La Presse Bisontine 153 - Avril 2014

LES POINTURES DE LA RECHERCHE

La Presse Bisontine n° 153 - Avril 2014

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BESANÇON

Jean-René Binet, spécialiste de la bioéthique “La France est le pays qui a

le plus réfléchi sur la bioéthique”

D ans l’amphithéâtre de la faculté de droit de la Bouloie, sa pre- mière apparition devant les élèves inscrits en première année de droit civil a fait son effet. C’est vêtu de sa toge rouge de professeur que Jean- René Binet a entamé l’année. Depuis, il ne l’a plus quittée. “Je crois que c’est assez bien accepté” s’amuse-t-il. Une anecdote, certes, qui tend à prouver qu’en matière de justice, plus qu’ailleurs, on respecte les codes. Jean-René Binet (42 ans) ne prétendra pas le contraire. Spécialiste de la bioéthique, directeur du Centre de recherches juridiques de l’Université de Franche-Comté, membre honoraire de l’Institut universitaire de France (2006- 2011), son travail le confronte souvent au temps médiatique. Exemple de taille : le cas Vincent Lambert, où il est question d’arrêt de traitement en fin de vie. “Il est clair que la question de la bioéthique est très souvent au cœur de l’actualité, admet le professeur arrivé le 1 er septembre 2003 en poste à Besançon. À une question, il faut trouver une solution. Dans le cas de la fin de vie, il faut savoir ce que la loi prévoit. La loi Léonetti prévoit une possi- bilité d’interruption des traitements inu- tiles quand il n’est plus possible de lutter contre la mort qui vient. Le Conseil d’État a mandaté un collège d’experts pour éclair- er sa décision. Vu la gravité de la déci- sion, ce n’est pas choquant que la justice prenne son temps” dit-il. La bioéthique, parfois définie comme la morale de la science, s’est forgée après le questionnement de médecins dans les années soixante. Les progrès de la médecine, éventuels, comme le clonage, ou actuels comme la congélation des embryons pour faire naître un bébé plus tard, doivent-ils nécessairement faire craindre une dérive que les juristes ne sauraient anticiper ? Jean-René Binet n’y croit pas : “La science va certainement Spécialiste du droit de la bioéthique en France, le professeur bisontin de droit privé Jean-René Binet fait office de référence. Euthanasie, procréation médicalement assistée, il répond à des questions juridiques qui animent l’actualité. Entretien.

Jean-René Binet est directeur du Centre de recherches juridiques de l’Université de Franche-Comté, spécialisé dans la bioéthique.

(P.M.A.) est interdite en France à ces couples. Le gou- vernement prévoyait de l’autoriser mais, “sur cette question, il a reculé. Cela a créé un désordre, admet le juriste. C’est devenu un prob- lème de responsabilité poli- tique plutôt qu’un problème juridique, car ces couples pensent pouvoir faire pronon- cer l’adoption d’enfants nés de P.M.A. réalisée à l’étranger, en Espagne ou en Belgique.” Or, dans trois cas récents, le

moins vite que ce que l’on prétend parfois. Il ne faut jamais exagérer les résultats… ce qui ne conduit pas à minimiser le mérite des chercheurs. Mais quel que soit le rythme du progrès, le droit n’est pas en retard : il se situe sur un autre plan. Ce n’est parce qu’une technique est possible qu’elle est socialement souhaitable” dit celui qui a par- ticipé aux États Généraux de la bioéthique en 2009. Il a également été entendu sur la question de la révision de la loi par les mem- bres de l’Assemblée nationale et du Sénat. Son objectif : répondre à des questions prag- matiques du style “la médecine doit-elle à tout prix assouvir le désir d’enfant, ou jusqu’où chercher à savoir si l’on risque cer- taines maladies ?” En la matière comme en d’autres, la loi crée parfois le désordre. Ainsi, la loi Taubira sur le mariage pour tous permet l’adoption de l’enfant du con- joint dans les couples de même sexe. Toute- fois, la procréation médicalement assistée

elle pas à tous, mais seul le législateur peut y remédier.” Selon Jean-René Binet, on ne peut pas dire que la France est en retard par rapport à ses voisins car il n’y a pas de compétition en la matière où seule compte la certitude du bien-fondé des solutions adoptées, ce qui suppose une réflexion approfondie et ouverte sur la complexité des questions : “Nous sommes le pays qui a le plus réfléchi pour élaborer sa législation en matière de bioéthique. Les autres pays ont adopté par- fois d’autres solutions. En Suisse, comme en Allemagne ou en Italie, la congélation des embryons est interdite. En Inde, les mères porteuses sont autorisées et l’on y découvre des établissements qui s’apparentent à de véritables usines à bébés ? Sommes-nous en retard par rapport à l’Inde ? Je ne crois pas” conclut-il. En France, la bioéthique a ses garde-fous… E.Ch.

Bio express Jean René Binet, 42 ans

Professeur de droit privé, directeur du Centre de recherches juridiques de l’Université de Franche-Comté. Son dernier ouvrage : “Droit des personnes et de la famille”.

“La fraude corrompt tout.”

procureur a estimé que l’adoption par la seconde femme ne pouvait être prononcée car la situation est fondée sur une fraude à la loi. “Dans ce cas, le procureur applique le principe fraus omnia corrumpit, (la fraude corrompt tout). Ce n’est pas un vide juridique, car il y a une solution. Peut-être ne convient-

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