La Presse Bisontine 144 - Juin 2013

LES POINTURES DE LA RECHERCHE

La Presse Bisontine n° 144 - Juin 2013

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BESANÇON Labo de psychologie Pourquoi certaines choses attirent votre attention et d’autres non ? C’est une des questions à laquelle le chercheur bisontin André Didierjean tente de répondre en l’appliquant à des pilotes de chasse de l’armée de l’air. Il cherche à identifier si certaines informations peuvent être traitées de manière prioritaire par le cerveau lorsque les aviateurs sont installés dans leur cockpit.

A ndré Didierjean est cher- cheur à l’université de Franche-Comté, directeur du laboratoire de psycho- logie à Besançon et membre de l’Institut Universitaire de France. Comme ses collègues professeurs, il espère, à chacun de ses cours magistraux, captiver l’attention de ses élèves. Pas toujours évident… même pour cet universitaire spé- cialisé sur le thème de l’attention. “Nous essayons de répondre à des questions simples, telles que : pour- quoi, lorsque je suis au volant, mon œil va chercher au bon endroit les informations alors qu’il en existe une multitude. Si vous cherchez un stylo, vous le chercherez sur la table devant vous, par terre éventuelle-

attente. “Je prends un exemple simple. Imaginons que vous rouliez sur l’autoroute. Vous discutez avec votre passager quand une voiture freine devant vous. Votre œil per- çoit le feu rouge mais un traitement est déjà engagé pour analyser ce que vous dit votre passager. Le trai- tement du feu stop va être mis en attente quelques dixièmes de secondes. Nous étudions s’il existe des exceptions à ce phénomène.” Pour l’instant fondamentales, ces études serviront au quotidien. Elles sont susceptibles d’intéresser plu- sieurs secteurs.L’armée par exemple. Ainsi, à Salon-de-Provence - siège de l’école de l’air - le Bisontin ten- te d’évaluer les critères de recherche d’attention des pilotes de chasse,

ment. Jamais au-dessus de votre tête” simplifie l’universitaire. Avec deux collègues, un Parisien et un Américain, il étudie actuelle- ment des questions autour de l’apprentissage des régularités de notre environnement (phénomène

qui nous conduit à ne jamais chercher notre stylo au pla- fond), le vieillisse- ment, ou encore pourquoi lorsque deux informations arrivent au cer- veau, l’une est presque toujours traitée avant l’autre, la seconde étant alors mise en

Les mots sont perturbateurs.

confrontés visuellement à de nom- breux choix. Le but : réduire au maximum le temps de choix entre deux informations. La Nasa, dans les années cinquan- te, fut pionnière en lamatière. Dans son simulateur, elle demandait au pilote d’atterrir de nuit, sur une pis- te d’aéroport. Au milieu de la pis- te, elle avait volontairement mis un avion barrant le passage.Un nombre non négligeable des pilotes ne voyaient pas le zinc et se posaient “au travers”,prouvant que l’attention sélectionne les informations que nous percevons en fonction de nos buts, parfois avec des conséquences graves. “Une autre question que nous étudions ici à Besançon concerne les liens entre la mémoire et le langa- ge” explique André Didierjean. Les mots sont-ils toujours néces- saires pour mémoriser ? Les appren- tissages s’ancrent-ils mieux après avoir été verbalisés ? Les recherches semblent plutôt indiquer le contrai- re : un grand nombre de compé- tences s’acquièrent plus efficace- ment, du moins dans un premier temps, si on ne les décrit pas. Pour comprendre le pouvoir perturba- teur des mots sur la mémoire et l’apprentissage, imaginez un repas avec des amis au cours duquel vous sont servis des vins de qualité. Pour peu que vous ayez affaire à des ama- teurs, une discussion s’enclenchera peut-être, au cours de laquelle on débattra du caractère boisé ou astrin-

gent de ces grands crus. Peut-être même vous demandera-t-on votre avis. Pensez-vous alors que vous serez en mesure de mieux recon- naître ce vin ultérieurement ? Les résultats des travaux qui testent en laboratoire cette question mon- trent que la verbalisation n’a pas d’effet sur l’identification du vin par les experts : les goûteurs chevron- nés (des œnologues dans l’étude d’origine) reconnaissent le vin goû- té précédemment, qu’ils aient eu ou non à le décrire dans la deuxième phase de l’expérience. Chez des novices qui ne boivent presque jamais de vin, la verbalisation n’a pas non plus beaucoup d’effets : qu’ils aient eus à décrire le vin ou à remplir des grilles de mots croi- sés, ils ont eu les mêmes difficultés à reconnaître le vin. En revanche, les résultats ont été plus surprenants chez un groupe d’amateurs de vins : ils reconnais- sent nettement moins bien les vins lorsqu’ils en ont parlé. L’explication à ce phénomène est que la trace en mémoire qu’ils ont construite est essentiellement perceptive, et que mettre des mots sur la sensation dégrade cette trace. Cet effet délé- tère de la verbalisation se prolon- ge-t-il à court, voire à long terme ? À ce jour, la question reste ouver- te… Le chercheur bisontin espère y répondre. E.Ch.

Le chercheur bisontin André Didierjean et son travail sur l’attention.

VERSION 2008

Un œnologue amateur est moins performant pour recon- naître un vin s’il en parle.

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