guite Dufay a défendu au Kursaal le mariage de la Bourgogne et de la Franche-Comté. Malgré une batterie d’arguments déployés, elle pas vraiment convaincu les “union-sceptiques”.

la batterie d’arguments déployée par Marie-Guite Dufay et les autres inter- venants dont des élus bourguignons pour défendre l’intérêt de ce mariage des territoires qui n’entraînera pas le déclin de Besançon, elle ne les a pas convaincus. Des questions subsistent sur l’avenir de la santé ou de l’université dans la capitale comtoise. “Le risque est que les investissements se fassent à Dijon demain et que des services et des sièges sociaux déménagent. On l’a déjà vu avec le regroupement de la Chambre régionale des comptes à Dijon ou le transfert du siège social de la Caisse d’Épargne” pointe du doigt Nathalie. Étudiant à la fac de lettres, Benjamin a fait part de son inquiétude à la pré- sidente. “Si l’on fusionne les régions, l’Université de Franche-Comté sera for- cément impactée. Vous nous dites que tout ne partira pas à Dijon. Mais tout ne restera pas ici et notamment les sciences humaines. Beaucoup d’étudiants n’auront pas les moyens d’aller là-bas.” Le mariage de ces deux régions pose des problèmes concrets qui appellent des réponses précises de la part du pouvoir politique qui ne les a pas vrai- ment. En l’état des discussions, les détient-il au fond ? Pas facile pour la majorité régionale de défricher le ter- rain d’une réforme qui est minée par le scepticisme. Et Michel de conclure : “Qu’on le veuille ou non, cette réforme se fera. Ce que j’ai appris ce soir, c’est que nous découvrirons son intérêt ou ses conséquences négatives, au fil du temps.” Attendons de voir donc. Les dés sont jetés, mais le jeu est ouvert. T.C.

E lle aurait pu se contenter d’attendre l’officialisation de l’union de la Franche-Com- té et de la Bourgogne définie par le projet de loi de réforme territo- riale qui a été adopté par les députés en juillet. Rien n’obligeait Marie-Gui- te Dufay à donner la parole aux Francs- Comtois et à aller à leur rencontre comme elle l’a fait à l’occasion de quatre réunions publiques pour discuter du mariage annoncé de nos deux régions. Une union forcée pour les uns dans laquelle la Franche-Comté a tout à perdre. Elles est pour d’autres néces- saire et vertueuse. Une de ces rencontres s’est déroulée à Besançon le 1 er octobre. Un constat : le sujet n’attire pas les foules - fallait- il s’attendre à autre chose alors que les missions de la collectivité sont mécon- nues de la plupart des administrés ? Environ 200 personnes avaient pris place dans le Kursaal. Les gens venus en curieux pour tenter d’y voir plus clair dans ce sujet complexe, et essayer peut-être de comprendre les enjeux de cette union soudainement annoncée

comme essentielle, étaient finalement peu nombreux, déduction faite des élus et autresmilitants politiques qui avaient fait le déplacement. Ceux-là étaient venus en découdre avec la présidente de Région Marie-Guite Dufay souvent critiquée pour s’être engouffrée tête baissée dans cette réforme sans avoir pris la mesure du risque pour la Franche-Comté. “C’était couru d’avance, le débat tourne à la politique. Il n’y a rien de concret” peste Denis en quit- tant le Kursaal prématurément, per- suadé qu’il n’obtiendra aucune répon- se à ses questions. Cet employé de la

Marie-Guite Dufay a tenu des propos qui étaient censés ras- surer les Bisontins qui s’interrogent sur l’avenir de leur ville.

sert à quoi, je n’en sais rien. On se marie d’abord et les projets viendront ensui- te. Est-ce que je vais payer plus d’impôts ? Voilà une question concrète” s’agace-t- il. Il n’est pas le seul à redouter que Besançon perde son âme en même temps que son titre de capitale régio- nale dans cette affaire avant d’être dou- cement dépouillée de ses services publics au profit de Dijon. La réforme sonne- rait donc au pire le déclin, au mieux la stagnation, pour la cité comtoise. Pour beaucoup, la ville ne fait pas le poids face à la capitale bourguignonne “qui a l’avantage d’avoir des élus impor- tants comme François Rebsamen (actuel ministre de l’Emploi) qui ne nous feront aucun cadeau, j’en suis sûr” redoute Michel, un retraité. Le débat fait res- surgir chez certains le vieux complexe d’infériorité des Bisontins face aux Dijonnais. “Vous pensez sérieusement qu’à terme les services d’État régionaux comme la D.R.E.A.L. ou même la pré-

fecture resteront à Besançon ? Je suis sceptique” enchaîne Gérard. Pour Robert qui est issu de l’Éducation nationale, il ne fait aucun doute que “cette réforme est précipitée, trop hâti- ve. On met la charrue avant les bœufs. On nous dit pour commencer que cette union a pour but de réaliser des éco- nomies. Mais je n’ai obtenu ce soir aucun détail sur ce point. Personne n’a fait préalablement une analyse des écono- mies à réaliser. On nous dit maintenant qu’elles viendront plus tard. Cela don- ne le sentiment que cette réforme a été très mal préparée. On est dans le flou le plus total. Cette navigation à vue me laisse dubitatif. Pourtant, je ne suis pas contre ce mariage. Mais des coopéra- tions inter-régions ont déjà été mises en place, travaillons d’abord au renforce- ment de ces liens avant d’aller plus loin.” Le 1 er octobre, les “unions-sceptiques” étaient nombreux au Kursaal. Malgré

fonction publique territo- riale à Besançon était là pour être rassuré. Pour lui, l’union de la Bourgogne et de la Franche-Comté est synonyme, à plus moins long terme, de mutation à Dijon. “Cette réforme m’a tout l’air d’être “piège à con” pour les Francs-Com- tois comme je l’ai lu sur la pancarte qu’une personne tenait dans le public. Elle

“Dans le flou le plus total.”

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