La Presse Bisontine 149 - Décembre 2013
LE PORTRAIT
43 La Presse Bisontine n° 149 - Décembre 2013
BESANÇON
À la mosquée Al Sounna
Français, musulmans et profondément républicains Les récentes inscriptions racistes et croix gammées découvertes sur deux
I ls s’appellent Abdallah,Messaoud et Mohammed, ils sont français. N’en déplaise peut-être à tous ces ignorants qui étalent leur igno- rance sur les murs d’une mosquée à coup de peinture noire. Chacun d’eux a son parcours. L’un est arrivé au milieu des années cinquante en Fran- ce, un autre dans les années soixan- te, certains ont connu les foyers Sona- cotra, tous sont venus travailler dans ce qu’ils considéraient justement com- me “notre métropole.” “Chacun est venu pour une raison bien précise, mais aucun pour prendre la place, le pain ou l’air de quelqu’un d’autre” disent- ils. Ces actes imbéciles constatés pour la troisième fois depuis le début de l’année bisontine. Ses fidèles prônent un discours à l’opposé des clichés délétères qui circulent à leur endroit. mosquées bisontines ont profondément meurtri la communauté musulmane
Messaoud Benselama, Mohammed Ansri et Abdallah Hamzaoui :
“Nous n’avons pas à subir les conséquences de ce qu’on n’a pas fait.”
par les membres de l’association Al Sounna sont une nouvelle insul- te à la liberté et à la Répu- blique. Ce “mouvement de racisme ordinaire” com- me le qualifie Abdallah Hamzaoui, le président de l’association Sounna, s’amplifie de manière inquiétante. C’est la troi- sième fois cette année que la mosquée du quartier Saint-Claude est la cible d’inscriptions racistes. “Tout cela est fait gratui- tement, sans raison. Nous sommes Français, nous
pas pourquoi” s’interroge toujours M. Hamzaoui. “Nous ne voulons que la paix, être en règle avec ce qu’exige de nous notre religion et avec le futur” ajouteM. Benselama. Cesmusulmans, bien conscients de vivre dans une France laïque, ne comprennent pas qu’on les stigmatise du seul fait de leurs croyances religieuses. “Nous res- pectons cette laïcité comme nous res- pectons toutes les lois de la République” plaident-ils visiblement encore mar- qués par ces récents événements. Un peu de connaissance historique, une dose de culture et un poil d’ouverture, voilà les simples ingré- dients pour comprendre leur démarche qu’ils expriment ainsi : “Les gens de l’islam ont récolté les qualités qui ont été demandées au prophète Moïse à travers les 10 Commandements, ils ont également récolté les qualités demandées par Jésus. Et notre pro- phète Mohammed est le continuateur et le garant de tout ce que Dieu a demandé aux gens de l’islam.” En résu- mé, nous sommes tous les héritiers de la même culture monothéiste, ce que semblent encore ignorer les fon- damentalistes et extrémistes de tout poil. Les piliers de l’islamne seraient- ils pas comparables aux préceptes véhiculés par le christianisme ? “Pour nous, l’aumône se traduit tous les jours. Prenez quelqu’un qui n’a même pas les moyens de prendre le bus. Mettez cent Algériens, vous verrez qu’aumoins 60 % d’entre eux lui paieront son tic- ket de bus” illustre le fidèle. Tous sen- tent bien le climat se détériorer, notam- ment depuis l’évocation d’un certain débat sur l’identité nationale. “Il y a les diviseurs, une certaine catégorie de gens qui n’ont pas envie que la paix soit sur Terre.” “Al Sounna” signifie “le cheminement” en arabe. Cheminement, c’est-à-dire tout ce que montre le prophète, tous les préceptes qu’il conseille de suivre. À ceux qui salissent les murs et les lois de la République, on ne saurait trop conseiller de lire ne serait-ce qu’une fois la parole du prophète… J.-F.H.
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Un certain débat sur l’identité nationale.
vivons au sein de la communauté fran- çaise, clairement c’est notre commu- nauté qui est visée” déplore le prési- dent. Depuis quelques semaines, par mesure de précaution, les portes de la mosquée Sounna n’ouvrent qu’une demi-heure avant la prière et sont fer- mées une demi-heure après la fin de la prière. Le comble pour un lieu cen- sé accueillir tout le monde à toute heu- re. Mais une précaution nécessaire en ces temps pour le moins troublés. “Il y a une montée d’intolérance visant une partie de la population françai- se, mais personne ne sait ce que ces personnes-là ont fait pour la France. Il y en a qui oublient ce détail” com- menteMessaoud Benselama,membre de l’association. Comme ses cama- rades qui ont œuvré et travaillé pour la France, il ne demande pas autre chose qu’être considéré, simplement. “Nous n’avons pas à subir les consé- quences de ce qu’on n’a pas fait” esti- me-t-il. La mosquée de Saint-Claude a été édifiée en 1994, sans heurts particu- liers. Ces actes de malveillance sont relativement récents et d’autant plus mal vécus par la communauté algé- rienne que celle-ci s’attache à “tra- vailler avec tout le monde à la mos- quée, avec les chrétiens, les juifs et les protestants.Même les bouddhistes dont des communautés viennent parfois ici. Ce qui arrive en ce moment, on ne sait
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© Arnaud Castagné
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